PHILIPPE Jean, Marius, Louis. PHILLIPE à l’état civil

Par Jean-Louis Ponnavoy

Né le 14 novembre 1905 à Lyon IVe (Rhône), fusillé le 1er avril 1944 à Karlsruhe (Bade-Wurtemberg, Allemagne) ; commissaire de police ; résistant réseau SR Alliance.

Jean Philippe était le fils de Jean Marius, musicien, âgé de 28 ans et de Louise Marie Cornu, lingère, âgée de 26 ans. Il se maria le 19 août 1936 à Casablanca (Maroc) avec Julie Jeanne Bouillane. Il était père d’une petite fille adoptive.

Il exerça le métier de représentant puis il effectua son service militaire de novembre 1925 à avril 1927 au 8e régiment de tirailleurs, à Bizerte (Tunisie). Il s’engagea dans les troupes coloniales en 1929 et fut envoyé en Indochine où il travailla pour le 2e Bureau. Il rentra en France en 1933 et fut affecté dans un régiment de tirailleurs sénégalais, à Toulon puis fut muté en octobre 1934 à Casablanca (Maroc) comme administratif.

Ayant réussi à l’examen de commissaire de police, il quitta l’armée en mars 1937 avec le grade de sous-lieutenant. Il était en poste au Creusot en 1939 et il fut mobilisé le 30 août. Fait prisonnier en juin 1940, il s’enfuit et fut nommé lieutenant. Il fut affecté à l’automne 1940 comme commissaire de police à Lourdes.

Dès cette époque il faisait déjà partie du réseau de résistance belge "Sabot" et contribuait au passage de citoyens belges vers l’Espagne. Nommé commissaire à Toulouse en novembre 1941, il hébergea chez lui le chef d’un réseau belge et mit à profit sa fonction pour établir des centaines de faux papiers d’identité pour des agents belges. Il permet aussi à des scouts juifs de passer en Suisse. Il fit alors la connaissance d’un membre du réseau de renseignements Alliance qu’il intégra à l’été 1942.

Après l’invasion de la zone sud, il devint chef de la région Toulouse-Pyrénées, secteurs "Caserne" et "Clinique" avec le pseudonyme "Basset" et le matricule "U1". Il recrutait des agents, les formait au renseignement et en même temps il usait de sa position dans la police pour avertir les résistants des dangers qui les menaçaient et il sauva de nombreux juifs.

Ayant reçu début 1943 l’ordre d’établir la liste des juifs du 7e arrondissement qu’il dirigeait, il refusa d’obéir et donna sa démission à ses supérieurs les 13 et 15 janvier en exposant sa position dans des courriers extrêmement courageux, conservés aujourd’hui aux archives départementales de la Haute-Garonne.

Suite à l’imprudence d’un agent de liaison, Jean Philippe fut arrêté par la Gestapo le 29 janvier 1943 à Beaumont-de-Lomagne (Tarn-et-Garonne) et incarcéré à la prison de Toulouse où il fut interrogé et torturé. Il fut transféré à la prison de Fresnes (Seine, Val-de-Marne) et le 18 novembre 1943 le dossier d’accusation d’espionnage au profit d’une puissance ennemie fut transmis par la Gestapo de Strasbourg au Tribunal de guerre du Reich sous la classification "NN" (Nacht und Nebel, Nuit et Brouillard).

Il fut déporté vers l’Allemagne à partir du camp de Compiègne début décembre et incarcéré à la prison de Karlsruhe puis à celle de Freiburg-im-Breisgau (Bade-Wurtemberg, Allemagne). Traduit les 13 et 14 décembre 1943, devant le 3e Senat (chambre) du Tribunal de guerre présidé par le juge Karl Schmauser, ainsi que deux autres coinculpés, Paul Flamant* et Jean Voituret*, il fut condamné à mort. Le lendemain il fut transféré à la forteresse de Bruchsal (Bade-Wurtemberg, Allemagne) et le jugement fut confirmé le 27 janvier 1944 par l’amiral Max Bastian, président du Tribunal.

À l’aube du 1er avril 1944, Jean Philippe fut extrait de sa cellule ainsi que 13 autres codétenus pour être conduit au champ de tir de la Wehrmacht, dans la forêt du Hardtwald, à Karlsruhe (Bade-Wurtemberg, Allemagne) puis fusillé à 7h06 en compagnie du colonel Paul Flamant*. Les cadavres furent jetés dans une fosse commune, à l’extérieur de l’enceinte du cimetière central de Karlsruhe. En mai 1945 ils furent découverts par l’armée française et inhumés avec les honneurs militaires le 30 juin 1945 dans le cimetière français. Le 3 juillet 1947, les corps furent à nouveau exhumés et retrouvèrent pour la plupart leur commune d’origine. Depuis le 1er avril 2014, une stèle rappelle à Karlsruhe leur sacrifice.

Il obtint la mention "Mort en déportation" par arrêté du 26 février 2013.

Il fut homologué dans le grade de capitaine des Forces françaises combattantes (FFC) et "Déporté et interné résistant" (DIR), dossier GR 16 P 474235. Il fut décoré à titre posthume de la Légion d’honneur et de la Médaille de la Résistance (décret du 15/06/1946 et JO du 11/07/1946).

Le titre de "Juste parmi les Nations" lui fut attribué en 1997.

Une rue de Toulouse porte son nom ainsi que la 9e promotion de commissaires de police de 1957/1958.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article181837, notice PHILIPPE Jean, Marius, Louis. PHILLIPE à l'état civil par Jean-Louis Ponnavoy, version mise en ligne le 19 juin 2016, dernière modification le 16 avril 2021.

Par Jean-Louis Ponnavoy

SOURCES : Marie-Madeleine Fourcade, "L’Arche de Noé", éd. Fayard, Paris 1968.— Auguste Gerhards "Tribunal du 3e Reich", archives historiques de l’armée tchèque, à Prague, Le Cherche Midi, Paris 2014.— "Livre Mémorial des Déportés de France" de la F.M.D. tome 1.— Mémorial de l’Alliance, 1948.— Brochure "Karlsruhe Erinnert" éditée par la ville de Karlsruhe en 2015.— Sites internet : "Commissaires résistants" École nationale de la police, "Comité français pour Yad Vashem".— Mémoire des Hommes.— Mémorial Genweb.— État civil.

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