HUANG Yongsheng 黃永勝

Par Jean-Pierre Maurer

Né en 1906 au Hubei (ou au Jiangxi ?). Un des premiers soldats de l’Armée rouge. Chef d’état-major de l’A.P.L. (mars 1968-septembre 1971). Protagoniste de l’affaire Lin Biao, arrêté en septembre 1971, condamné en janvier 1981 à dix-huit ans de réclusion.

Jeune paysan illettré, né en 1906 au Hubei (ou au Jiangxi ?), Huang quitte ses buffles pour participer à la révolte de la Moisson d’automne au Hunan (1927). Après l’échec de celle-ci, il suit Mao Tse-tung (毛澤東) et devient chef de groupe dans le célèbre régiment de Sanwan, la « graine » de l’Armée rouge, qui va former dans les monts Jinggang la première base communiste rurale de Chine centrale. Cela lui vaudra sans doute la protection de Mao pendant les troubles de Canton en 1967.
Il commande un régiment sous Lin Biao (林彪) pendant la Longue Marche et se distingue en sauvant son régiment encerclé au Sichuan : il lui fait prendre l’uniforme de l’ennemi. Sa réputation de ruse et de courage le fait mettre à l’avant-garde. Mais il n’est pas sûr qu’il ait été l’un des volontaires qui réussirent le célèbre franchissement du pont de chaînes de la rivière Dadu. Il suit à Yan’an les cours de Lin Biao à l’Université de l’Armée rouge. En 1937, il commande contre les Japonais un régiment de la 115e division sous Lin Biao, puis un district militaire en Chine du Nord sous Nie Rongzhen (聶榮臻).
Il rejoint Lin Biao en Mandchourie en 1947 et sera, avec le surnom de « Toujours Victorieux », un des brillants subordonnés de Lin dans la 4e Armée de campagne qui bouscule les Nationalistes de la Mandchourie à Canton. En septembre 1949, il commande en second le district militaire du Guangxi et commence à établir son fief en Chine du Sud. Promu général en 1955, il prend le commandement en décembre 1955 de la région militaire de Canton. Il sera un des chefs de second échelon de l’A.P.L. importants par la continuité de leur commandement territorial.
C’est la Révolution culturelle qui va le mettre au premier plan, grâce aux Gardes rouges ou plutôt malgré eux. C’est contre lui et son compère Tao Zhu (陶鑄), le chef politique du Sud, qu’ils se déchaînent en effet en 1966 et 1967. Tao Zhu est destitué en septembre 1967 mais Huang maintient courageusement et astucieusement sa place dans la période de graves troubles que connaît Canton. Les Gardes rouges d’extrême-gauche l’accusent de patronner la « terreur blanche » dont ils sont victimes dans l’été 1967. Il est vrai qu’un fils de Huang dirige la faction droitiste des Gardes rouges. Huang est soutenu par Pékin, qui le charge de préparer la constitution du comité révolutionnaire de Canton. Peu après la laborieuse création de celui-ci en février 1968, Huang Yongsheng est appelé à Pékin, où il rejoint son ancien patron Lin Biao et prend le poste de chef d’état- major de l’A.P.L. retiré à Yang Chengwu en mars.
Apparu ainsi au premier plan — il devient n° 4 du régime — Huang ne renie pas, voire cultive son origine paysanne, son franc-parler, son inélégance et le manque d’éloquence qui lui vaut le surnom de « général muet ». Mais trop proche de Lin Biao, il va accompagner celui-ci dans sa chute.
L’affaire Lin Biao est restée mystérieuse malgré les explications officielles données en 1972, 1973 et 1981, et le rôle de Huang dans cette affaire n’est pas clair. A-t-il vraiment secondé Lin dans son complot, par fidélité à l’esprit de la 4e Armée de campagne, ou bien a-t-il été poussé dans la charrette de septembre 1971 par Zhou Enlai (周恩來) et des collègues militaires jaloux de son importance (Xu Shiyou (許世友)) ? En tout cas, un texte de Mao daté de l’été 1971 cite nommément Huang comme ayant comploté contre lui avec Lin Biao au plénum de Lushan (23 août-6 septembre 1970). Huang aurait fait ensuite son autocritique et reçu un avertissement direct de Mao contre toute révolte de l’A.P.L. Son nom apparaît clairement dans les documents diffusés après l’enquête sur le complot « 571 » (voir Chen Boda (陳伯達)). Bien qu’il n’en ait pas été la vedette, et que les révélations diffusées contre lui soient restées fragmentaires, le grand procès ouvert dans l’automne 1980 contre les partisans de Lin Biao a condamné Huang Yongsheng à une peine lourde : 18 ans de prison et 5 ans de privation de droits civiques (janvier 1981).

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article182127, notice HUANG Yongsheng 黃永勝 par Jean-Pierre Maurer, version mise en ligne le 26 octobre 2016, dernière modification le 26 octobre 2016.

Par Jean-Pierre Maurer

SOURCES : Outre WWCC, voir : Ching Ping et Bloodworth (1973). — Sur Huang à Canton, voir Guillermaz (1972). — Gittings in CQ, n° 26, 1966. — Dômes in The Asia Quarierly, nos 1 et 2, 1971. — Sur Huang et le « complot 571 » (l’affaire Lin Biao) : Schram (1974). — China News Analysis, nos 892, 896, 897. — Issues and Studies, vol. VIII, n° 3 (décembre 1971), nos 6 et 8, mars-mai 1972. — Kau (1975). — Pékin Information, n" 35-36, 1973. — Zhonggong Yanjiu (Études sur le communisme chinois), 1972, n° 6-7 — RMRB, 26 janvier
1981.

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