MOTLANTHE Kgalema Petrus

Par Raphaël Botiveau

Né le 19 juillet 1949 à Boksburg (Afrique du Sud) ; employé municipal ; député ; membre de Umkhonto we Sizwe (MK) (branche armée de l’ANC) ; membre du South African Communist Party (SACP) ; secrétaire général puis vice-président de l’African National Congress (ANC) ; formateur puis secrétaire général du National Union of Mineworkers (NUM) ; membre du Congress of South African Trade Unions (COSATU) ;

Syndicaliste et homme politique sud-africain né à Boksburg (Afrique du Sud) le 19 juillet 1949. Employé municipal à Johannesburg, il adhère à l’African National Congress (ANC) avant d’être arrêté et de purger une peine de dix ans d’emprisonnement. À sa libération il rejoint le mouvement syndical dont il devient l’un des principaux dirigeants. Élu secrétaire général puis vice-président de l’ANC après l’apartheid, il est brièvement élu à la présidence du pays entre 2008 et 2009, avant d’en devenir le vice-président jusqu’en 2014.

Kgalema Motlanthe grandit dans le township d’Alexandra, au nord de Johannesburg. Sa langue maternelle est le Sepedi et sa famille est originaire des provinces du Limpopo et du Mpumalanga au nord-est du pays. Il est le fils aîné d’une domestique, qui deviendra ouvrière textile, et d’un agent d’entretien qui sera employé dans les bureaux de la multinationale minière Anglo American à l’instar de plusieurs autres membres de sa famille. Ses grands-parents maternels s’étaient installés dans un camp de squatters de Benoni (sud-est de Johannesburg). C’est là que son grand-père, Kgalema Marcus Madingoane, s’impliqua dans la vie publique jusqu’à être élu conseiller municipal et à participer à la création du township de Daveyton dans les années 1950.

Les parents de Motlanthe sont expulsés d’Alexandra durant sa douzième année. Élevé dans une famille chrétienne pratiquante, il est scolarisé dans le primaire au sein d’une école missionnaire anglicane qui sera fermée pour avoir refusé le Bantu Education Act, l’une des principales lois ségrégationnistes de l’apartheid. Il poursuit son cursus et s’inscrit au lycée d’Orlando, à Soweto. En 1964 il obtient une bourse de l’Église anglicane pour passer son baccalauréat au Swaziland et se destiner à la prêtrise. Le Ministère des Affaires bantoues lui refuse la sortie du territoire et Motlanthe n’obtiendra son baccalauréat que des années plus tard, au cours de sa détention sur Robben Island. Il commence à s’intéresser à la politique au contact d’écrits religieux et est marqué par l’expérience des Black Panthers ainsi que, en Afrique du Sud, par le Black Consciousness Movement. Footballer talentueux, il jouera un temps comme professionnel et sera marqué par son entraîneur, Russa Bud-Mbele, fils du deuxième secrétaire général de l’ANC.

Employé municipal à Johannesburg en 1969, il est en charge de la supervision des magasins de spiritueux de Soweto, dans un service où il travaille sept ans aux côtés de plusieurs membres actifs de l’ANC clandestin. C’est là qu’il rejoint Umkhonto we Sizwe (MK), la branche armée du mouvement. Il achemine régulièrement de jeunes recrues vers le Swaziland où elles doivent suivre une formation militaire. Il épouse Mapula Mokate, radiographe de Sophiatown, en 1975. La même année, la cellule formée par Motlanthe et ses collègues reçoit l’instruction d’entreprendre des opérations de sabotage et se voit confier des explosifs. Pris et torturés, deux de ses camarades finissent par révéler son nom et il est arrêté en avril 1976. Condamné pour terrorisme en 1977, Motlanthe est envoyé à la prison de Robben Island, au large du Cap, véritable « université » du mouvement de libération, où il purgera sa peine de dix ans.

C’est en prison que Kgalema Motlanthe accroit sa stature et sa position dans l’ANC. Membre de son comité politique sur l’île, il participe à l’accueil des nouveaux arrivants – notamment des jeunes arrêtés suite au soulèvement de Soweto en 1976. Il se charge de leur éducation politique. L’enseignement et la formation des cadres politiques et syndicaux constituent l’une des constantes de sa carrière et de son caractère : mesuré dans ses jugements, non-dogmatique, attaché au débat et à la recherche du consensus, Motlanthe est respecté parmi les différentes organisations politiques représentées sur Robben Island. Bachelier en prison, il suit également un cours de menuiserie par correspondance et s’initie seul à la musique. Continuant sa propre formation politique au contact de la vieille garde de l’ANC, dont Harry Gwala et Govan Mbeki, le père du futur président sud-africain Thabo Mbeki, il est recruté par le South African Communist Party (SACP) et décrira ces années passées sur l’île comme « les plus enrichissantes » de sa vie. À l’instar de bien des dirigeants de sa génération, qui n’y adhérèrent pas par convictions idéologiques profondes, Motlanthe se désengagera peu à peu du parti communiste après la fin de l’apartheid et cessera d’y appartenir en 2001.

Libéré en 1987, Motlanthe est « déployé » dans le mouvement syndical et commence à travailler comme formateur au National Union of Mineworkers (NUM). Rapidement en charge du Département de l’éducation du syndicat, il joue un rôle clé dans la formation des cadres du NUM, le combat pour l’amélioration des conditions de sécurité et la santé dans les mines, ainsi que dans la diffusion des idées du mouvement de libération parmi les mineurs. Occupant des positions dirigeantes dans l’ANC, le SACP et le Congress of South African Trade Unions (COSATU), il devient secrétaire général du NUM en 1992, remplaçant Cyril Ramaphosa alors élu secrétaire général de l’ANC. Motlanthe joue alors un rôle important dans le renforcement des finances du syndicat et dans le développement de sa capacité de formation.
En 1997, il est élu secrétaire général de l’ANC où il poursuit son travail d’administrateur talentueux, une marque de fabrique du syndicat des mineurs. Politiquement, Motlanthe est respecté pour son habilité dans la négociation et ses qualités de stratège. Introverti plus que rhéteur, il se tient à l’écart des luttes d’ego intestines, qui agitent le parti au pouvoir depuis 1994. À l’époque où Thabo Mbeki contrôle le parti d’une main de fer (1997-2007), Kgalema Motlanthe reste dans son ombre et cautionne les positions controversées du Président sur le Sida ou le Zimbabwe notamment. Sa relation avec le dirigeant de l’ANC se tend pourtant au fil de la lutte politique qui oppose Thabo Mbeki et Jacob Zuma. Ce dernier est élu président de l’ANC en 2007 et Motlanthe devient alors son vice-président. Suite à la démission de Mbeki en 2008, imposée par les instances dirigeantes de l’ANC, le Parlement élit Kgalema Motlanthe troisième président de la République d’Afrique du Sud. Il exerce cette fonction jusqu’à l’élection de Zuma à la présidence, moins d’un an plus tard, et devient son second à la tête du pays. Face aux désillusions suscitées par la présidence Zuma, Motlanthe est poussé à se présenter contre lui à la conférence nationale de l’ANC en 2012. Menant campagne sans beaucoup de conviction – une indication de sa volonté de se retirer de la vie politique – il est défait et quitte ses fonctions dirigeantes, dans l’ANC d’abord, puis comme vice-président et député sud-africain suite aux élections générales de 2014. Motlanthe, qui reste une figure politique de référence et critique de la direction prise par l’ANC sous la présidence de Jacob Zuma, est parfois cité comme relève potentielle.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article182584, notice MOTLANTHE Kgalema Petrus par Raphaël Botiveau, version mise en ligne le 19 juillet 2016, dernière modification le 19 juillet 2016.

Par Raphaël Botiveau

Sources :
ANTHONY BUTLER, “Motlanthe biographer rewrites past and present,” Business Day Live < http://www.bdlive.co.za/opinion/columnists/2012/10/12/motlanthe-biographer-rewrites-past-and-present > 12 October 2012
EBRAHIM HARVEY, Kgalema Motlanthe : a political biography, Auckland Park, Jacana, 2012

rebonds ?
Les rebonds proposent trois biographies choisies aléatoirement en fonction de similarités thématiques (dictionnaires), chronologiques (périodes), géographiques (département) et socioprofessionnelles.
Version imprimable