BESSON Alexandre, Antoine

Par Michel Cordillot

Né le 6 juillet 1826 à Chevannes (Yonne), mort en 1890 à Mézilles (Yonne). Ouvrier serrurier. Républicain, puis membre de sociétés secrètes, insurgé en 1848, puis 1851. Exilé à Londres, membre du Conseil général de l’AIT.

Fils d’un ancien soldat de la Grande Armée qui avait fait la campagne de Russie avant de devenir régisseur du château de Fontaine-Madame, Alexandre Besson fit son apprentissage de serrurier, puis partit faire son Tour de France.

Gagné très jeune aux idées républicaines, il adhéra à Lyon (Rhône) aux sociétés secrètes révolutionnaires de la fin de la Monarchie de juillet.

Lorsqu’éclata la Révolution de février 1848, il se trouvait à Paris. Il combattit rue Greneta (VIe arr., maintenant IIe), où il fut blessé légèrement à la tête le 22 février, puis sur la barricade de la rue de l’Arbre-sec (IVe arr., maintenant Ier), où il demeurait. Le 24 février, il fut grièvement blessé à la jambe devant le Palais Royal. Il fut recueilli par une prostituée qui le soigna avec le dévouement d’une sœur de charité.

Revenu exercer son métier à Toucy (Yonne) dans l’attente d’une place de garde forestier qu’il avait demandée en tant que blessé de février, il adhéra aux sociétés secrètes républicaines de Puisaye. En 1851, il était l’un des décurions de la Nouvelle Montagne à Toucy (voir J.-F. Bouillard) et il fabriquait dans son atelier des armes blanches.

Chef de l’une des colonnes de républicains insurgés qui essayèrent de prendre Toucy au lendemain de l’annonce du coup d’État du deux décembre 1851, il se retrouva face à son père, rallié à l’ordre bonapartiste. Après l’échec dû à l’arrivée de renforts, A. Besson put échapper à l’arrestation. Avec l’aide de son beau-frère Roux qui le ravitailla, il éluda toutes les recherches en se cachant durant plus de trois semaines dans les bois de Mézilles. Il gagna ensuite Paris. Repéré rue de la Harpe (XIe arr., maintenant Ve) par la police, il parvint à échapper à l’arrestation, non sans être une nouvelle fois blessé. Bénéficiant de la complicité d’un mécanicien et d’un chauffeur de locomotive, il put gagner Bruxelles (Belgique) caché dans un tender. À peine arrivé, il fut jeté en prison, puis conduit à Ostende et mis dans à bateau à destination de l’Angleterre. Il avait entre temps été condamné par contumace à la déportation Algérie plus par la commission mixte de l’Yonne.

Installé à Londres, ne parlant pas un mot d’anglais, il gagna d’abord sa vie misérablement en enfilant des perles pour un salaire de 12 sous par jour. Puis il fit la connaissance d’une jeune brodeuse originaire de Calais (Pas-de-Calais) nommée Louise Becka, dont il s’éprit et qu’il épousa. Il trouva bientôt un emploi plus stable dans sa branche d’activité et connut une existence meilleure après qu’il fut parvenu à s’établir.

Dans le même temps, il avait pris contact avec les exilés politiques. Il retrouva Caussidière, aux côtés duquel il avait combattu au Palais Royal et adhéra à la Commune révolutionnaire que ce dernier avait fondée avec Félix Pyat et Boichot en 1852. Un des premiers actes militants de Besson fut d’organiser depuis Londres la diffusion dans l’Yonne de la Lettre au peuple (signée Pyat, Caussidière, Boichot). Il aurait aussi été selon ses dires membre d’un comité secret chargé de démasquer les agents secrets envoyés par l’Empire pour circonvenir les exilés les plus connus et aurait à ce titre participé à l’exécution de celui qui avait été envoyé pour sonder les intentions du poète Victor Hugo. Il aurait enfin participé à la préparation d’un attentat contre Napoléon III lorsque celui-ci vint effectuer une visite officielle en Angleterre.

Il gravit rapidement les échelons de la Commune révolutionnaire. Secrétaire, puis l’un des commissaires et enfin vice-président en 1857, il signa plusieurs brochures collectives et fut l’auteur d’un opuscule intitulé Aux prolétariens (Londres, impr. universelle, 1857, 12 p.). Il fut également l’un des orateurs désignés pour prendre la parole à l’occasion du meeting organisé le 24 février 1861 pour célébrer la Révolution de 1848. Ami et confident d’Alphonse Bianchi, ce dernier lui confia la garde de ses papiers pour les soustraire à la curiosité de la police.

Peu après sa fondation il adhéra à l’AIT et fut membre de la Branche française de l’Internationale à Londres. Il cosigna à ce titre un appel intitulé « Aux étudiants de Paris, aux étudiants et aux jeunes hommes de tous les pays, les ouvriers de tous les pays » paru début juin 1866.

Sur proposition de Paul Lafargue et d’Eugène Dupont, il fut alors nommé membre du Conseil général de l’Internationale (12 juin 1866). Le 6 novembre, il fut désigné comme secrétaire-correspondant pour la Belgique. Mais il semble bien avoir rapidement pris quelque distance avec la direction de l’AIT. Lors de la réunion du 2 juillet 1867, Fox se plaignit que Besson s’était mal conduit à l’occasion d’un meeting organisé par l’Arbeiterbildungsverein pour commémorer l’anniversaire des journées de juin. Besson s’expliqua devant les membres du Conseil général, plaidant le malentendu. Le plus souvent absent aux réunions, il fut néanmoins reconduit comme membre du Conseil Général par les délégués présents au congrès de Lausanne (septembre 1867).

Besson conserva ses responsabilités au sein de la direction de l’AIT jusqu’en juillet 1868. À cette date, le Conseil général publia un communiqué dénonçant certains propos irresponsables de Félix Pyat, par ailleurs présenté comme l’un des chefs de l’Internationale. Une scission s’ensuivit au sein de la Branche française de Londres, et A. Besson fut alors élu président du dernier carré d’irréductibles. Leur ultime manifestation paraît avoir été l’organisation d’un meeting public en février 1869 pour demander à l’ambassadeur des États-Unis nouvellement nommé à Londres rien moins que l’appui militaire de son pays pour renverser Napoléon III.

Mais les choses se mirent bientôt à bouger en France. Le 4 septembre 1870, A. Besson fut prévenu de la proclamation de la République par un émissaire dépêché à Londres par Blanqui et Delescluze ; le jour même il rentra à Paris. Il s’engagea dans la Garde nationale, dans le 173e bataillon de Belleville que commandait Flourens. Il prit part aux différentes actions militaires durant le Siège de Paris ainsi qu’aux « journées » révolutionnaires du 31 octobre et du 22 janvier. Le 18 mars 1871, il participa également à la contre-offensive victorieuse des gardes nationaux parisiens et il arriva parmi les premiers devant l’Hôtel de Ville que les troupes de l’ordre venaient d’abandonner sans combattre.

Quelques jours plus tard, à l’invitation de son neveu, il partit rendre visite à son frère qui habitait au Tremblay (?) et se trouva ensuite dans l’impossibilité de regagner Paris.

Une fois la Commune vaincue, se sentant menacé, A. Besson reprit le chemin de l’exil. Réinstallé à Londres 43, Bread Street, Golden square, il était physiquement usé et malade, et souffrait de crises d’asthme. Il n’eut cette fois aucune activité politique connue.

En 1881, il revint s’installer avec sa femme à Mézilles (Yonne) et vécut de sa pension de victime du coup d’État et des produits de son jardin. Lecteur d’un journal radical modéré, il considérait que la révolution avait abouti puisque la République était acquise, et il était devenu plutôt conservateur. Il gardait toutefois intacte sa haine du clergé et il demanda, ainsi que son épouse, à être enterré civilement.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article182621, notice BESSON Alexandre, Antoine par Michel Cordillot, version mise en ligne le 19 juillet 2016, dernière modification le 15 novembre 2018.

Par Michel Cordillot

SOURCES : Archives Bakounine, publiées pour IISG, Amsterdam par A. Lehning, A. J. C. Rüter, P. Scheibert, vol. II, Michel Bakounine et les conflits dans l’Internationale, p. 428, n. 214, Leiden, E. J. Brill, 1965. — Le Conseil général de la 1re Internationale. Minutes. Édition soviétique en langue russe, 1er vol., 1864-1866, Moscou, 1961, 2e vol., 1866-1868, Moscou, 1963 ; 3e vol., 1868-1870, Moscou, 1964, 4e vol., 1870-1871, Moscou, 1965. — Arthur Lehning, De Buonarroti à Bakounine, Paris, Champ libre, 1977. — Jean Seguin, « Un ouvrier républicain au XIXe siècle »,Annales de Bourgogne, janvier-mars 1963. — Claude Lévy, « Les Proscrits icaunais du deux décembre », communication présentée aux Entretiens d’Auxerre, 1992.

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