THOMAZO André, Jean, Jérôme, Tropez [parfois écrit Tomaso ou autres variantes]

Par Marc Giovaninetti

Né le 17 mai 1929 à Saint-Tropez (Var) ; ouvrier menuisier, puis directeur de tournées artistiques ; militant communiste du Var et de la Seine ; membre du secrétariat national de l’UJRF puis de l’UJCF ; membre du comité fédéral de Seine-Ouest ; directeur adjoint de l’ALAP.

André Thomazo était le fils unique d’un couple de militants communistes particulièrement actifs dans le Var, et notamment dans la section de Saint-Tropez, la ville où ils habitaient. Son père Lucien Thomazo, mécanicien-ajusteur puis employé à la Compagnie des Eaux, était responsable syndical et dirigeait localement le PCF ; mobilisé, puis arrêté pendant la guerre, il fut déporté en Algérie où il vécut séparé de sa famille. La mère, Noëlle Thomazo, née Pellegrin, fut également résistante ; arrêtée puis libérée surveillée, elle vécut la Libération en Haute-Vienne où la direction du PCF l’avait envoyée organiser l’Union des Femmes françaises. C’est là, à Limoges, qu’André Thomazo adhéra aux Jeunesses communistes encore clandestines en février 1944.
La famille regagna le Var à la fin de l’année 1944. Du fait de leurs responsabilités militantes, les Thomazo ne tardèrent pas à s’installer à Toulon, où siégeait la fédération du Var du PCF. André devint secrétaire fédéral de l’UJRF, qui remplaça les JC et engloba d’autres organisations issues de la Résistance au cours de l’année 1945. Il avait appris le métier de menuisier. Noëlle, membre du secrétariat fédéral, exerça d’importantes responsabilités dans le secteur féminin du PCF ; elle fut plusieurs fois candidates de son parti à des élections législatives ou générales, sans succès, mais fut élue conseillère municipale de Toulon. Lucien, après son retour d’Algérie, continua d’exercer des responsabilités syndicales et fédérales dans le Var, fut plusieurs fois candidat, battu, à des élections générales, mais élu conseiller municipal de Saint-Tropez sur la liste d’opposition. Les parents Thomazo divorcèrent en 1956, tandis qu’André avait épousé, en mai 1952, Lucie (Lucette) Albertini, elle aussi toulonnaise et militante communiste.
En 1952, le jeune secrétaire fédéral varois de l’UJRF fut appelé à Paris pour renforcer la direction nationale de son organisation décimée par les arrestations de ses principaux dirigeants, dans le contexte particulièrement tendu des affrontements de la guerre froide. Ainsi fut-il promu au bureau national de l’organisation de jeunesse en mai 1953 lors de son 4e congrès à Montreuil. Il avait déjà intégré le conseil national depuis le précédent congrès, en décembre 1950 à Gennevilliers. En cette même année 1953, il fut mandaté comme seul délégué des jeunes français au congrès des JC en Chine.
En avril 1955, au 5e congrès à Montrouge, quand Paul Laurent succéda à Guy Ducoloné à la tête de l’UJRF, André Thomazo fut maintenu au secrétariat national. L’année suivante, en décembre, les jeunes communistes reprenaient leur dénomination initiale au congrès constitutif de l’UJCF ; toujours derrière Paul Laurent, André Thomazo restait secrétaire national. Il devait conserver cette fonction jusqu’en 1962, alors âgé de trente-trois ans.
Il s’était installé à Gennevilliers, avec son épouse, et avait pour voisins des militants communistes de l’importance de Lucien Lanternier, Laurent Salini ou Jean Faucher. Lui-même était membre du comité de la fédération de Seine-Ouest, alors dirigée par le premier nommé. Toutefois, lors de la conférence fédérale de 1959, et bien qu’il fût loué pour « les gros services rendus », il était décidé de le décharger de cette responsabilité au vu de l’importance de celles qui l’accaparaient à la direction des JC.
À l’occasion du Festival mondial de la Jeunesse prévu à Moscou pour l’été 1957, André Thomazo animait le comité de préparation où il était spécialement chargé de la délégation culturelle. Il était déjà un habitué, organisant depuis des années des projections de films soviétiques et des manifestations où commencèrent à se distinguer des artistes tels que Roland Petit ou Chris Marker. À Moscou, il noua des contacts avec des artistes soviétiques. Or il connaissait déjà Georges Soria, membre du PCF, depuis de nombreuses années. Le fondateur, en 1953, avec Louis Aragon, Jean Lurçat et quelques autres, de l’ALAP (Agence littéraire et artistique parisienne pour les échanges culturels), fit appel à lui en 1962 pour renforcer son équipe de direction. Il en devint le directeur adjoint, travaillant en étroite collaboration avec le producteur Fernand Lumbroso et avec Janine Ringuet, celle grâce à qui fut révélé Rudolf Noureev, qui était spécialement chargée des contacts avec les troupes d’artistes et les autorités soviétiques. Pendant des années, il se rendit régulièrement en URSS et dans les autres pays du bloc de l’Est, et accueillit les plus grandes productions culturelles de ces pays, telles que les ballets Moïsseiev, du Théâtre Kirov ou du Bolchoï, les Chœurs de l’Armée rouge ou le Cirque de Moscou, dont il supervisait les tournées en France.
Au cours des années 1970 et 1980, l’activité de l’ALAP commença à se réduire, du fait de la déconsidération qui frappait le régime soviétique. Des tournées furent annulées. André Thomazo prit lui-même, comme nombre de personnalités du monde artistique et culturel, ses distances avec le PCF à l’époque de Georges Marchais*, qu’il supportait mal. Après l’invasion soviétique en Afghanistan, il rompit définitivement ses attaches organisationnelles en 1981.
L’ALAP fut dissoute et se rebaptisa sous la direction d’André Thomazo en Hémisphères-productions en 1993, mais ne retrouva jamais son importance passée. La société fut définitivement liquidée en 2011 après avoir cessé ses activités en 2002.
Pendant que son mari travaillait à l’ALAP, Lucette Thomazo occupa les fonctions de directrice administrative du journal l’Humanité, puis de co-directrice des Éditions sociales. Le couple n’eut pas d’enfants. Une fois à la retraite, André et Lucette Thomazo partagèrent leur temps entre les deux lieux où ils gardaient un domicile : leur appartement dans le XVIe arrondissement parisien, et leurs attaches dans le Var, une maison à Ramatuelle qu’ils vendirent dans les années 2000, puis une autre à Ollioules. En 1982, ils avaient défrayé une petite chronique journalistique, suite à la réappropriation par l’État, avec la destruction médiatisée d’une partie de la clôture, de leur propriété dont une portion empiétait largement, comme celles de leurs voisins parfois illustres, sur la fameuse plage de Pampelonne. Les Thomazo dirigèrent aussi pendant quelques années une société civile immobilière dans le Var.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article182653, notice THOMAZO André, Jean, Jérôme, Tropez [parfois écrit Tomaso ou autres variantes] par Marc Giovaninetti, version mise en ligne le 19 juillet 2016, dernière modification le 8 août 2016.

Par Marc Giovaninetti

SOURCES : L’Avant-Garde, 1951-1962, en particulier n° 323 du 3 janvier 1951, n° 443 et 444 du 27 mai et du 3 juin 1953, n° 465 de novembre 1953, n° 2 (nouvelle série) du 24 avril 1955. ― Le Nouvel Observateur, 7 août 1982, et The Washington Post, 10 août 1982. ― DBMOMS, notices de Lucien Thomazo et Noëlle Thomazo. ― Paul Boulland, Acteurs et pratiques de l’encadrement communiste à travers les exemples des fédérations PCF de banlieue parisienne (1944-1974), thèse de doctorat d’histoire, Université Paris 1, 2011. ― Marie-Pierre Rey, La Tentation du rapprochement : France et URSS à l’heure de la détente (1964-1974), Publications de la Sorbonne, 1991. ― Thomas Gomart, Double détente. Les relations franco-soviétiques de 1958 à 1964, Publications de la Sorbonne, 2003. ― Indications de Jacques Girault (Var), de Daniel Grason (Gennevilliers). ― Entretien téléphonique avec l’intéressé, mars 2011. — État civil.

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