ZOBDA QUITMAN Pierre

Par Rolande Bosphore-Pérou

Né le 14 mai 1923 à Ducos (Martinique), mort le 27 mars 1987 à Paris ; employé puis cadre hospitalier ; militant communiste, membre du comité central du Parti communiste de Martinique ; conseiller municipal (1959-1987) et maire adjoint (1971-1987) du Lamentin (Martinique), conseiller général (1958-1970 et 1985-1987).

Son père, Emmanuel Quitman était géreur de l’habitation (plantation de cannes à sucre) Carrère située aux limites communales de Ducos et du Lamentin. Sa mère, Anastasie Surelly, épouse Zobda, était femme au foyer. Pierre Zobda Quitman ne connut pas sa mère qui, après sa naissance, partit pour la Guyane Française et mourut dans la région de l’Aprouagua. Jusqu’à l’âge de cinq ans, Pierre Zobda Quitman vécut chez sa tante, avec ses deux sœurs, puis il fut recueilli par sa belle-mère et son père et passa toute son enfance et son adolescence entre l’habitation Carrère et le bourg du Lamentin, quartier Bas-Mission, chez un de ses oncles, frère de son père. Il fréquenta l’école élémentaire du bourg du Lamentin et acheva ses études secondaires au Lycée Schœlcher de Fort-de-France (Martinique) mais n’obtint pas le baccalauréat parce qu’absent au cours d’une épreuve obligatoire. Ce fut pour lui une véritable blessure.

Pierre Zobda Quitman commença à travailler dès la fin de ses études secondaires. Il fut d’abord transporteur de cannes à sucre des habitations vers les usines, puis entra à l’hôpital du Lamentin en tant qu’expéditionnaire et effectua une grande et longue carrière dans le secteur hospitalier. À l’hôpital du Lamentin où il travailla pendant dix-neuf ans, il partit du bas de l’échelle et gravit les échelons, devenant l’économe de cette structure. En 1964, à sa demande, il fut nommé directeur-économe de l’hôpital du Saint-Esprit (Martinique) et le ministère lui confia également la gestion direction de l’hôpital du Marin (Martinique). En 1967, il devint l’économe du centre hospitalier de Fort-de-France et son directeur par intérim de 1967 à 1971. Il n’était à ce moment qu’attaché de direction, directeur adjoint de seconde classe. Un nouveau directeur fut nommé de 1971 à 1976 et, à son départ, Pierre Zobda Quitman fut nommé, en 1976, directeur général du centre hospitalier de Fort-de-France dont il entreprit la modernisation. Il fut l’instigateur de la création d’un nouvel hôpital sur le site du quartier La Meynard.

Jeune homme, Pierre Zobda Quitman participa, à la fin de la guerre, à la création de « Franc Jeu » association de la jeunesse lamentinoise, groupe de jeunes engagés, militant pour la paix, pour un monde nouveau basée sur la fraternité, la solidarité et fortement inspiré culturellement par Édouard Glissant, qui était un des créateurs du groupe. En 1945, Pierre Zobda Quitman s’engagea aux côtés de son père pour soutenir la candidature de Fernand Guilon, candidat communiste aux élections municipales du Lamentin. Son père, conseiller municipal communiste, par sa rigueur, ses convictions, ses dénonciations des errements de la société coloniale de la première moitié du XXe siècle, le marqua profondément et l’incita à se jeter dans la voie de la recherche de la justice sociale aux côtés des communistes. En 1947, Pierre Zobda Quitman participa à la bataille électorale pour la réélection de Fernand Guilon à la tête de la commune du Lamentin. Il ne faisait pas partie des candidats mais était présent aux conférences, discussions, présentations de projets et ne ménageait pas son soutien aux travailleurs.

Conseiller municipal du Lamentin en juillet 1959, réélu en 1965, puis à partir des élections municipales partielles de 1971 premier adjoint au maire jusqu’à sa mort. Pierre Zobda Quitman fut responsable de la commission financière, de l’urbanisme, de la commission paritaire du personnel municipal et de la gestion du personnel municipal. En mars 1961, il fut impliqué dans les tragiques événements du bourg du Lamentin qui se soldèrent par la mort de deux jeunes ouvriers agricoles et d’une jeune passante. En novembre 1979, ses fonctions de premier adjoint l’amenèrent à impulser « les journées ville morte du Lamentin » pour protéger les commerçants du centre bourg face à la création d’hypermarchés en périphérie. Il ne cessa de mobiliser la population en faveur des principaux objectifs de la municipalité : trouver une équipe pour reprendre la gestion de l’usine du Lareinty et ainsi empêcher sa fermeture, créer une Société d’intérêt collectif agricole (SICA) des petits et moyens planteurs de canne à sucre pour fournir en cannes cette usine.

Conseiller général communiste du canton du Lamentin de 1958 à 1970, Pierre Zobda Quitman fut notamment élu au premier tour avec 68 % des suffrages exprimés lors des élections cantonales du 8 mars 1964. En 1985, lors de la division du canton du Lamentin en trois cantons, il signa son retour à l’assemblée départementale, comme conseiller général du 2e canton Acajou, élu à nouveau dès le premier tour.

Communiste convaincu, Pierre Zobda Quitman participa à la transformation de la fédération communiste de Martinique en parti autonome et, en 1957, il assista au congrès constitutif du Parti communiste de Martinique (PCM). En janvier 1963, lors du renouvellement du comité central provoqué par la mort de Camille Sylvestre, Pierre Zobda Quitman devint membre titulaire du comité central du PCM. C’est à ce titre qu’il intervint en 1964 au conseil général contre une motion sur l’assimilation déposée par M. Forestal, conseiller gaulliste. En 1968, au IVe congrès du PCM, qui marqua l’affirmation de la revendication d’autonomie, Pierre Zobda Quitman fut à nouveau désigné membre du comité central. À la demande du comité central du PCM, il mena en 1971 une liste communiste aux élections municipales dans la ville de Ducos. Battu au premier tour, il soutint au deuxième tour le candidat socialiste contre le représentant de la droite. En 1986, dans le cadre des accords de l’union de la gauche, il fut désigné par le PCM pour être le candidat communiste aux élections sénatoriales mais les alliés de gauche lui refusent leurs voix.

Pierre Zobda Quitman s’était également investit dans le milieu associatif. Il créa et dirigea le Comité des œuvres sociales hospitalières de 1966 à 1987 et fut président de la Mutuelle des agents des collectivités locales. Dans sa commune du Lamentin il fut membre dirigeant de l’association sportive et culturelle l’Aiglon du Lamentin.
Le 8 décembre 1984 Pierre Zobda Quitman fut décoré de la Légion d’honneur dans les salons de l’hôtel « Le Bakoua ».

En hommage à ce personnage qui a marqué la vie lamentinoise, une école du centre-ville porte son nom ainsi qu’une rue du bourg du Lamentin. En 1989 les autorités et le conseil d’administration décidèrent de donner au centre hospitalier de Fort-de-France le nom de Pierre Zobda Quitman et une plaque y fut apposée. Cet hôpital est la plus importante structure qui compose actuellement le CHU de la Martinique. En 2006, la ville du Lamentin fit l’acquisition de la maison où il avait vécu avec sa famille et l’intégra au patrimoine immobilier de la ville. Elle accueille depuis novembre 2014 l’Office de la culture (OCL) et l’Office du tourisme du Lamentin (OTL).
Pierre Zobda Quitman était marié et père de deux filles.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article182974, notice ZOBDA QUITMAN Pierre par Rolande Bosphore-Pérou, version mise en ligne le 2 août 2016, dernière modification le 2 août 2016.

Par Rolande Bosphore-Pérou

SOURCES : Justice (conférences fédérales de 1945 à 1957, congrès du PCM de 1957 à 1968, élections municipales, cantonales, législatives et sénatoriales de 1953 à 1986). — Sidonie, Sonia, Ariane Zobda Quitman, À Pierre Zobda Quitman 1923-1987, Fort-de-France, Editions Désormeaux, 1992. — Rolande Bosphore Militants et militantismes communistes à la Martinique. 1920 / 1971, Matoury, Guyane Française, Ibis Rouges Editions, 2015.

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