QIN Bangxian 秦邦憲 (dit BO Gu 博古)

Par Yves Chevrier

Né en 1907 à Wuxi, dans le Jiangsu ; mort en 1946 dans un accident d’avion. L’un des dirigeants des Vingt-huit Bolcheviks ; secrétaire général du P.C.C. de 1931 à janvier 1935 (conférence de Zunyi).

Issu d’une famille mandarinale de la région du bas Yangzi, Qin Bangxian a fait de bonnes études qu’il achève dans une école technique de Suzhou entre 1921 et 1924. Après avoir adhéré au G.M.D. et à la L.J.C. (suivant l’esprit du premier Front uni, voir Maring), il enseigne au département d’anglais de Shangda (voir Qu Qiubai (瞿秋白)). Militant parmi les ouvriers de Shanghai et dans les rangs du G.M.D., il adhère au P.C.C. avant de partir pour Moscou, où il étudie à l’Université Sun Yat-sen (voir Mif) de 1926 à 1930. Pendant qu’en Chine se déroule la « tragédie de la révolution chinoise » (H. Isaacs), il apprend le russe et s’initie à la théorie marxiste. Sans oublier la pratique stalinienne : sa docilité (et sa vigilance à l’encontre de ses condisciples moins souples) font bientôt de lui l’un des préférés de Pavel Mif, qui a repris l’Université en main après 1927. Aux côtés de Wang Ming (王明) (pseudonyme de Chen Shaoyu) et de Luo Fu (pseudonyme de Zhang Wentian (張聞天)), Bo Gu (c’est le pseudonyme que se donne alors Qin) devient l’un des dirigeants du groupe des « retours de Moscou » (dit des « Vingt-huit Bolcheviks »).
Cette faction des fidèles est renvoyée en Chine au compte-gouttes en 1930 afin de mettre bon ordre à la ligne Li Lisan (李立三). Qin Bangxian arrive à Shanghai au printemps ; il milite de nouveau dans l’appareil syndical clandestin, sous Luo Zhanglong (羅章龍), c’est-à-dire, en pratique, ! contre Li Lisan, puisque aussi bien Luo est avec He Mengxiong (何夢雄) l’un des adversaires les plus résolus de Li Lisan. Mais seule l’arrivée de Mif (et le rappel de Li Lisan à Moscou) à la fin de l’année 1930 résolvent la crise. A l’issue des débats truqués et tronqués du 4e plénum (janvier 1931 : voir Mif), la direction du P.C.C., ravie aux adversaires locaux de la ligne Li Lisan, est donnée aux chefs des « Vingt-huit Bolcheviks ». Qin Bangxian, qui n’a que 24 ans, devient membre du B.P. Le départ pour Moscou de Wang Ming, qui avait pris le secrétariat général du P.C.C. après l’exécution de Xiang Zhongfa (向忠發), puis le repli de Zhou Enlai (周恩來) dans les soviets du Jiangxi, font bientôt de Qin Bangxian, devenu secrétaire général à la fin de l’année 1931, le responsable suprême du « Centre » à Shanghai. Bien qu’il y demeure jusqu’en janvier 1933 (date de la translation officielle du C.C. à Ruijin, capitale des soviets du Jiangxi), il participe de loin aux affrontements qui opposent Mao Tse-tung (毛澤東) aux hommes du C.C. en dénonçant la politique agraire trop modérée et la stratégie militaire trop « rustique » de Mao. A Shanghai même, où ses activités clandestines sont mal connues, Qin aurait organisé, des grèves dans les cotonnières japonaises.
Lorsqu’il arrive à Ruijin, Mao est en train de perdre le pouvoir à la faveur de la campagne anti-Luo Ming (羅明). Qin Bangxian entre au Conseil militaire révolutionnaire (organe suprême du commandement communiste) au moment (mai 1933) où Zhou Enlai devient officiellement commissaire politique général de l’Armée rouge et où Xiang Ying (項英) remplace Zhu De (朱德) à la présidence du Conseil. Mais bien qu’il ait par la suite été blâmé en même temps que Zhou Enlai et Xiang Ying dans les résolutions de la conférence de Zunyi (janvier 1935) qui font le bilan — maoïste — de la défaite du Jiangxi (à la suite de la 5e campagne d’encerclement nationaliste, victorieuse en octobre 1934), Qin Bangxian laisse à Zhou Enlai et à Otto Braun le soin de définir la stratégie de résistance au blocus nationaliste. Comme Xiang Ying, il s’affaire davantage à l’« intendance » et, de ce fait, prend une grande part à la radicalisation de la réforme agraire (destinée à recruter des soldats pour l’Armée rouge). Sanctionné à Zunyi par la perte du secrétariat général (qui échoit à Zhang Wentian), c’est en apparence seulement qu’il continue d’appartenir au cercle étroit des dirigeants communistes lorsque Edgar Snow et Nym Wales le rencontrent au Shenxi, à l’autre extrémité de la Longue Marche. S’il prend part aux négociations de Xi’an en décembre 1936 (voir Zhou Enlai (周恩來)), il est progressivement dépossédé de ses fonctions les plus importantes, et ce dès avant le mouvement de rectification (zhengfeng) de 1942-1944, qui vise notamment à extirper les derniers restes d’influence de l’ex-faction « internationaliste ». C’est ainsi que Liu Shaoqi (劉少奇) le remplace à la tête du Département de l’organisation du C.C. en 1937 et qu’il est confiné à des besognes plus techniques pendant toute la durée de la guerre sino-japonaise : rédaction en chef du Jiefang Ribao (Libération) à partir de 1941, direction de l’Agence Chine nouvelle. Toutefois, en 1945, Lu Dingyi (陸定一) l’a supplanté dans le domaine de la propagande.
L’élimination en douceur de Qin Bangxian reflète la lente disgrâce infligée aux Vingt-huit Bolcheviks. Elle s’achève avec le VIIe congrès du P.C.C. (printemps 1945) : tandis que l’infamie de la « troisième déviation de gauche » (l’époque de Wang Ming, de Zhang Wentian et de Qin) est inscrite dans la vulgate historique, Qin perd son siège au B.P. et n’est réélu que de justesse (44e sur 44) au C.C. Sa disparition dans un accident d’avion (8 avril 1946), en même temps que Deng Fa (鄧發), Wang Ruofei (王若飛) et Ye Ting (葉挺), laisse en suspens la trajectoire politique de Qin Bangxian : aurait-il opté pour Moscou, à l’exemple de Wang Ming ou bien, à l’instar de Zhang Wentian, se serait-il cantonné dans un rôle d’opposant larvé jusqu’à la mise à l’écart définitive ?

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article184398, notice QIN Bangxian 秦邦憲 (dit BO Gu 博古) par Yves Chevrier, version mise en ligne le 10 janvier 2017, dernière modification le 10 janvier 2017.

Par Yves Chevrier

ŒUVRE : Outre la traduction d’un certain nombre de classiques (tels le Manifeste communiste ou l’Histoire du Parti communiste (b) de l’Union soviétique), Qin Bangxian a laissé de nombreux articles polémiques, dirigés contre les trotskystes et surtout contre Mao Tse-tung. On en trouvera un recueil in Hsiao Tso-liang (1961).

SOURCES : Outre KC, voir Hsiao Tso-liang (1961) et Hu Chi-hsi (1982), ainsi que les témoignages de Qin Bangxian donnés à Snow (1938) et à Nym Wales (1952).

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