THOMAS Émile, André [pseudonyme dans la Résistance : MISTRAL Jean]

Par Jean-Marie Guillon

Né le 3 novembre 1921 à Cannes (Alpes-Maritimes), exécuté sommaire le 20 août 1944 à Saint-Genis-Laval (Rhône) ; étudiant ; militant de Franc-Tireur et des Mouvements unis de la Résistance (MUR).

Émile Thomas a été marqué par sa culture familiale avec un grand-père dreyfusard, un père, avocat, franc-maçon et membre de la Ligue des Droits de l’Homme et une mère, Paulette née Goudard, professeur de lettres, à laquelle il était très attaché. Celle-ci, originaire Marseille, enseignait depuis 1921 à l’École primaire supérieure et à l’École normale de Draguignan (Var). Son père, Léon, originaire de Pontarlier (Doubs), avait exercé plusieurs métiers (imprimeur, journaliste) avant de se consacrer au barreau. Inscrit à celui de Draguignan, il fut élu bâtonnier en 1932-1934. Il avait notamment participé à la réhabilitation d’un soldat exécuté pour l’exemple pendant la guerre.
Émile Thomas était enfant unique. De santé fragile, il avait passé un an à Megève (Haute-Savoie) en 1932 pour soigner ses bronches et sa mère lui servit de préceptrice un moment. Il n’en fut pas moins inscrit chez les Éclaireurs de Draguignan. Il était étudiant à Grenoble en 1940-1941 lorsque son père mourut le 3 mai 1941. La famille était patriote et écoutait régulièrement la BBC. À la rentrée suivante, il s’inscrivit à la Faculté de Lettres de Lyon. Il résida d’abord en pension chez une amie de ses parents et sa mère qui était retraitée vint le rejoindre quelques mois de janvier à mars 1942. Il logea l’année suivante à la Maison des étudiants, rue Jeanne Koelher. C’est à la Faculté qu’il prit contact avec la Résistance et commença à diffuser tracts et journaux du mouvement Franc Tireur. En 1942, il assura des liaisons hebdomadaires entre Lyon et Saint-Étienne, portant journaux et courrier. Convoqué aux Chantiers de jeunesse l’été suivant, il hésita à s’y rendre et prit conseil auprès de résistants de Draguignan – dont Georges Cisson*, chef départemental de Libération -, qui l’incitèrent à obéir. Affecté à Cavaillon où il arriva le 6 août, il participa aux divers travaux que l’on faisait faire aux recrues (nettoyage des berges de la Durance, manutention dans une conserverie de tomates, puis une coopérative, etc.). Il déserta le 30 octobre 1943 car son ami Jean Carbone, originaire de Sanary (Var), qui mourra en déportation, l’appela à Lyon. Il milita avec René Meilland (Jean Darène) dans l’Armée secrète avec le pseudonyme de Jean Mistral et la fausse identité de Marcel Gaillard, ouvrier électricien. Intégré au service chargé de l’intendance des maquis, il participait au ravitaillement de ceux de la région et échappa de peu à l’arrestation quand la police allemande démantela le service. Après ce coup dur, il devait passer à Résistance Fer en décembre mais de nouvelles arrestations le coupèrent de l’organisation clandestine. Il put renouer un mois après et entra en février 1944 dans le service de Farbmann Platane comme agent de liaison, puis rejoignit Yves de Boton Forgues qui le prit avec lui dans le service de renseignements régional des MUR dont il était chef adjoint et responsable de la branche politique. Il s’apprêtait à monter au maquis quand il fut arrêté le 2 août 1944 au soir à un rendez-vous, avenue Albert Thomas. Son chef avait été arrêté la veille et, au total, vingt-huit membres du service qui avait été infiltré par une agent de la police allemande, Claire Hettinger Dany, tombèrent. Incarcéré à Montluc, cellule 71, il fut fusillé à Saint-Genis-Laval avec cent dix huit autres résistants dont plusieurs membres du service de renseignements (Yves de Boton, Paul Charcouchet, Robert Randu, Lucien Bard). Le dernier mot, rapide, au crayon, qu’il avait écrit à sa mère datait du jour de son arrestation. Sa mère fut avisée de sa mort le 26 septembre suivant.
À titre posthume, il fut déclaré « mort pour la France » et décoré de la Légion d’honneur le 10 décembre 1949. Son nom fut donné au groupe de scolaire de Draguignan situé avenue du 4-Septembre, le 15 février 1960, puis au collège qui le remplaça, le 13 décembre 1972. Il fut aussi attribué à un boulevard de la ville, quartier des Colettes, le 2 mars 1979. Enfin, une plaque à sa mémoire a été dévoilée le 3 octobre 2012 dans le collège portant son nom à l’initiative du Souvenir français.


Voir : Saint-Genis-Laval, fort de Côte-Lorette (20 août 1944)

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article184640, notice THOMAS Émile, André [pseudonyme dans la Résistance : MISTRAL Jean] par Jean-Marie Guillon, version mise en ligne le 1er septembre 2016, dernière modification le 7 mai 2022.

Par Jean-Marie Guillon

SOURCES : site MemorialGenWeb.— Presse locale. ⎯ Dossier préparé par Françoise Grosjean, Société d’études scientifiques et archéologiques de Draguignan et du Var, 2017.

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