ROUVE François, Simon, Jean

Par Olivier Dedieu

Né le 1er décembre 1911 à Montagnac (Hérault), mort le 25 Juillet 1978 ; militant socialiste.

François Rouve était le fils de Simon Rouve un important charron forgeron de la commune, propriétaire viticulteur, capitaine des pompiers de la commune. Politiquement, son père fut peu engagé localement, tout en affichant des idées proches des radicaux-socialistes. À l’issue de son certificat d’études, François Rouve travailla dans un premier temps avec son père. Néanmoins, le choix de sa future épouse entraîna une brouille durable avec père, opposé à ce mariage. Il quitta la commune et partit à Toulouse où il travailla, pendant un an, dans une entreprise de carrossage. Informé par son oncle, gardien de la paix à Paris des modalités de recrutement de la police parisienne, François fut reçu en 1937 au concours des gardiens de la paix de la ville de Paris.

Dès son entrée dans le métier, François Rouve adhéra au puissant syndicat autonome des personnels de la préfecture de police de Paris (il avait été membre de la CGT lors de son passage à Toulouse). Militant syndical actif, peu politisé, il acquit rapidement des positions syndicales. Pendant la guerre, il devint délégué de la mutuelle et de l’orphelinat mutualiste. Dès 1940, il s’engage aussi nettement dans la Résistance. Cette dernière s’organisa véritablement en 1942 autour du Front national Police. Recruté par Albin Maistre, responsable du 19e arrondissement, il devint l’adjoint de ce dernier en mai 1942. Assistant de nombreux juifs (dont certains seront cachés par sa famille à Montagnac), il participa à des sabotages en 1944 et joua un rôle important lors de l’insurrection parisienne. C’est ainsi que du 19 au 25 août 1944, à la tête de 80 hommes, il prit la Cité avant d’attaquer, avec succès, la gare de Belleville.

Cette action résistante consacra sa notoriété dans le syndicat. Dès la Libération, ce dernier se développa et adhéra à la CGT. François Rouve devint délégué du 19e arrondissement et l’un des dirigeants du syndicat. Il fut alors réputé proche du PC, tant par son action résistante que par ses liens de parenté (son beau-frère fut membre de la commission exécutive du PC). En 1947, face aux conflits liés aux questions de parité entre police parisienne et nationale, le bureau du syndicat, proche du PC, fut désavoué. C’est François Rouve, candidat bénéficiant de soutiens dans les deux camps antagonistes, qui devint le nouveau secrétaire général du SGP qui quitta alors la CGT. Convainquant la CGT de ne pas créer un syndicat contre le SGP, il conforta la puissance de cette dernière qui regroupa 12 000 des 17 000 agents de la police de Paris et de sa banlieue. Syndicaliste actif, sa légitimité fut rapidement incontestée. En 1953, quand le préfet de police révoqua des gardiens de la paix communistes, il n’hésita pas, pendant quelques mois à adhérer au PC pour montrer son hostilité à ce type de mesures. De même, il obtient de Jules Moch des avantages pour ses adhérents que le SGP n’avait pu obtenir en 1947. Néanmoins, le ministre en profita pour imposer la fin du droit de grève. C’est avec le ministre François Mitterrand que les relations furent néanmoins les plus confiantes puisqu’il obtint alors le départ du préfet Bellot. Son travail syndical porta aussi sur le redéploiement de son organisation. Avec les syndicalistes belges et berlinois, il fut à l’origine de la création de l’union internationale des syndicats de police. Sur le territoire national, il prit les premiers contacts avec les syndicats de la police nationale (SNPT) et des CRS (SNIP) en vue d’une fusion qui ne sera néanmoins effective qu’en 1969, avec la création de la FASP.

Avec la guerre d’Algérie, François Rouve obtint une nouvelle stature. En Octobre 1961, le préfet de police interdit une manifestation organisée par le FLN qui tentait de prouver la force de son implantation à Paris. Les dirigeants de la SGP protestèrent dans la presse, ce qui vallut à François Rouve une mise à pied de 5 jours. En 1962, il dénonça publiquement le massacre de Charone dans l’Express et le Monde. Traduit en conseil de discipline par Maurice Papon, alors préfet de police, il fut révoqué le 5 mai 1962 (Il ne fut réintégré qu’en 1966 suite à l’arrêt du Conseil d’Etat du 25 mai 1966). Devenu une figure de la gauche opposée à l’Algérie, il bénéficia d’une notoriété importante dans les milieux de la gauche parisienne. Néanmoins, malade, il quitta alors en décembre 1962 Pantin pour s’installer à Montagnac. C’est son fils Jean, entré dans la police parisienne en 1960 qui reprit alors le flambeau syndical, intégrant le bureau fédéral de la CGP puis devenant administrateur de la FASP dès 1970.

Revenu dans sa commune natale, François Rouve s’engagea désormais politiquement dès 1965 en faveur de François Mitterrand dont Georges Sutra et Gérard Delfau, du canton voisin de Pezenas, soutiennent la candidature. Recruté par Jean Peyrottes, il adhéra à la nouvelle Convention des institutions républicaines qui disposa d’une importante section regroupant les militants de Pézenas et Montagnac. Quand les deux sections furent scindées, il devint le secrétaire de celle de Montagnac. En 1969 il fut par ailleurs membre de la commission fédérale provisoire de fusion SFIO / CIR. Néanmoins, dans ce canton, les relations avec les cadres de la SFIO restent tendues, notamment avec Charles Alliès (voir ce nom), secrétaire fédéral, président de la commission des finances du conseil général et conseiller général du canton. Cette tension aboutit à une intégration tardive des conventionnels du canton quand ailleurs la fusion fut effective dès 1970. La conflictualité prit une nouvelle ampleur en 1971 puisque, lors des élections municipales, la CIR décida de faire liste commune avec le PC contre une coalition sortante regroupant SFIO et radicaux. Vainqueurs, les communistes obtiennent le poste de maire qui échut à André Gallan, alors que le poste de premier adjoint fut dévolu par les conventionnels à François Rouve. Très intégré localement (il dirigea un temps l’équipe de foot et la société de chasse), il reconquit son mandat en 1977. Du reste, il garda de nombreux contacts nationaux, dont celui de François Mitterrand qui vint lui rendre visite à Montagnac en 1974.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article184674, notice ROUVE François, Simon, Jean par Olivier Dedieu, version mise en ligne le 1er septembre 2016, dernière modification le 19 mars 2017.

Par Olivier Dedieu

SOURCES : Archives Fondation Jean Jaurès, dossier Hérault. — Entretien avec Jean Rouve.

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