KRIEGER Frédéric

Par Jean-Sébastien Chorin

Né le 9 février 1899 à Vienne (Autriche), de nationalité autrichienne, massacré le 17 août 1944 à Bron (Rhône) ; fabricant de jouets ; victime civile.

Frédéric (aussi nommé Frederick ou Friedrich) Krieger était le fils d’Édouard Krieger et de Charlotte Spitzer. Il se maria avec Cécile Moscowitz. Leur fille, Edith Krieger, naquit à Vienne (Autriche) le 25 décembre 1926. Frédéric Krieger était industriel. Il fabriquait des jouets. Les Krieger émigrèrent en France vers 1934 semble-t-il.
En 1939, Frédéric Krieger se serait engagé volontaire dans l’armée française. Pendant la période de la guerre, les Krieger habitaient à Mâcon (Saône-et-Loire), 1 rue du Vieux Palais. Ils furent notamment recensés le 20 avril 1943 comme ressortissants étrangers demeurant à Mâcon. Vers 1944, Frédéric Krieger fit des démarches pour se faire naturaliser Français.
Le 13 août 1944, Frédéric Krieger fut victime d’une rafle de Juifs organisée à Mâcon par la Gestapo et la Milice en représailles des pertes subies par les troupes allemandes dans la région de Cluny (Saône-et-Loire). Un témoin déclara après-guerre : « les Allemands procédaient au contrôle de l’identité des habitants du quartier de la rue du Vieux Palais, à Mâcon. Les habitants étaient parqués sur la Place d’Armes. J’y étais et Monsieur Krieger également. Quand les Allemands m’ont laissé libre je me suis rendu auprès de Madame Krieger, rue du Vieux Palais. Là, j’ai appris que Monsieur Krieger portait sur lui des papiers compromettants. Les suspects, dont Monsieur Krieger faisait partie, étaient parqués ensuite rue Agut. J’ai convenu avec Madame Krieger, d’aller porter des vêtements à son mari et d’essayer de lui soutirer les pièces compromettantes. Il a refusé catégoriquement. Il m’a dit qu’il n’avait rien sur lui ». Le 14 août, Frédéric Krieger fut interné à la prison de Montluc (Lyon, Rhône), dans la « baraque aux Juifs ». Sa femme et sa fille furent arrêtées le 14 août 1944, incarcérées à Montluc et libérées le 24 août.
Le 14 août 1944, eurent lieu des bombardements sur la base aérienne de Bron (Rhône). Devant l’ampleur des dégâts, les Allemands décidèrent de faire travailler sur le camp d’aviation des détenus juifs de la prison de Montluc.
Le 17 août, à 9 heures du matin, 50 prisonniers furent extraits « sans bagage » de la « baraque aux Juifs ». Le gardien Wittmayer fit l’appel et, à la dernière minute, les Allemands remplacèrent deux catholiques par des Juifs. Ils furent embarqués sur trois camions gardés par des soldats allemands armés de mitraillettes, puis amenés sur le champ d’aviation de Bron. A Bron, les prisonniers furent répartis par groupes de trois et contraints de rechercher, d’extraire et de désamorcer des bombes non éclatées. Vers midi, ils furent dirigés près d’un hangar pour déjeuner. L’un des détenus, Jacques Silbermann, profita de cette occasion pour s’évader. Après des menaces de représailles et de vaines recherches, les soldats allemands conduisirent les 49 détenus sur le chantier pour reprendre le travail. A 18h30, alors que les prisonniers remontaient sur un camion pour regagner Montluc, un major allemand donna l’ordre de les amener sur un autre chantier. Les 49 détenus furent conduits près de trois trous d’obus au dessus desquels ils furent exécutés par balles. Leurs corps furent ensuite recouverts de terre et de gravats.
Le lendemain, 18 août, 23 détenus juifs de Montluc, dont au moins 20 de la « baraque aux Juifs », furent également conduits sur le terrain d’aviation de Bron. Ils subirent le même sort que les prisonniers de la veille. Ils furent exécutés au-dessus d’un trou d’obus après avoir recherché, extrait et désamorcé des bombes non éclatées toute la journée.
Le 19 août, le chef de la « baraque aux Juifs », Wladimir Korvin-Piotrowsky, dû remettre « en tas » les bagages des 70 prisonniers aux autorités allemandes.
En septembre 1944, cinq charniers furent découverts sur le terrain d’aviation de Bron. Le corps de Frédéric Krieger fut retrouvé dans le charnier E, situé entre les charniers C et D et contenant 26 cadavres. D’après le rapport du médecin légiste, il avait été tué d’une balle dans la tête. Sa dépouille présentait par ailleurs une « plaie transfixiante de l’avant-bras gauche [...] avec fracture des deux os ». Grâce au témoignage du seul rescapé de l’exécution du 17 août, Jacques Silbermann, nous pouvons déduire que Frédéric Krieger faisait vraisemblablement partie du groupe des 49 exécutés du 17 août 1944.
Son corps fut décrit comme suit : 1m70, cheveux grisonnants. Il fut d’abord enregistré sous le numéro 87 puis identifié le 9 octobre 1944. Il fut inhumé au cimetière de Lyon - La Mouche (VIIe arr.). Il obtint le statut d’interné politique en 1967.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article185755, notice KRIEGER Frédéric par Jean-Sébastien Chorin, version mise en ligne le 2 octobre 2016, dernière modification le 12 mars 2020.

Par Jean-Sébastien Chorin

SOURCES : DAVCC, Caen, dossiers de Frédéric Krieger et de Maïer Kaczka.— Arch. Dép. Rhône, 182W132, 3335W22, 3335W11, 3335W27, 3335W15, 3460W1, 3808W866, 31J66.— Bulletin de l’Association des Rescapés de Montluc, N°18, mai 1946.— Bulletin de l’Association des Rescapés de Montluc, N°23, octobre 1946.— Pierre Mazel, Mémorial de l’oppression, fasc. 1, Région Rhône-Alpes, 1945.— Site Internet de Yad Vashem

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