CAPKIEWICZ Jonathan [changé en CAPIÉVIC Jean]

Par Lynda Khayat

Né le 13 août 1923 à Wolomin (Pologne), mort le 30 décembre 2002 à Lyon (Rhône) ; ajusteur-outilleur, journaliste ; résistant ; militant communiste, administrateur de journaux communistes régionaux, membre du comité central du PCF ; maire de Vaulx-en-Velin (Rhône) de 1977 à 1985 ; conseiller général du canton de Bron (1973-1982), puis du canton de Vaulx-en-Velin (1982-1985).

Fils d’immigrés juifs polonais arrivés en France en octobre 1923, alors qu’il n’avait que deux mois, dont le père, Majer, était tricoteur et la mère, Estherz, surjeteuse, tous deux militants communistes, Jonathan Capkiewicz vécut jusqu’en 1929, rue de Loos à Paris (Xe arr.), avant que ses parents ne s’installent définitivement au 19 de la rue Godefroy-Cavaignac dans le quartier de la Petite-Roquette. Il suivit tout jeune l’engagement politique de ses parents et fut inscrit aux Pionniers, puis adhéra en 1937 aux Jeunesses communistes de son quartier. Titulaire du certificat d’études primaires, il entra comme apprenti dans un atelier en novembre 1938, et apprit le métier d’ajusteur-outilleur. Au moment de la signature des accords de Munich, lisant les articles de l’Humanité, participant aux discussions des JC et subissant l’influence de son père, il suivit la position du Parti communiste. Lors de la signature du pacte germano-soviétique, il conserva sa confiance en l’URSS et dans le Parti communiste français.

Au moment de l’interdiction des organisations communistes en septembre 1939, il perdit le contact avec ses camarades, mobilisés pour certains d’entre eux. Il renoua la liaison avec le parti clandestin, les JC illégales du XIe arrondissement, par l’intermédiaire de la famille Boisseau qui habitait le même immeuble que lui et dont le père militait. D’octobre 1939 à juin 1940, connu sous le pseudonyme de Jean, il eut en charge un groupe des JC de son quartier, collant des affiches et distribuant des tracts, puis devint responsable technique du XIe arrondissement, militant avec Jacques Pescio et Henri Guerchon, tout en aidant son père dans son travail de tricoteur à domicile. Il fut ensuite responsable à l’organisation de l’arrondissement de juin 1940 à juin 1941, aux côtés de Georges Tondelier* et d’Odile Arrighi*. Au cours d’un contrôle d’identité, quai de la Rapée, il échappa de justesse à l’arrestation. Membre de l’Union sportive du XIe arrondissement, il fut, de juillet 1941 à septembre 1942, responsable à l’organisation d’un secteur regroupant les arrondissements de l’est parisien, sous le pseudonyme de Pierre. Il participa à la même époque, aux côtés de Gilbert Brustlein et sous le commandement de Pierre Georges*, à la constitution des premiers groupes armés du Parti communiste clandestin. C’est à ce moment-là qu’il rencontra sa compagne Madeleine Pefferkorn. Averti de l’arrestation de plusieurs de ses camarades, dont Roger Hanlet, Pierre Milan, Acher Semahya et Fernand Zalkinov qui furent fusillés, il quitta le domicile de ses parents et passa dans la clandestinité, s’installant boulevard Soult (XIIe arr.). Des inspecteurs de la Brigade spéciale perquisitionnèrent, le 24 novembre 1941, au domicile de ses parents et les interrogèrent deux jours durant dans les locaux de la Préfecture.
Il rejoignit alors la MOI, organisation clandestine du Parti communiste, et prit la fausse identité de Pierre Cappeif. D’octobre 1942 à février 1943, il fut responsable d’un secteur de la Jeunesse communiste juive. En mars, il échappa de peu à la vague d’arrestations opérée parmi ces militants après une longue filature menée par des inspecteurs de la Brigade spéciale ; plusieurs de ses camarades n’étant pas venus à des rendez-vous fixés, il s’inquiéta et ne rentra pas à son domicile clandestin, où la police fit une perquisition. Il s’installa Porte de Montreuil (XXe arr.) et se vit confier la responsabilité pour l’ensemble de la région parisienne de ce qu’il restait encore de cette organisation, en liaison notamment avec Robert Endewelt, alias « Gaby », et Albert Youdine.

De décembre 1943 à octobre 1944, il devint responsable national des Jeunes de la MOI (zone Nord) et établit le contact avec la Fédération des JC. De retour du Nord et du Pas-de-Calais, à Paris huit jours avant l’insurrection de la capitale, il participa aux barricades du Panthéon, à la prise de la caserne de la République et de la mairie du XIe arrondissement. En contact avec la direction de la MOI, il assura la liaison avec l’appareil central du PCF par l’intermédiaire de Gaston Laroche. Élevé au grade de lieutenant FFI, il reprit le travail d’organisation afin de constituer des associations de masse regroupant les jeunes issus des différentes immigrations. Son adhésion officielle au PCF date de 1944.

Engagé volontaire dans l’armée française à Surgères (Charente-Maritime) en novembre 1944 pour la durée des hostilités, il rejoignit le Front de La Rochelle et fut intégré jusqu’en janvier 1945 à une unité combattante, le 108e RI, avec laquelle il participa à la liquidation de la poche de Royan. Il fut ensuite envoyé à l’École des cadres de Magnac-Laval (12e région militaire) jusqu’en avril 1945, puis à l’École militaire de Saint Maixent, où il obtint le brevet de chef de section. À sa sortie, en juin 1945, il fut intégré à l’armée française avec le grade de sous-lieutenant de réserve et affecté à Périgueux (Dordogne) au COI 112, où il fut chargé du commandement d’une compagnie. Démobilisé en novembre 1945, il rejoignit alors l’Association des officiers de réserve républicains et Les Amis des FTP ; il fut promu lieutenant de l’armée française en 1948.

Le 9 juin 1945, il se maria avec Madeleine Pefferkorn (fille d’un employé du métro, militant communiste) à la mairie du XIIe arr., sous l’identité de Jean, Pierre Cappeif, nom qu’il portait dans la clandestinité. De leur union naquit un fils, Luc, en septembre 1945. En novembre de la même année, il devint secrétaire de la cellule du quartier boulevard Soult et, en décembre 1946, membre de la commission des jeunes de la section du XIIe arr. Alors qu’il travaillait comme administrateur-adjoint du journal de la CGT, La Vie ouvrière, en qualité de chef de diffusion, il adhéra au syndicat des employés (section presse). Il sollicita sans succès auprès de l’administration la possibilité de s’appeler légalement Jean Cappeif, nom qu’il portait dans la Résistance. On lui proposa alors de lui substituer celui de Jean Capiévic, francisation de son nom accordée en avril 1947, tandis qu’il obtenait sa naturalisation deux mois plus tard. À la même époque, il devint secrétaire de rédaction à La Vie Ouvrière, tout en étant responsable de la section Bel-Air du XIIe arr.. Il suivit avec succès une école centrale communiste de journaliste en 1948 à l’issue de laquelle Georges Gosnat fit cette évaluation : « Intelligent et travailleur. Très bon esprit de Parti, mais gagnerait à se débarrasser d’une certaine rudesse. Assez bon rédacteur, s’intéresse aux questions administratives, très bonne compréhension des problèmes théoriques. A de grandes possibilités de développement. Élément de valeur à suivre. » À partir de 1949, il accéda au poste d’administrateur de La VO et intégra le comité de section Belleville-Ménilmontant du XXe arr. Il fut nommé, en mars 1950, à la tête de l’association France-URSS. En 1951, sa famille s’agrandit avec la naissance d’un deuxième fils, Pierre.
Jean Capiévic dirigea plusieurs journaux communistes régionaux. Il devint ainsi, dès juillet 1950, administrateur du quotidien breton Ouest-Matin. À partir de mars 1952, il fut intégré à la Section centrale d’administration de la presse du Parti communiste. Mais il semble avoir quitté cette fonction à la demande de la commission des cadres et en faisant son autocritique.

En 1953, tout en étant membre du comité de la section de Grenoble Centre et de la commission de contrôle de la fédération, il fut nommé administrateur du quotidien Les Allobroges (Isère) jusqu’en 1955, date à laquelle ce journal fusionna avec La République de Lyon, dont il assura la direction jusqu’à la fin de sa parution en décembre 1958.
Installé à Lyon à partir de 1955, il fut membre du comité de la section Presqu’île-Perrache, du comité fédéral et de sa commission de contrôle et occupa le poste de secrétaire de la fédération du Rhône de 1962 à 1977, tandis qu’il accédait au comité central du PCF, dont il resta membre de 1962 à 1979. Son action politique à Lyon fut marquée par une ouverture vers les milieux intellectuels, de la culture, vers l’Église et les chrétiens. Lors de la création de la 13e circonscription du Rhône pour les élections législatives de 1973, il fut candidat et recueillit 10 357 voix sur 40 697 suffrages exprimés et 52 301 inscrits, distancé de peu par le candidat socialiste Jean Poperen* pour qui il se désista. Élu de 1973 à 1982 conseiller général du canton de Bron, maire de Vaulx-en-Velin de 1977 à 1985 et conseiller général du canton de Vaulx-en-Velin de 1982 à 1985, il contribua durant son mandat municipal à de nombreuses réalisations d’intérêt public : du centre culturel communal Charlie Chaplin au palais des sports, de la poste centrale au commissariat de police ou à l’immeuble de la Sécurité sociale et de la perception.
Dans les années 1977-1978, il fut aussi directeur du quotidien régional communiste Le Point du jour Rhône-Alpes : quotidien du changement démocratique, avec éditions dans les départements du Rhône, de la Loire et de l’Isère) (N° 1 le 22 novembre 1977).
Sa défaite aux élections cantonales de 1985 mit un terme à sa carrière politique. Il démissionna de son mandat de maire le 8 décembre de la même année, mais continua à militer au sein d’associations locales, notamment l’ANACR, dont il fut élu président du comité Vaulx-Décines-Meyzieu en mars 1997, et Les Amis de la Résistance de sa commune, dont il était le président d’honneur. Titulaire de la Croix du combattant volontaire de la Résistance, de la Croix des engagés volontaires, chevalier de l’ordre du Mérite national au titre de la Résistance et médaillé de la Jeunesse et des Sports, il participa à l’édification d’un Monument Manouchian à Vaulx-en-Velin, en hommage à l’engagement des partisans de la MOI.

Décédé à Lyon, le 30 décembre 2002, il fut inhumé au cimetière de l’Égalité à Vaulx-en-Velin. Le palais des sports de la ville porte son nom depuis le 15 novembre 2003, dix-huit ans après son inauguration par Jean Capiévic, un de ses instigateurs, par une décision prise à l’unanimité lors d’un conseil municipal.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article18615, notice CAPKIEWICZ Jonathan [changé en CAPIÉVIC Jean] par Lynda Khayat, version mise en ligne le 25 octobre 2008, dernière modification le 14 janvier 2022.

Par Lynda Khayat

SOURCES : Arch. Nat. 19940508 art. 425 Fichier central de la Sûreté Nat. ; Natural. 19780005 art. 139 dos. 52087 X 45 Capkiewicz dit Cappeif Jean. — Arch. PPo. BS 1 GB 49 Affaire Brustlein (30 octobre 1941) ; BS 2 GB 100 Renseignements sur l’US du 11e arr. ; Gª F 15 Figuères Léopold. — Arch. du PCF, secrétariat du 15 octobre 1948 ; dossiers biographiques (consulté par Claude Pennetier). — L’Humanité, 1er janvier 2003. — Le Progrès, 31 décembre 2002, 16 novembre 2003. — Catalogue BNF. — Notes de Madeleine Capiévic et de Jean-Pierre Vidal..

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