TERMES-VILAPLANA Joachim [TERMES i VILAPLANA Joaquim]

Par André Balent, Marie-Cécile Bouju, Daniel Grason

Né le 4 septembre 1886 à Barcelone (Espagne), mort en 1947 ; membre du Parti de la Gauche républicaine de Catalogne (ERC : Esquerra republicana de Catalunya) ; directeur technique de l’imprimerie Solsona (Paris) pendant la Seconde Guerre mondiale ; résistant ; incarcéré puis interné à Compiègne (Oise)

Photo d’identité.
Photo d’identité.

Fils de Marc et de Josepha, Joachim Termes i Vilaplana vivait à Paris pendant la Seconde Guerre mondiale. C’était un Catalan, nationaliste et franc-maçon.

Avant la Première Guerre mondiale, Joaquim Termes vivait en Argentine. Il était particulièrement actif dans les organisations culturelles de la communauté catalane de Buenos Aires. Homme très cultivé, Termes fut en 1908 un des fondateurs du Casal català de la capitale argentine, une organisation culturelle et communautaire qui acquit rapidement une grande importance et devint l’un des points d’ancrage des Catalans. Termes présida l’Orfeó català de Buenos Aires, une importante société de chant choral rattachée au Casal català. Dès cette époque, il se positionnait comme un nationaliste catalan républicain. En juillet 1914, il fit un voyage en Catalogne et, invité par des organisations catalanistes, il fit de nombreuses conférences à Barcelone mais aussi à Tarragone et à Reus dont rendit compte la presse. La déclaration de la Première Guerre mondiale le surprit alors qu’il était à Barcelone. Pacifiste, défenseur des revendications prolétariennes, il écrivit un article dans un des deux numéros datés du 6 août (le n° 192) de Renaixement, un hebdomadaire catalaniste de Barcelone où il fustigeait « l‘Europe guerrière et bourgeoise ». Plus tard, au printemps (avril ou mai) 1933, il participa, avec de nombreuses personnalités, à Barcelone, à un grand banquet où fut célébré le 25e anniversaire de la fondation de Casal català de Buenos Aires. Des Catalans qui avaient résidé en Argentine étaient présents à cette commémoration placée sous le patronage du président de la Généralité, Francesc Macià.

Nous ignorons si, en 1914, il revint en Argentine. En tout cas, il était bien présent à Barcelone au début des années 1920. Il militait dans les rangs du catalanisme radical de gauche dont le chef de file était le colonel Francesc Macià. Selon les Renseignements généraux, il aurait été de 1921 à 1923 le secrétaire particulier du colonel Francesc Macià, leader séparatiste catalan.

En 1930,il était représentant en machines d’imprimerie, secrétaire général à l’institut catalan des arts et du livre et de l’École professionnelle d’Arts graphiques de Barcelone. En 1931, après la chute de la dictature de Primo de Rivera, il adhéra au grand parti républicain catalaniste de gauche, l’ERC (Esquerra republicana de Catalunya, Gauche républicaine de Catalogne). Il était également actif dans la franc-maçonnerie à laquelle il avait été initié à une date indéterminée. Dans les années 1930, il était membre de la loge barcelonaise Fènix de la Grande loge régionale du Nord-Est d’Espagne affiliée au Grand Orient espagnol. Dans ce cadre, il fit une conférence à Barcelone le 20 mai 1937, en pleine guerre civile. Le texte donna lieu à une publication.
Marié, père de trois enfants majeurs, Joachim Termes i Vilaplana entra en France le 31 janvier 1939 en passant par le col du Perthus (Pyrénées-Orientales), avant la grande vague des réfugiés, ce qui lui permit sans doute d’éviter l’internement dans un camp de la côte roussillonnaise. Il était porteur d’un passeport délivré à Figueres (Figueras) le 25 janvier 1937. Après la Retirada, il demeura un moment, en 1939, à Orléans (Loiret). Par la suite, il s’installa à Paris.
À Paris, il entra en contact avec Blanche Solsona sympathisante communiste qui dirigeait l’imprimerie située au 9 rue Hallé à Paris (XIVe arr.). L’atelier Solsona imprima  La Revista de Catalunya . Embauché par l’imprimerie J. Solsona, Joaquim Termes i Vilaplana en devint le directeur technique. Il obtint de la préfecture de police une carte d’identité d’étranger qui lui a été délivré le 29 juillet 1941.
L’imprimerie était l’une de celles qui éditait des tracts pour le Parti communiste clandestin. Les policiers saisissaient le 19 octobre 1942 environ cinquante mille tracts intitulés : « Aux cheminots communistes de France », « Les petits commerçants et les artisans », « Frères de France », « Collaborer c’est trahir », « Les pillards nazis vident nos caves »
Joachim Termes i Vilaplana fut interpellé par des inspecteurs de la BS1. Lors de son interrogatoire, il déclara qu’il savait que des tracts du parti communiste étaient imprimés. Il affirma avoir été à ce sujet en opposition avec madame Solsona, et lui fit « observer que ce travail était interdit. Je me suis heurté à sa décision prise en qualité de patronne. »
Les travaux d’impression pour l’organisation clandestine s’étant intensifiés depuis septembre 1942, il affirma aux policiers avoir songé à quitter l’entreprise, il précisa « Je ne l’ai pas fait ne sachant pas où aller ni où trouver du travail. » Il a été envoyé au dépôt le 28 octobre 1942 pour infraction au décret du 26 septembre 1939, incarcéré à la prison de Fresnes en novembre.
Après la Libération de Paris, au cours de l’année 1945 des commissions d’épuration de la police siégèrent. Une commission rogatoire mena une enquête sur tous ceux qui furent interpellés dans l’affaire de l’imprimerie Solsona. La trace de Joachim Termes i Vilaplana ne fut pas trouvée.
Selon le rapport de la commission d’épuration de la police du 13 février 1945 : « Le sort advenu à monsieur Termes après son arrestation n’a pu être établi. Sa femme ignore en effet ce qu’il est devenu et il est inconnu dans les différents services de la Préfecture de police. »

Joaquim Termes i Vilaplana survécut et revint à Paris en 1945. Fut-il déporté en Allemagne ? Son nom ne figure pas dans le Livre mémorial de la Déportation. Dans une lettre (Paris, 16 mars 1947) adressée à l’écrivaine catalane Aurora Bertrana (1892-1974) l’écrivain catalan Ferran Canyameres (1894-1964) signale que sa captivité à Compiègne (Oise) le laissa bien diminué. Il n’évoque pas une déportation en Allemagne qui est toutefois possible car, s’il était resté à Compiègne, il aurait été libéré dès 1944 et on n’aurait pas cherché ses traces en 1945. Quelques faits sont établis qui prouvent qu’il fut à nouveau actif entre 1945 et 1947. En 1945, Joaquim Termes prêta son concours à une initiative du PSUC (Parti socialiste unifié de Catalogne, communiste) qui, dans le cadre de l’Unión nacional española (UNE) créée dans la clandestinité par la direction française du PCE (Parti communiste d’Espagne), forma après la Libération une Aliança nacional catalana (ANC). Joaquim Termes représenta l’ERC dans cette éphémère UNE-ANC. À Paris, il s’occupa encore de la revue catalane bimestrielle Catalonia dont il fut membre du comité de rédaction.
Sa détention l’avait cependant laissé bien diminué et malade. Il mourut en 1947. Joaquim Termes i Vilaplana fut enterré au Cimetière du Père-Lachaise le 6 février 1947. Sa mort à l’âge de 61 ans fut consécutive aux rudes conditions de sa détention à Compiègne (et/ou ailleurs ? En Allemagne ?), ainsi que l’évoqua dans une correspondance le grand historien catalan Antoni Rovira i Virgili (1882-1949) exilé à Perpignan.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article186536, notice TERMES-VILAPLANA Joachim [TERMES i VILAPLANA Joaquim] par André Balent, Marie-Cécile Bouju, Daniel Grason, version mise en ligne le 12 novembre 2018, dernière modification le 21 septembre 2020.

Par André Balent, Marie-Cécile Bouju, Daniel Grason

Photo d'identité.
Photo d’identité.
Cliché de la police du 26 octobre 1942.
Cliché de la police du 26 octobre 1942.

OEUVRE : La Maçoneria en els nostres dies a Catalunya i Espanya, Barcelone, 1937, 16 p. — Nombreux articles dans des revues et journaux ; nombreuses conférences parfois publiées ou ayant donné lieu à des comptes rendus imprimés. Retenons par exemple : "L’actuació de l’obrer català a Argentina", conférence prononcée à Tarragone et à Reus en juillet 1914 (compte rendu dans Renaixement, organe de l’Unió catalanista, 196, 6 août 1914).

SOURCES : Arch. PPo. GB 068, GB 168, 77W 5369. — L’Estiuada, periòdic nacionalista de Sant Hilari Sacalm, 78, juillet 1914 ; 81, septembre 1914. — Renaixement (Adherit a la Unió catalanista), hebdomadaire, Barcelone, 192, août 1914 ; 193, également 6 août 1914. — Ressorgiment, 202, Buenos Aires, mai 1933. — Montserrat Canyameres i Casals (éd.), Ferran Canyameres, Obra completa, VI, Epistolari (1939-1951), Barcelone, Columna, 1996, lettre à l’écrivaine Aurora Bertrana, Paris, 16 mars 1947, p. 206. — Maria Capdevila (éd.), Antoni Rovira i Virgili, Cartes de l’exili, Barcelone, Edicions de l’abadia de Montserrat, 2002, 312 p ; [p. 309, note 1]. — Ferran Sánchez Agustí, Maquis a Catalunya. De la invasió de la vall d’Aran a la mort de Caracremada, Lérida, Pagès editors, 1999, 393 p. [p. 51]. — Ferran Sánchez Agustí, Espías, contrabando y evasión. La II Guerra Mundial en los Pirineos, Lérida, Editorial Milenio, 2003, 302 p. [p. 123]. — Nos remerciements à madame Janine Eemans pour les informations qu’elle nous a communiquées.

PHOTOGRAPHIE : Arch. PPo. GB 168 cliché du 26 octobre 1942.

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