Par Jacques Girault
Né le 23 avril 1879 à Cotignac (Var), mort le 29 septembre 1944 à Cotignac ; militant socialiste ; député du Var (1924-1936).
Fils unique d’une couturière et d’un petit propriétaire exploitant, Hubert Carmagnolle fut baptisé et fit sa communion. Après avoir obtenu le certificat d’études primaires, il devint ouvrier agricole et se rendait, chaque été, dans les Basses-Alpes [Alpes-de-Haute-Provence], pour se louer lors de la moisson. Il y noua des relations avec des socialistes et y trouva aussi des clients pour les vins que sa famille produisait et dont il fit profiter, plus tard, la coopérative.
Son père avait été conseiller municipal « rouge » de Cotignac pendant un mandat et avait participé à la fondation du cercle des Travailleurs en 1879.
Carmagnolle fut réformé pour inaptitude physique et se maria civilement en janvier 1913 avec la fille du maire « rouge » de Varages, Bertrand*.
Il participa, le 23 décembre 1899, au congrès du Luc où fut fondé le Parti socialiste varois et devint secrétaire de la section socialiste de Cotignac.
Élu conseiller municipal de Cotignac en 1904, il fut réélu au deuxième tour, le 10 mai 1908, avec 284 voix. Il devint maire du village la semaine suivante.
Carmagnolle, membre du comité fédéral de la SFIO dès septembre 1905, devait être un des militants socialistes paysans les plus en vue du Var. Il participa à cet effet à la campagne électorale de Renaudel dans la 2e circonscription de Toulon en 1910. Assesseur au congrès fédéral du 6 septembre 1908, il figurait parmi les délégués au congrès national de Toulouse (15-18 octobre 1908) et fut délégué au conseil national en 1914.
Maire socialiste, Carmagnolle affronta l’administration dévouée à Clemenceau. Cotignac fut une des deux municipalités socialistes du département à le blâmer. Ainsi, le 25 juillet 1909, le sous-préfet de Brignoles vint à Cotignac et ne se rendit pas auprès du maire qui protesta ; il dénonça le « caractère d’hostilité envers la municipalité de Cotignac ». Le 24 décembre, Carmagnolle fit voter un ordre du jour par le conseil municipal protestant contre la peine de mort frappant Durand : « Désirant ardemment que tous les hommes de cœur se dressent pour empêcher l’accomplissement de ce nouvel assassinat de morale bourgeoise et imposer le respect de nos libertés et existences menacées aux renégats [Briand] qui nous gouvernent [...] ».
En 1905, Carmagnolle avait contribué à la création de la première société coopérative de production agricole et oléicole « La Travailleuse » dont il resta directeur-comptable jusqu’en 1927. La publicité dans la presse enseignante, Revue de l’Enseignement primaire et primaire supérieur notamment (ses statuts avaient été rédigés par un instituteur), insistait sur le fait que tous les coopérateurs étaient inscrits à la SFIO.
Carmagnolle fut réélu, le 5 mai 1912 ; il arrivait en tête d’une liste « républicaine socialiste » avec 397 voix sur 737 inscrits.
À la déclaration de la guerre, Carmagnolle fut mobilisé dans les services auxiliaires à Tarascon, puis à partir de décembre 1914, au secrétariat du commandant de la poudrerie de Saint-Chamas. Le commandant était originaire d’Entrecasteaux ; Carmagnolle eut donc suffisamment de libertés pour continuer à administrer sa commune tandis que son épouse le remplaçait comme comptable de la coopérative. Il put aussi participer à la vie de la Fédération socialiste varoise qu’il continuait à représenter au conseil national. Constamment en accord avec Renaudel, il se sépara politiquement de son ami, le député Vigne* de plus en plus proche de Clemenceau.
Démobilisé le 24 mars 1919, Carmagnolle reprit son activité à la tête de sa commune. Le 30 novembre 1919, sa liste dut affronter une liste où se mêlaient des anciens combattants et ses traditionnels adversaires de droite appuyés par l’Eglise. Il arriva en quatorzième position avec 213 voix sur 621 inscrits. Pour les élections législatives de novembre, Renaudel avait fait pression sur lui pour qu’il acceptât d’être candidat après que Vigne eût pris de nouvelles distances à l’égard de la SFIO. Le maire de Cotignac refusa ; après l’échec de la liste socialiste, Renaudel aurait indiqué à ses proches qu’à son avis, les résultats auraient changé si le « paysan » Carmagnolle avait été candidat ; sa présence aurait empêché les anciens combattants de gauche, dans le Haut-Var, de se réfugier dans l’abstention. Il avait simplement mené la campagne électorale au sein du comité électoral départemental.
La défaite socialiste et l’évolution définitive de Vigne, devenu candidat clemenciste pour le Sénat, firent jouer un rôle plus actif au maire de Cotignac dans la commission électorale mise en place par la SFIO pour les élections sénatoriales de 1920. La veille du scrutin, il animait la réunion du comité électoral du Bloc des gauches et ne fut pas étranger à la victoire du socialiste Fourment* sur Vigne.
Carmagnolle fut constamment réélu au comité fédéral de la SFIO et délégué aux réunions du conseil national. Il siégeait au bureau du congrès fédéral de Toulon, le 19 décembre 1920, où se déterminèrent les positions pour le congrès de Tours. Se prononça-t-il pour la motion de Renaudel ou pour la motion de Longuet ? nous n’avons pu le déterminer. Selon les souvenirs du fils de l’intéressé, Carmagnolle avait eu très tôt des informations sur la situation en Russie et sur les raisons de l’adhésion à la Troisième Internationale par un de ses amis, instituteur, passé au communisme lors de la scission.
En 1919, Carmagnolle avait agrandi sa propriété et avait engagé un granger ; ne cultivant plus directement la terre, il ne vivait que de ses fonctions de directeur de la coopérative. Il pouvait se consacrer alors entièrement à sa commune et était souvent cité pour la sagesse de son administration et pour ses réalisations. Dès 1925, la régie municipale pour l’électricité était complète. L’usine d’électricité privée avait été rachetée et l’extension du réseau avait été effectuée à l’aide d’un emprunt local ; cette pratique budgétaire n’avait entraîné aucune augmentation d’impôts ; elle servit d’exemple à de nombreuses municipalités socialistes. En 1927, l’adduction d’eau était réalisée grâce à une importante subvention accordée et gagée sur les bénéfices réalisés sur la production d’électricité. Ces bénéfices furent réemployés en 1929 pour la réalisation du tout-à-l’égout et en 1932 pour le terrain de sports. Carmagnolle, devenu député, pouvait avoir des moyens supplémentaires pour ses réalisations. Mais, lucide, il empêcha Léon Blum*, lors de sa visite en 1932, de se servir, selon le témoignage de son fils, de l’exemple de Cotignac pour vanter les qualités de la gestion municipale d’un élu socialiste.
Initié le 17 février 1924 à la loge de Brignoles, « L’École de la Sagesse » affiliée au Grand-Orient de France, son testament rédigé, le 21 octobre 1923, au moment son admission, affirmait : « anticlérical, marié civilement [sa femme était morte au début de 1923], mon enfant [né en 1914] n’est pas baptisé et personne des miens n’aura d’obsèques religieuses ». Peu assidu, il ne dépassa pas le grade d’apprenti, il fréquenta moins les réunions maçonniques à partir de 1932-1933, tout en restant affilié. Il participa à des réunions en 1937-1938.
Il eut aussi l’occasion d’afficher ses idées après avoir été nommé président d’honneur du Comité d’aviation nationale de Brignoles. Il refusa cet honneur et s’en expliqua dans Le Petit Var, le 19 mai 1922 : « J’aime la science et le progrès qui sont des moyens de mieux-être et d’émancipation prolétarienne [...]. Mais pourquoi faut-il que l’aveuglement des hommes fasse de cette belle découverte un instrument de guerre et de carnage [...] ; mes principes socialistes [...] m’interdisent d’approuver et de seconder la campagne qui se fait autour de l’aviation. »
Carmagnolle participa aux tentatives de regroupement des forces de gauche dans le Var à partir de 1923. Il militait aussi dans la Fédération des cercles rouges. Le congrès de la Fédération socialiste de Toulon, les 9 et 10 février 1924, le désigna en troisième position comme candidat possible pour l’élection législative. Pourtant, il ne voulait toujours pas être député. Sa section l’avait mandaté pour voter pour la candidature de Herpe* ce qu’il fit dans un premier temps au congrès du Luc, le 9 mars 1924, où furent désignés les quatre candidats de la liste rouge. Renaudel fit certainement pression sur le maire de Cotignac. Après le succès du secrétaire fédéral Herpe, Carmagnolle et Renaudel déclarèrent qu’ils retireraient leurs candidatures si Herpe ne s’effaçait pas. La manœuvre réussit.
Pendant la campagne électorale, aux côtés des avocats Reynaud*, Brémond*, ou de Renaudel, Carmagnolle joua un rôle effacé. Ses discours étaient toujours très courts. Au meeting de Toulon, le 31 mars 1924, il préconisa l’extension des coopératives de production et le rapport de police notait qu’il s’était affirmé « de cœur avec les révolutionnaires russes qui soutiennent leur lutte grâce à l’action coopérative ». La « liste de coalition rouge » fut élue. Carmagnolle arrivait en troisième position, le 11 mai 1924, avec 32 816 voix sur 78 101 inscrits.
À la Chambre des députés, membre de la commission de l’Agriculture, Carmagnolle participa à la discussion du budget de 1925 au sujet des allocations des assurés obligatoires et facultatifs. En 1926, il proposa de venir en aide aux agriculteurs varois éprouvés par les intempéries et soutint un amendement relatif aux coopératives de production agricole. En 1927, il présentait un amendement sur le projet de loi concernant les accidents du travail. Carmagnolle intervint dans le débat sur les retraites ouvrières et paysannes. Il proposa aussi des modifications du régime des appellations des vins varois, de l’arrêté sur la chasse de la grive et s’inquiéta de la situation des mines de bauxite. Après les propositions d’Édouard Herriot, le 17 juillet 1926, de participer au gouvernement, il signa avec 25 autres parlementaires socialistes une lettre à la CAP du Parti protestant contre le refus de celle-ci de participation.
Carmagnolle ne voulut pas affronter son ancien ami Vigne, conseiller général du canton et défenseur, comme lui, de la coopération. Après la démission de ce dernier en 1928, le maire de Cotignac refusa d’être candidat. Il ne voulait pas cumuler les mandats et considérait que Carcès, commune importante du canton, devait avoir un représentant au plan départemental. Il soutint contre le conseiller général de droite, maire de Carcès, Gazan, son ami Jules Luquet* qui, après un premier échec en 1928, finit par l’emporter en 1931. De même, les conseillers d’arrondissement furent toujours ses amis personnels.
Au plan communal, en revanche, en 1925, ses adversaires de droite, pour la première fois, ne l’affrontèrent pas. Les « blancs » avaient toujours refusé les réalisations du maire et s’étaient de ce fait affaiblis. Carmagnolle avait refusé d’intégrer certains de ses adversaires sur sa liste. Il arriva en treizième position aux élections, le 3 mai 1925 avec 271 voix sur 553 inscrits. Le 5 mai 1929, il arriva en tête de la « liste socialiste » avec 305 voix sur 525 inscrits. Il fut élu au conseil d’administration de la Fédération des municipalités socialistes du Var créé le 22 mai 1927.
Bien que ne dirigeant plus personnellement la coopérative, les jalons qu’il avait posés (notamment les dépôts bas-alpins) permettaient un écoulement régulier des produits. Ces réussites communales et coopératives étaient le résultat de l’action propre de Carmagnolle.
Aux élections législatives de 1928, avec le retour au scrutin d’arrondissement, Carmagnolle se présenta dans la circonscription de Brignoles. Henry Prété, dans Paris-Soir, le 11 avril 1928, le décrivait ainsi : « J’ai trouvé un bon paysan trapu, simple, tranquille. Il ferait un détour pour ne pas écraser une cigale. Député sortant, il présente le drapeau rouge des SFIO aux cultivateurs ses frères avec un sourire plein de cordialité. »
Après avoir recueilli 3 853 voix au premier tour sur 13 118 inscrits, Carmagnolle l’emportait, le 29 avril 1928, avec 5 114 voix. Il s’inscrivit à la Chambre à la commission de l’Agriculture et à celle d’assurance et de prévoyance sociale. En 1929, il élabora des rapports sur une proposition de loi sur les fraudes concernant l’essence de lavande. En 1930, il demanda des primes à l’oléiculture et, l’année suivante, la possibilité de recevoir des avances de la Caisse nationale de crédit agricole. Il fut nommé par la Chambre en 1932, membre de la commission plénière de cette Caisse.
Toujours secrétaire de la section socialiste de Cotignac, souvent délégué par les congrès fédéraux aux congrès nationaux ou aux réunions du conseil national de la SFIO, Carmagnolle participa aux discussions internes sur la question agraire et tout particulièrement sur la viticulture.
Aux élections législatives de 1932, Carmagnolle fut réélu dès le premier tour, le 1er mai, avec 5 160 voix sur 13 132 inscrits. Pendant la campagne électorale, à Carmagnolle, partisan du libre-échange, son adversaire de droite, Ricard opposa vainement un appel « agriculteurs, debout pour défendre vos produits » et une menace, « ce serait l’entrée libre en France de tous les produits étrangers ».
Cette élection triomphale fut l’apogée politique du maire de Cotignac. À la Chambre, toujours membre des mêmes commissions, il joua un grand rôle dans la discussion sur le projet de loi sur la viticulture et le commerce des vins. Il soutint un amendement sur l’application du blocage aux départements dont la superficie était inférieure à celles des années précédant l’invasion du phylloxéra.
Carmagnolle participa activement aux discussions internes à la SFIO en 1933. En juin, la majorité du congrès fédéral de Draguignan le délégua au congrès de Paris. Il suivit, comme la plupart des autres élus du Var, Renaudel dans la dissidence et joua un rôle personnel important dans le nord-ouest du département dans la transformation en Parti socialiste de France.
Au plan local, Carmagnolle s’était opposé vivement en 1933 à la droite et à l’Eglise qui voulaient organiser une manifestation pour célébrer le tricentenaire de l’arrivée de Louis XIV à Cotignac. Le maire, en vertu d’un arrêté municipal du début du siècle interdisant les processions, s’opposa au rassemblement ce qui lui valut les critiques de la presse de droite. Le Parti socialiste SFIO n’avait pas réussi à se reconstituer à Cotignac à la différence du canton où, aux élections cantonales d’octobre 1934, le candidat sortant au conseil d’arrondissement, soutenu par Carmagnolle, avait été battu par le candidat socialiste SFIO. De la même façon, le Parti communiste avait progressé ; Carmagnolle était donc attaqué de toutes parts. Aussi, aux élections municipales la liste qu’il dirigeait affronta-t-elle des opposants où se mêlaient des « blancs » et des communistes. Elle fut réélue néanmoins ; Carmagnolle arrivait en tête avec 237 voix sur 473 inscrits.
Selon de multiples témoignages, très tôt, dans le courant de 1934, Carmagnolle envisageait une retraite politique. Il fréquentait beaucoup moins la Chambre des députés et préférait la chasse aux réunions politiques. Pourtant, le siège du sénateur Fourment semblait menacé par la poussée de la gauche socialiste SFIO et communiste lors des élections cantonales et municipales. Le décès de Renaudel n’était qu’un élément supplémentaire de son détachement. Fourment, le sénateur radical Renoult, les élus passés au PSDF firent pression sur lui pour qu’il acceptât de se présenter aux élections sénatoriales sur la même liste que Fourment afin de favoriser son élection par le jeu des désistements. Lors de la réunion de présentation des candidats au théâtre municipal de Draguignan, il insista notamment sur son rôle pionnier dans le mouvement coopératif du département. Le 20 octobre 1935, il arrivait en neuvième position avec 78 voix et se retirait après le premier tour.
Carmagnolle présida le congrès fédéral de l’Union socialiste et républicaine qui succédait au PSDF, le 9 février 1936. Il ne voulait pas se représenter et cherchait un remplaçant. Tour à tour, Marcel Déat* et l’avocat toulonnais Le Bellegou* sollicités, refusèrent. Ce dernier estimait que Carmagnolle pouvait être élu s’il était personnellement candidat. La candidature du conseiller général de la Seyne, Lamarque* pour la SFIO accentua la conviction de Le Bellegou. Pendant la campagne électorale au printemps de 1936, Le Bellegou fut aux côtés du député sortant, candidat du « Comité d’union socialiste de l’arrondissement de Brignoles ». Il s’adressait à « tous les rouges » et soulignait son enracinement en ces termes : « ce n’est pas un de ces pèlerins de la politique [ici allusion directe à Lamarque] toujours en quête d’un coin où planter leur tente électorale ». Insistant sur son action en faveur des viticulteurs et sur sa fidélité à Renaudel, il concluait, après avoir regretté la « carence des partis de gauche », « une grande espérance est née avec le Front populaire. Non seulement, l’Union a été faite, mais le programme commun est réalisé, en concordance avec le programme de notre parti. Demain à l’ouvrage. Le Socialisme trouvera sa véritable expression dans l’action rénovatrice et constructive. Il est temps pour lui de s’affranchir des dogmes et des formules. Le socialisme est majeur, il doit se mettre à l’ouvrage ».
Le 26 avril 1936, Carmagnolle, avec 1 929 voix sur 13 080 inscrits, arrivait en quatrième position. Le soir même, il téléphonait au communiste Gaou*, arrivé en tête, pour lui annoncer son désistement qu’il confirmait par voie de presse. Or le désistement de Lamarque tardait à se déclarer. Le candidat de droite Barthélémy aurait alors proposé à Carmagnolle une entente ; le député sortant aurait refusé (selon le témoignage de son fils). Carmagnolle manifestait ainsi son attachement au Front populaire tout en ne cachant pas à ses amis qu’il n’accordait qu’une confiance limitée au Parti communiste pour représenter cet idéal. La majeure partie de son électorat suivit les conseils de désistement ; toutefois, pour des raisons locales, comme à Carcès, ses électeurs ne votèrent pas communiste. Toutefois, si Gaou ménageait verbalement le maire de Cotignac, il n’en allait pas de même des communistes locaux qui, souvent refusaient de le considérer comme un allié.
Dans la période qui suivit, Carmagnolle intervint, cette fois, plus ouvertement dans les luttes politiques du canton. L’union des partis du Front populaire était fragile particulièrement à Carcès où socialistes SFIO et communistes s’affrontaient. Carmagnolle encouragea le regroupement autour de l’Union socialiste et républicaine des anciens « néos », des radicaux et des anciens partisans de Vigne dont le grand succès fut la reconquête de la municipalité de Carcès et l’élection de son ami Julius Luquet* comme maire en 1938. Les relations avec la SFIO s’améliorèrent bien qu’il ait toujours refusé de réintégrer son ancien parti comme le lui conseillait Le Bellegou. En février 1939, il participa même à une réunion organisée par la faible section socialiste SFIO de Cotignac avec le sénateur Sénès* et le secrétaire fédéral Toesca*. Toutefois, une péripétie électorale permit de mesurer le fossé qui le séparait des socialistes SFIO. Lors de l’élection complémentaire pour le conseil d’arrondissement dans l’été de 1939, il soutint, tout comme le PPF et la droite, l’adjoint au maire de Carcès qui l’emporta contre le candidat socialiste SFIO qui voulait conserver le siège à son parti. Le Populaire du Var, hebdomadaire socialiste SFIO, le 15 juillet 1939, concluait son « épilogue électoral » ainsi, « il y a dans le canton de Cotignac un beau « salaud » qui s’appelle Hubert Carmagnolle*. Pour fêter le 150e anniversaire de la Révolution française, cet ex-député a fait élire le porte-drapeau de Mussolini. Compliments ».
Selon le témoignage de son fils, Carmagnolle aurait déclaré approuver les députés, qui comme Collomp* et Zunino* avaient voté contre la délégation de pouvoirs au maréchal Pétain. Il n’aurait pas démissionné de ses fonctions de maire sur les conseils du préfet Lahilonne et n’aurait montré aucun zèle à l’égard de l’administration qui suivit avec le préfet Feschotte, partisan de la collaboration. Il eut de nombreux heurts avec la Légion.
Après une affaire de faux tickets qui aboutit à l’arrestation et à l’exécution par les Allemands du secrétaire de mairie de Cotignac, le maire fut accusé de l’avoir « donné ». Le 4 juillet 1944, pourtant, selon le témoignage de son fils, Carmagnolle avait été arrêté avec sa famille par la Gestapo et la Milice ; ils furent relâchés deux jours plus tard.
Dès la victoire des forces de la Résistance, arrêté, Carmagnolle fut traduit devant le Comité de Libération de Brignoles qui le relâcha ne pouvant retenir contre lui aucun fait de collaboration.
Quelques jours plus tard, Carmagnolle fut enlevé de son domicile le 28 septembre, et exécuté sur la route d’Entrecasteaux. La gendarmerie concluait alors à un « assassinat ». Une polémique s’ensuivit dans la région sur les causes et les auteurs de cet « assassinat ». Quelques années plus tard, Le Méridional-La France, à la suite d’une enquête, concluait que l’exécution avait des raisons plus personnelles que politiques.
Carmagnolle fut le type même du député-paysan socialiste à forte implantation locale.
Par Jacques Girault
SOURCES : Arch. Nat. F7/13021 ; 13085. — Arch. Dép. Var, 2 M 3.48 ; 2 M 3.49 ; 2 M 3.50 ; 2 M 3.52 ; 2 M 4.13 ; 2 M 7.24.1 ; 2 M 7.28.2 ; 2 M 7.33.1 ; 2 M 7.32.1 ; 2 M 7.35.2 ; 4 M 41 ; 4 M 42 ; 4 M 44 ; 4 M 45 ; 4 M 53 ; 18 M 5 ; 18 M 90 ; 1 Z 2.2 ; 3 Z 2.5 ; 3 Z 2.6 ; fonds Franc-Maçonnerie (non classé). — Arch. Ass. Nat. (dossier personnel). — DPF, t. 3, op. cit. — Presse locale. — Renseignements fournis par le fils de l’intéressé A. Carmagnolle, par E. Le Bellegou et par Joseph Pascal. — Sources orales.