TRINKA Karl, alias WILDSCHÜTZ (« Braconnier » pseudonyme de Résistance) [nom orthographié parfois TRENKER]

Par André Balent

Né sans doute en 1911 en Autriche ; tué le 28 mai 1944 à La Parade (actuelle commune de Hures-La Parade, Lozère) lors de l’attaque du cantonnement du maquis Bir Hakeim par les forces d’Occupation ; antifasciste réfugié en France ; résistant en Lozère (AS : Brigade Montaigne puis maquis Bir Hakeim).

Karl Trinka rejoignit le maquis formé dans les Cévennes lozériennes par François Rouan alias « Montaigne »*, militant de Montpellier exclu du PC pour « trotskisme » , résistant de Combat et de l’Armée secrète (AS) à la demande d’André Pavelet alias « Villars », responsable du « service maquis » de l’AS de la R3. Ce maquis établi en août 1943 à la ferme abandonnée du Bancilhon se déplaça à la fin octobre à La Fare (commune de Saint-Germain-de-Calberte, Lozère). Rouan* le forma surtout à partir d’Allemands et d’Autrichiens antinazis avec l’aide du Travail antifasciste allemand (TAA). À leur côté, quelques autres étrangers et fort peu de Français. Il comprenait environ une quarantaine d’hommes, parmi, lesquels l’Autrichien Karl Trinka. Le maquis de Rouan, (MOI : Mouvement ouvrier internationaliste) fusionna à La Fare au début de 1944, avec le maquis d’antinazis allemands (AS, lui aussi), le groupe Veylet/Kühne (Voir aussi Lindner Anton). Trinka y retrouva deux autres Autrichiens, Ernst Frankel et Hans Krainer.

Cette « brigade Montaigne » (de « Montaigne », pseudo de Rouan*) s’installa ensuite dans une ferme inoccupée, la Galabertès, toujours dans la commune de Saint-Germain-de-Calberte. Trinka faisait partie des maquisards qui y cantonnèrent et collaborèrent bientôt, avant de fusionner avec le « maquis école » (AS) de la Picharlarié (commune de Saint-Étienne-Vallée-Française, Lozère), à proximité de Galabertès, mis en place par le comité de Saint-Jean-du-Gard (Gard) (Voir Lapierre Jean) et le maquis (AS) Bir Hakeim commandé par Jean Capel alias commandant Barot qui s’était aussi installé à la Picharlarié. Les trois groupes nouvellement fusionnés participèrent au combat livré contre les forces du Reich de la Vallée Française (Voir Capel, Lindner, Sauvebois, Veylet), le 12 avril 1944. Trinka fit partie de ceux qui affrontèrent l’armée allemande (la 9e Panzer Hohenstaufen, division rompue à la lutte contre les partisans sur le front de l’Est). Ayant échappé à la traque des SS, il fit partie de ceux qui se réfugièrent au Pla de Fontmort avec Rouan. Capel les fit transférer par des véhicules automobiles au château de Fons où s’étaient regroupés les autres participants au combat des 12 et 13 avril. Après discussions avec Otto Kühne*, désireux de rejoindre les FTPF et Capel, il fut décidé qu’une partie des Allemands, Autrichiens et autres étrangers issus de la Brigade Montaigne demeureraient dans les rangs de Bir Hakeim. Trinka faisait partie de ces derniers.

Avec Capel et une vingtaine d’autres hommes issus du groupe Kühne*/ « Montaigne », Trinka participa, à partir du 8 mai, à une expédition de Bir Hakeim dans l’Hérault (région de Clermont-l’Hérault) où ce maquis disposait d’une autre base. Ils échouèrent à récupérer le contenu d’un parachutage dont les Allemands eurent connaissance. À leur retour, ils trouvèrent les Fons incendié et s’installèrent à l’hôtel du Fangas sur le mont Aigoual. Les maquisards étant repérés par la Milice et les forces d’occupation, Capel décida le transfert de Bir Hakeim à La Parade (Lozère), sur le causse Méjean. Deux colonnes, une motorisée et l’autre pédestre, quittèrent le Fangas pour leur nouveau cantonnement (25-26 mai 1944). Trinka fit partie du groupe qui, à pied, relia l’Aigoual à La Parade par le col de Jalcreste. Il arriva fourbu dans son nouveau cantonnement qui, repéré par les troupes d’occupation fut attaqué le 28 août 1944, dimanche de la Pentecôte par deux colonnes d’Allemands de la garnison de Mende (Lozère) qui encadraient des unités arméniennes de l’Ost Legion. Trinka se trouvait au « château » (en fait une grande ferme monumentale) de La Borie, dans un hameau à proximité immédiate de La Parade. Dans ce bâtiment, Capel avait installé son état-major. Voyant que la Borie était cernée de toutes parts par les soldats germano-arméniens, Capel ordonna une sortie (la première qui fut tentée). Il se précipita à l’extérieur, pistolet-mitrailleur au poing, suivi par Anton Lindner, Karl Trinka et deux autres maquisards. Peu après que Capel eut été fauché par une rafale ennemie, Lindner et Trinka furent à leur tour abattus.

Enterré d’abord à La Parade, Karl Trinka fut ensuite inhumé à la nécropole des maquis de Chasseneuil-sur-Bieuvre (Charente). Son nom figure sur le monument de La Parade, construit en mémoire des morts de Bir Hakeim, les 28 et 29 mai 1944. Il est également gravé à Mourèze (Hérault) sur le grand mémorial érigé en l’honneur des maquisards de Bir Hakeim morts au combat ou exécutés entre septembre 1943 et août 1944. Son nom figure aussi sur le monument de Moissac-Vallée-Française (Lozère) qui regroupe une liste non exhaustive de noms de combattants de plusieurs nationalités, surtout français et austro-allemands (trente-et-un noms pour ces derniers) accompagnée du commentaire suivant : " Ici, dans les Cévennes des Camisards, terre de refuge, ont lutté côte à côte des Français et des Allemands contre les troupes d’occupation nazies et leurs collaborateurs vichystes - 1943-1944 - Vous n’avez réclamé la gloire ni les larmes mais nous vous devons le souvenir ".
La mention "mort pour la France" fut accordée à Karl Trinka.

Voir : La Parade (commune de Hures-La Parade, Lozère), 28 mai 1944

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article188029, notice TRINKA Karl, alias WILDSCHÜTZ (« Braconnier » pseudonyme de Résistance) [nom orthographié parfois TRENKER] par André Balent, version mise en ligne le 23 décembre 2016, dernière modification le 12 septembre 2021.

Par André Balent

SOURCES : Institut für Marxismus-Leninismus, Berlin, témoignages dactylographiés d’Allemands, résistants en Lozère et dans le Gard, utilisés et cités par Éveline et Yvan Brès, op. cit., 1987. — Éveline & Yvan Brès, Un maquis d’antifascistes allemands en France (1942-1944) Montpellier, les Presses du Languedoc/Max Chaleil éditeur, 1987, 348 p. [pp. 130, 157, 205, 217, 239, 242, 252, 335]. — Éveline & Yvan Brès, « Des maquisards allemands dans les Cévennes », Hommes et migrations, 1148, 1991, pp. 30-35. — Max Dankner, « Das Massaker von La Parade » in (rassemblés et arrangés par) Dora Schaul, Résistance-Erinnerungen deutscher Antifascisten, Berlin, Dietz, 1973, pp. 195-106 [récit souvent cité, comme l’ouvrage suivant, avec ceux d’autres Allemands dans le livre d’Éveline et Yvan Brès cité ci-dessus]. — René Maruéjol, Aimé Vielzeuf, Le maquis Bir Hakeim, nouvelle édition augmentée, préface d’Yves Doumergue, Genève, Éditions de Crémille, 1972, 251 p. — Association pour des études sur la Résistance intérieure (AERI), Association départementale des Anciens de la Résistance de Lozère, ANACR Lozère, La Résistance en Lozère, CDROM , accompagné d’un livret, 27 p., Paris, 2006. — MemorialGenWeb, site consulté le 17 novembre 2016.

rebonds ?
Les rebonds proposent trois biographies choisies aléatoirement en fonction de similarités thématiques (dictionnaires), chronologiques (périodes), géographiques (département) et socioprofessionnelles.
Version imprimable