CARTIER Marius, Alexandre

Par Gilles Alvès

Né le 5 janvier 1913 à Puellemontier (Haute-Marne), mort le 31 décembre 1992 à Saint-Dizier (Haute-Marne) ; homme d’équipe à la SNCF ; responsable interdépartemental du Front national (Haute-Marne, Haute-Saône, Vosges) ; secrétaire de la fédération communiste de Haute-Marne (1953-1971) ; vice-président du conseil général de Haute-Marne (1945-1949), député (1945-1951, 1956-1958), maire de Saint-Dizier (1971-1989).

Assemblée nationale, Notices et portraits, 1946

Deuxième enfant d’une famille paysanne, Marius Cartier ne connut pas son père, tué lors de la Première Guerre mondiale, le 5 septembre 1914. Titulaire du certificat d’études primaires obtenu dans son village de Puellemontier, dans le nord de la Haute-Marne, il commença à travailler comme ouvrier agricole, avant d’effectuer son service militaire en 1933 au 508e régiment des chars à Lunéville (Meurthe-et-Moselle). En 1935, il adhéra au PCF et commença à travailler dans l’agriculture à Chasséricourt (Aube). Le 1er décembre 1936, il entra à la SNCF à Arzillières-Saint-Rémy, avant d’être muté à la gare de Saint-Dizier en février 1937, où il exerça les fonctions d’homme d’équipe sous halles. Sur sa demande, il rejoignit l’atelier-magasin SNCF de la même ville environ un an plus tard. Ayant fait l’école fédérale à Troyes en 1938, il prit position et milita « contre le diktat de Munich », menant « avec un camarade une dure campagne » auprès de ses collègues de travail (autobiographie du 29 septembre 1946).

À la suite de sa mobilisation en 1939 au 109e régiment d’infanterie sur le front d’Alsace, puis de son évacuation à Bordeaux après le bombardement de Vitry-le-François (Marne), il rentra à Saint-Dizier en septembre 1940, où il distribua tracts et journaux interdits à l’atelier-magasin. Membre du PCF clandestin, il se maria le 6 décembre 1941 à Vitry-le-François avec Ginette Jeanson, membre du Parti communiste. Suivant son autobiographie, il devint « responsable de la section illégale » à Saint-Dizier dès le 22 juin 1941, suite à l’arrestation de quelques camarades, puis fut chargé, un an plus tard, par la direction du parti d’organiser les cheminots dans la Résistance en Franche-Comté, en Meurthe-et-Moselle, dans le Territoire de Belfort et dans le sud de la Haute-Marne, sous le pseudonyme de Camille. Arrêté deux fois en mai-juin 1943, il participa à la lutte armée en Haute-Saône aux côtés du colonel Fabien, puis devint responsable interdépartemental du Front national de la Haute-Marne, des Vosges et de la Haute-Saône.

Après avoir participé à la libération de Saint-Dizier, il devint père d’une fille, née en 1946, et entama une carrière politique locale et nationale qui fit de lui l’acteur principal du communisme haut-marnais pendant plus de quatre décennies.

Marius Cartier n’exerça son travail aux chemins de fer que pendant le répit que lui laissaient ses mandats politiques. Il retrouva en effet l’atelier-magasin SNCF entre 1951 et 1956, nommé à l’échelle 4 en septembre 1951. Adhérent de la CGT depuis 1936 et membre du bureau syndical, il représenta les cheminots CGT de Saint-Dizier aux élections professionnelles, ainsi qu’au comité local des activités sociales (CLAS). Mais il ne fut secrétaire des cheminots CGT de Saint-Dizier que jusqu’en novembre 1953. Ses responsabilités à la CGT se limitaient d’ailleurs à la participation au bureau de l’Union locale et à la commission administrative de l’UD, plutôt en raison de sa notoriété politique que de son action syndicale. Il travailla à nouveau à la SNCF entre la fin 1958 et 1963, où il obtint une mise en disponibilité pour se consacrer entièrement à ses activités politiques. Lors de sa retraite, qu’il fêta à la Bourse du Travail le 15 février 1968 devant 140 personnes, il reçut la médaille d’honneur en argent des chemins de fer.

Ayant effectué l’école d’un mois en mars 1945, il se maintint à la tête de la fédération haut-marnaise du PCF de 1945 à 1971, date où il prit ses fonctions de maire. Militant inlassable, omniprésent dans les réunions et les meetings, il contribua à enrayer la désintégration de son parti en 1949-1950, qui aurait compté 1 165 adhérents au début de 1951. En 1954, il se montra un partisan efficace de la politique de la main tendue en dehors du monde ouvrier. En réalité, le souvenir que Marius Cartier laissa parmi les militants qui l’ont côtoyé est celui d’un homme très habile, sachant jouer de l’ouverture et de l’ouvriérisme au gré des circonstances. À Saint-Dizier, ce militant sobre à l’excès avait su se créer une réputation de chaleur humaine frôlant la légende, notamment en y vendant l’Humanité dimanche depuis 1937, comme le rappela la presse locale lors de son décès. De fait, il aura réussi à asseoir son pouvoir grâce à d’excellentes aptitudes au militantisme communiste.

Élu adjoint au maire de Saint-Dizier en 1945, il fut conseiller municipal de la Libération à 1965. Maire de 1971 à 1989, il fut aussi membre du conseil d’administration de l’OPHLM de la cité bragarde en 1971 et le présida à partir de 1974, ainsi que le CA du centre hospitalier entre 1971 et 1978.

Élu conseiller général à Saint-Dizier en septembre 1945, il devint vice-président du conseil général, mais échoua aux cantonales de mars 1949. Il retrouva son siège de conseiller général de Saint-Dizier en juin 1961, le conserva en 1967, 1973 et 1979.

Au niveau national, il fut membre des deux Assemblées constituantes. Réélu député en novembre 1946, il fut nommé juré de la Haute-Cour de justice en mai 1948. Ses interventions à l’Assemblée nationale le firent apparaître comme le porte-parole de la Fédération CGT des Cheminots. Battu aux législatives de 1951, il fut réélu en janvier 1956 et vota contre la confiance au général de Gaulle en juin 1958. À nouveau battu aux élections de novembre 1958, il ne fut plus député, malgré plusieurs candidatures, notamment en novembre 1962, mars 1967 et juin 1968.

Personnage clef de la vie politique haut marnaise, il fut décoré de la médaille départementale et communale en argent en 1972, de vermeil en 1981, puis d’or. Titulaire de la carte du combattant volontaire de la Résistance et de celle du combattant, la Légion d’honneur lui fut remise en 1984 par le ministre des Transports Charles Fiterman. Il devint chevalier des Palmes académiques la même année.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article18847, notice CARTIER Marius, Alexandre par Gilles Alvès, version mise en ligne le 25 octobre 2008, dernière modification le 7 juin 2010.

Par Gilles Alvès

Assemblée nationale, Notices et portraits, 1946
Assemblée nationale, Notices et portraits, 1956

SOURCES : Arch. Dép. Haute-Marne, 1 J 383, 494 W 11974, 819 W 26315, 26460, 26363, 1090 W 60. — Arch. Fédération CGT des Cheminots. — Arch. comité national du PCF, questionnaires autobiographiques, 29 juin 1946 et 10 avril 1951. — Comptes rendus des congrès fédéraux. — La Haute-Marne syndicaliste, juillet 1960, janvier, juillet et décembre 1961. — « La vie de la Haute-Marne », L’Humanité Dimanche, 25 février, 19 mai 1968. — La Haute-Marne libérée, 2 janvier 1993. — L’Humanité, 23 janvier 1989, 1er janvier 1993. — J.-M. Chirol, La Haute-Marne politique de 1945 à 1967, 1968, dactyl. — DPF, 1940-1958, op. cit. — Notice DBMOF. — Notes de Jean-Pierre Bonnet. — Entretien avec Georges Savary, 27 février 1998, et avec Michel Prost, 27 mars 1998.

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