JEANNE Louis Jean [Dictionnaire des anarchistes]

Par Dominique Petit

Né le 8 juillet 1863 à La Bonneville (Manche), tailleur d’habits, militant anarchiste au Havre, bagnard.

En décembre 1893, Louis Jeanne habitait 11 rue du Collège. Selon un rapport de police, son domicile servait lieu de rencontre pour les militants anarchistes de la ville. En effet, jusqu’en mars 1893, les anarchistes havrais avaient un local, situé 11 rue Saint Julien où ils se réunissaient en soirée amicale tous les jeudis, mais après le mois de mars les annonces de réunions ne parurent plus dans le Père Peinard.
À cette époque plusieurs perquisitions avaient été faites chez les anarchistes du Havre mais aucune n’avait permis de découvrir des lettres compromettants. Leur courrier était surveillé.
Le 24 décembre 1893, pendant que les époux Ferrand se trouvaient à la messe de minuit, des cambrioleurs s’introduisirent par escalade dans leur domicile, rue des Protestants. Ils s’emparèrent de titres, de 3 montres en or, d’un service de couverts en métal et d’une paire de boutons en argent, représentant une valeur de 16.800 francs .
Lors d’une série de 11 perquisitions, effectuée le 1er janvier 1894 au Havre (dans le cadre d’un vaste coup de filet au niveau national), chez Jeanne, le commissaire Sadoulet, saisit dans la paillasse du lit, les titres volés chez les époux Ferrand. Jeanne déclara qu’il les avait trouvé près de la Banque de France.
La perquisition fit aussi découvrir des journaux anarchistes : plusieurs numéros du journal Le Révolté, la collection complète du Père Peinard, trois lettres faisant l’apologie de Vaillant et une liste de souscription pour le 2e numéro de la brochure à distribuer. Il y avait également plusieurs lettres de François Heudier, ouvrier voilier, complice du vol et également militant anarchiste au Havre, parlant de distribution de brochures et de propagande.
Pendant la perquisition, le femme de Jeanne s’écria : « Vous avez beau en arrêter, des anarchistes, il en restera encore ! » et tirant les rideaux d’un lit où reposaient ses deux enfants, elle ajoutait : « Tenez, en voilà deux qui poussent ! »
Jeanne et Heudier furent arrêtés et comparurent devant la cour d’assises de Seine-Inférieure le 31 mai 1894, Jeanne fut condamné à 5 ans de travaux forcés et Heudier à 4 ans de prison.
Jeanne purgea sa peine au bagne de Guyane, sous le matricule 26732/7868/4731. Il y rencontra Liard-Courtois, à Saint-Joseph, après le procès de la révolte des anarchistes. Ils se retrouvèrent dans la même case, l’administration pénitentiaire ayant décidé de regrouper les anarchistes.
Une fois libéré, il s’installa comme tailleur sur les Îles du Salut. Liard-Courtois fut libéré quelques jours après et vécut quelque temps avec lui.
Il fut réhabilité en 1908. Il était marié.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article188657, notice JEANNE Louis Jean [Dictionnaire des anarchistes] par Dominique Petit, version mise en ligne le 15 janvier 2017, dernière modification le 26 juillet 2021.

Par Dominique Petit

SOURCES : Arch. Nat. F7/12504, F7/12508, BB18/6449 — ANOM COL H 614 — Journal de Rouen 29 décembre 1893 et du 2 janvier 1894 — Le Petit journal 3 janvier 1894 — L’Univers 2 juin 1894 — Le Temps 1er juin 1894 — Journal des débats 1er juin 1894 — Père Peinard n°207 du 5 mars 1893 — Souvenirs du bagne par Liard-Courtois. Les Passés simples 2005 p. 157, 187, 389.

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