Par Olivier Neveux
Né le 24 juillet 1918 à Paris, mort le 20 octobre 1985 à Paris ; acteur, auteur, chanteur et interprète libertaire.
Né à Paris, fils de médecin, Jean-Roger Caussimon vécut d’abord à Bordeaux (Gironde) où il fit ses études secondaires. Se passionnant très tôt pour le théâtre, il y reçut une formation de comédien (il obtint un premier prix de comédie à dix-sept ans), puis gagna Paris où il fut admis au conservatoire.
Mobilisé lors de la Seconde Guerre mondiale, il fut prisonnier en Allemagne jusqu’à la fin 1944. De retour en France, il fut engagé par le metteur en scène Charles Dullin. Comédien, il eut une intense activité dans les cabarets et joua aussi sous la direction de metteurs en scène importants, comme Jean Mercure ou Roger Planchon et intégra un temps la troupe des « Grenier-Hussenot ». Il composa par ailleurs les chansons françaises pour la création en 1962 de Frank V de F. Dürenmatt. Parallèlement à sa carrière théâtrale, faite de hauts et de bas, Caussimon joua dans de nombreux films dont certains de Marcel Carné, Jean Renoir, Claude Autant-Lara ou Jean Yanne. Mais c’est comme parolier, puis interprète de chansons qu’il fut principalement (re)connu.
Dès 1945, Caussimon se produisit en effet au cabaret le Lapin Agile. Découvert, grâce à un enregistrement vinyl, par Léo Ferré qui décida de mettre en musique ses poèmes, Caussimon devint ainsi parolier. Il écrvit alors de nombreuses chansons qui devinrent des textes du répertoire de Ferré. Par la suite, Caussimon fut aussi interprété par Catherine Sauvage, Serge Gainsbourg, Cora Vaucaire mais aussi par Julien Clerc, Philippe Léotard ou le chanteur belge Arno. Car nombre de ses chansons appartiennent désormais au répertoire de la chanson française à texte : Monsieur William, Comme à Ostende, Le Temps du Tango... Un premier recueil de ses poèmes a paru en 1967 chez Seghers, préfacé par Léo Ferré, dans la collection « Poètes d’aujourd’hui ». En 1971, Caussimon donna son premier récital au Théâtre du Vieux-Colombier après avoir enregistré en 1970 son premier album (sur des musiques de Léo Ferré), qui obtint le prix « Paul Gilson » de l’académie Charles Cros. Il se produisit alors régulièrement sur scène, par exemple au Caveau de la République, puis au Théâtre de la Renaissance (1977) ou au Théâtre de la Ville (1978), et enregistra cinq autres albums.
Auteur provocateur, anarchisant, qui n’hésitait pas à défier les règles du métier (« Ne chantez pas la Mort, c’est un sujet morbide [...] / Les gens du show-business vous prédiront le bide », Ne chantez pas la mort), Caussimon, aux côtés de textes sur l’amitié (Mon camarade), l’amour (Nous deux), célèbra la jeunesse révoltée et incorruptible dans Les Cœurs purs en 1959 (« Ils ne sont pas encore amis / Des notaires et des notables / [...] Ils ne sont pas encor salis / Par les combines au jour le jour... / Mais on leur dit que ça viendra / Et, bien sûr, ils ne le croient pas / Les cœurs purs ») ou, à l’issue du film qu’il tourna avec Bertrand Tavernier, Le Juge et l’Assassin (1976), l’esprit de la Commune (La Commune est en lutte). Quelques textes sont plus directement engagés dans le présent comme Le Gauchisme à la mode où il endossait le qualificatif dénigrant (« Je fais du gauchisme à la mode / Mais que fait ce pouvoir d’argent/ Qui prend souci de pauvres gens/ Mais juste en certaine période ») ou dans Si vis pacem qui défend drôlement le pacifisme (« "Si vis pacem... para bellum !"... / Que la formule est élégante / C’est grand, c’est triste mais c’est beau ! / moi j’en ai fait une variante : / "Si vis pacem... pars à vélo !" »). En 1985, Ferré enregistra neuf chansons de Caussimon. Le disque s’intitulait Léo Ferré chante Jean-Roger Caussimon - Les Loubards. Les paroles intimistes n’en délaissaient pas pour autant la charge sociale, critique lorsqu’il interrogeait Comment ça marche ? « un juge, un flic, une multinationale » ou révoltée devant Les spécialistes : « T’as des opinions / Et des convictions / Tu tiens à les dire aux autres / [...] Fais pas ça, copain / faut laisser fair’ les spécialistes ».
Jean-Roger Caussimon mourut d’un cancer en 1985.
Par Olivier Neveux
ŒUVRE : L’intégrale des albums de J.-R. Caussimon a été réédité au Chant du monde par Saravah. — Mes Chansons des Quatre Saisons, Bordeaux, Le Castor Astral, 1994. — La Double vie : mémoires, Bordeaux, Le Castor Astral, 1994. — Le Vagabond d’automne : poèmes, chansons et théâtre, Bègles, Le Castor Astral, 2003.
SOURCE : Jean-Roger Caussimon, La Double vie..., op. cit..