DESCAMPS Édouard, Eugène

Par Jean Limonet

Né le 13 septembre 1916 à Divion (Pas-de-Calais), mort le 3 mai 1974 à l’hôpital Bichat à Paris (XVIIIe arr.) ; employé de banque à BNCI ; adhérent à la CFTC puis CFDT ; secrétaire général du syndicat chrétien du personnel des banques de la région parisienne (1951) ; secrétaire général adjoint, puis secrétaire général de la fédération française des syndicats de banques et établissements financiers (1954-1972) ; conseiller technique auprès de la fédération ; membre du conseil confédéral (juin 1959-1963).

Originaires du bassin minier de Loos-en-Gohelle dans le Pas-de-Calais, les parents d’Édouard Descamps exerçaient la profession de mineur et de femme de ménage. Dernier enfant d’une fratrie de quatre (trois garçons et une fille), il échappa à la condition de mineur, car sa famille déménagea à Saint-Ouen (Seine, Seine-Saint-Denis) au moment il achevait sa scolarité. Il fut alors employé comme liftier au siège de la Banque nationale pour le commerce et l’industrie (BNCI devenue BNP) à Paris, alors qu’il n’avait pas quatorze ans. Il y fut ensuite employé de bureau. À cette même période, il prit contact avec la Jeunesse ouvrière chrétienne (JOC), puis adhéra à la Ligue ouvrière chrétienne (LOC).

À la déclaration de la Deuxième Guerre mondiale, Édouard Descamps fut mobilisé et participa à la bataille de Dunkerque du 21 mai au 4 juin 1940 ; il était alors caporal au 2e génie d’infanterie. Comme 35 000 Français, il fut prisonnier de guerre et interné en France dans un Frontstalag. Muni de faux papiers qu’il avait fabriqués lui-même, il se fit passer pour infirmier. Il put ainsi être libéré en juillet 1940 et échapper à la déportation en Allemagne.

Édouard Descamps retrouva alors l’emploi à la BNCI et participa activement aux Équipes d’entraide ouvrière qui portaient secours aux sinistrés des nombreux bombardements, en particulier à Saint-Ouen. Ce fut dans ce cadre qu’il rencontra Marcelle Leblanc, militante de la JOCF, qui devint son épouse le 15 mai 1943.

Adhérent à la CFTC, au sein de son entreprise, Édouard Descamps prit ses premières responsabilités syndicales, à la BNCI. Il fut élu secrétaire général du syndicat chrétien du personnel des banques de la région parisienne. Il engagea alors un débat lors de l’assemblée générale réunie le 28 novembre 1951. Ce débat portait sur sa volonté de voir se renforcer l’union et la cohésion entre tous les adhérents CFTC de la profession bancaire. Cette volonté rejoignait certains débats internes confédéraux, engagés par des dirigeants de la minorité, pour réaliser l’unité des salariés d’une même branche et dans un même syndicat professionnel. Les adhérents du syndicat émirent le vœu que soit créé dès que possible un syndicat national CFTC regroupant le personnel des banques pour renforcer l’efficacité de l’action professionnelle. Si cette orientation devait se réaliser, elle viendrait directement se confronter avec une structure existante au sein de la fédération des employés du commerce et de l’industrie CFTC qui réunissait qu’une catégorie de salariés de la branche bancaire.

Dès janvier 1953, Édouard Descamps assista aux réunions nombreuses entre son syndicat et le syndicat des employés et « gradés » (maîtrise et cadres) de la banque. Les travaux débouchèrent, sur la constitution d’une commission d’études de la banque, composée de Georges Blootacker, Marcel Dromer, Lesoin, Henri Mantrand, Roger Mayran, Roberty, Aymé Roudil, Maurice Rouxel et d’Édouard Descamps. Cette commission avait comme objectif de construire des propositions devant être présentées à l’ensemble des syndicats CFTC de la banque, pour consultation, en vue de constituer une fédération nationale de la banque, autonome et rassemblant tous les adhérents de la branche dans une organisation fédérale distincte de la fédération française des syndicats chrétiens employés techniciens, agents de maîtrise (FFCETAM-CFTC.) La commission d’études se réunit aux journées nationales de la banque les 28 et 29 novembre 1953 et décida de consulter les divers syndicats de province de la banque sur la création rapide d’une fédération professionnelle distincte de la fédération des employés, et de provoquer en fonction des réponses obtenues, une assemblée générale constitutive. Cette décision accompagnée des projets de statuts fut adressée aux syndicats le 19 décembre1953 par les huit membres de la commission. La fédération des employés, informée de la décision et du projet de statuts, refusa les conclusions le 13 mars 1954, entraînant une rupture des échanges entre les deux structures.

En quelques mois, et après les consultations réalisées, les huit membres de la commission préparèrent la mise en place d’un congrès constitutif d’une fédération. Édouard Descamps fut chargé de trouver le local et le matériel nécessaire. Le congrès constitutif de la fédération se tient le 24 avril 1954 au siège de la CFTC à Montholon à Paris. L’article 1 des statuts de la nouvelle fédération, puis l’ensemble des statuts furent adoptés par 90,96 % des mandats. Les membres du bureau fédéral, au nombre de 16, en nombre égal entre région parisienne et province, furent élus, puis ceux-ci élurent le bureau : président, Henri Mantrand de Paris ; deux vice-présidents, Georges Blootacker de Lille et Maurice Rouxel de Paris ; secrétaire, Roger Mayran de Paris ; secrétaire adjoint, Aymé Roudil de Grenoble ; trésorier, Marcel Dromer de Paris ; trésorier adjoint, Prigent de Paris. Le bureau fédéral proposa ensuite à la ratification du congrès, Jean-Marie Vivicorsi, comme secrétaire général permanent, et Édouard Descamps comme secrétaire général adjoint, non permanent ; ceux-ci furent élus et mandatés par le congrès et membres de droit au bureau fédéral. Par ailleurs Alexandre Pernot fut élu président d’honneur de la fédération. Lors de la désignation des responsables de région, Édouard Descamps fut aussi élu pour la région de Paris. Vivicorsi et lui furent également nommés membres aux commissions fédérales, conformément aux statuts.

À la réunion du bureau fédéral, le 15 mai 1954, Édouard Descamps précisa qu’il n’était pas question de trouver une formule de compromis pour que la fédération soit homologuée par la confédération. Il rappela que le syndicat parisien avait avancé des finances et que le fonds d’organisation confédéral devait intervenir pour soulager les dépenses et que la fédération devait être obligatoirement homologuée. Ce fut lors des travaux de la réunion du conseil confédéral du 11 juillet 1954 que l’affiliation de la fédération de la banque fut adoptée. Un bureau à Montholon fut réservé pour la Fédération française des syndicats des banques établissements financiers et caisse d’épargne (employés et gradés) avec Jean-Marie Vivicorsi comme secrétaire général permanent.

Au congrès fédéral des 2 et 3 avril 1955, Édouard Descamps fut rapporteur sur l’action professionnelle et reconduit secrétaire général adjoint. Par la suite, entre les deux congrès, Édouard Descamps fut élu en janvier 1956 secrétaire général, succédant à Jean-Marie Vivicorsi. Au congrès fédéral suivant des 21-22 avril 1956, il présenta le rapport et fit les réponses sur l’action professionnelle et le bilan d’une année d’activités, en particulier sur les salaires et les abattements par zone, le retour aux 40 heures, et les relations avec l’Association professionnelle des Banques (APB). Reconduit dans ses responsabilités de secrétaire général, Édouard Descamps poursuivit ses efforts pour faire reconnaître que les cadres sont normalement du ressort de la fédération. Dans la préparation du congrès des 26-28 avril 1957, il obtint sur sa demande une représentation et une intervention confédérale de Gérard Espéret. Il prépara une modification statutaire de la fédération afin d’organiser les congrès tous les deux ans au lieu des congrès annuels. Le congrès extraordinaire des 13-14 décembre 1957, adopta cette proposition. Au congrès suivant, en avril 1959, Édouard Descamps, Maurice Rouxel et Aymé Roudil présentèrent le rapport général et Édouard Descamps fut élu secrétaire général et Henri Mantrand président. Aux congrès fédéraux suivants, de 1961, 1963, 1965, l’équipe dirigeante fut reconduite et Édouard Descamps réélu secrétaire général.

Ce fut en pleine période du mouvement des étudiants et de la mobilisation des salariés que le congrès fédéral tint ses assises les 8, 9, 10 mai 1968 à Bordeaux. Une résolution fut adoptée en solidarité avec les étudiants et avec un appel aux salariés de la banque de se mobiliser dans leurs établissements. Le bureau fédéral fut largement reconduit avec Édouard Descamps secrétaire général, Henri Mantrand président et Daniel Mignot nouveau membre responsable du Comité central d’entreprise du Crédit Lyonnais. Dès le 13 mai 1968, de nombreux employés des banques participèrent aux manifestations, et des grèves démarrèrent dans toutes les localités. Le 17 mai, avec Édouard Descamps, se tint une commission nationale paritaire au cours de laquelle les organisations syndicales rappelèrent les revendications communes. Le 20 mai, la grève se développa à l’ensemble de la profession, 45 000 employés de banques se mirent en grève. Le 27 mai, les quatre organisations composant le comité national de grève déposèrent auprès de l’Association professionnelle des banques (APB), un mémorandum revendicatif. Le 4 juin l’APB répondu quelle n’irait pas plus loin, par contre des négociations décentralisées s’engagèrent au sein de chaque groupe bancaire.

Au congrès fédéral extraordinaire de Paris les 4, 5, 6, février 1970, une nouvelle modification statutaire fut adoptée. Les postes de président et vices-présidents furent supprimés et remplacés par la responsabilité de secrétaire général et de deux secrétaires généraux adjoints. Les membres du bureau fédéral furent également largement renouvelés. Édouard Descamps fut élu secrétaire général, Daniel Mignot, ancien du bureau depuis 1968 et Georges Bégot, ancien membre du conseil depuis 1968, furent élus secrétaires généraux adjoints, Henri Mantrand ancien président fut élu trésorier et Jean-Pierre Moussy, nouveau membre, fut élu dans un bureau de neuf membres.

La préparation du congrès fédéral de février 1972 à Paris s’appuya sur deux axes principaux. L’un portant sur l’évolution de la profession et la stratégie syndicale, l’autre sur le renouvellement des dirigeants fédéraux. Lors de la réunion du conseil fédéral de septembre qui rappela que les deux secrétaires adjoints avaient été mis en place au dernier congrès dans la perspective du remplacement du secrétaire général, et après vérification auprès d’eux, le bureau fédéral réunit les 2 et 3 décembre 1971, décida de proposer Georges Bégot comme le candidat à la responsabilité de secrétaire général au congrès de 1972. Le congrès extraordinaire du 9 février au matin porta sur une demande de modification des statuts, qui fut adoptée, puis les travaux du congrès ordinaire des 9, 10, 11 février s’engagèrent sur des analyses concernant l’évolution de la profession et la stratégie syndicale, et une nouvelle équipe dirigeante fut élue. Georges Bégot fut élu secrétaire général, avec deux secrétaires généraux adjoints, Daniel Mignot et Jean-Pierre Moussy, Jean-Pierre Gérard, trésorier, et cinq membres, Antoinette Langlois, Michel Rachet, Robert Vernet, Régine Vidal, Désiré Vincensini.

Édouard Descamps fut chargé des responsabilités de conseiller technique de la fédération à la sortie du congrès fédéral de février 1972. Quelque temps après, la maladie l’empêcha de poursuivre ses activités. Il mourut le 3 mai 1974.

Tout au long de ses mandats fédéraux, Édouard Descamps avait pris une place importante dans les responsabilités confédérales entre 1959 et 1963. Il avait été désigné membre du conseil confédéral de la CFTC, lors du congrès des 19-21 juin 1959 à Issy-les-Moulineaux au nom de la Fédération des syndicats de la banque, établissements financiers. À ce même congrès le président confédéral, Maurice Bouladoux et Georges Levard, secrétaire général, avaient été reconduits dans leurs responsabilités respectives. Édouard Descamps, avait été réélu au conseil confédéral lors du congrès des 1er-4 juin 1961, Aymé Roudil était devenu son suppléant. Maurice Bouladoux poursuivait ses responsabilités comme président, et Eugène Descamps avait été élu pour son premier mandat de secrétaire général confédéral. À l’issue du congrès confédéral de juin 1963, Édouard Descamps n’étant plus membre du conseil confédéral avait consacré ses engagements syndicaux à la fédération, sachant que celle-ci, n’était plus représentée. Cependant, un nouveau membre, René Routhier avait été élu au nom de la fédération des syndicats des finances et il avait fallu attendre le congrès confédéral de novembre 1967 pour que Roger Lorin ait été élu au conseil confédéral au nom de la Fédération des Banques, établissements financiers et Caisse d’épargne. Parallèlement à son activité syndicale, Édouard Descamps fut administrateur à l’Office d’HLM de Saint-Ouen, représentant le préfet de la Seine-Saint-Denis.

Édouard Descamps eut trois enfants, Marie-Thérèse, née le 24 octobre 1944, Pascal, né le 2 avril 1952 et Jean-Luc, né le 3 septembre 1956. Ce dernier a été technicien de contentieux à l’URSSAF de Paris, co-secrétaire de sa section syndicale, puis secrétaire général adjoint du syndicat parisien des agents de la sécurité sociale. Il est devenu ensuite secrétaire général de l’Union départementale CFDT de la Seine-Saint-Denis de 1991 à 1996, puis permanent à l’Union régionale interprofessionnelle de l’Ile-de-France jusqu’en 2018.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article190938, notice DESCAMPS Édouard, Eugène par Jean Limonet, version mise en ligne le 28 mars 2017, dernière modification le 23 juillet 2022.

Par Jean Limonet

SOURCES : Archives confédérales CFTC-CFDT ; archives interfédérales CFTC-CFDT. — Archives personnelles d’Édouard Descamps ; interviews de la famille entre janvier et mars 2017. — Interviews et notes de Jean-Pierre Moussy, Daniel Mignot, Georges Bégot, de février à avril 2018. — Interviews complémentaires de la famille par Jean-Luc Descamps, janvier, février, mars 2018.

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