HERVET Anselme

Par Jean-Luc Labbé

Né le 21 avril 1862 à Massay ou Gracay (Cher) ; cordonnier à Saint-Pierre-de-Jards (Indre) ; militant socialiste (POF puis PSU) ; maire de Saint-Pierre-de-Jards de 1896 à 1908.

Originaire du Cher, dans un village peu éloigné de Saint-Pierre-de-Jards, Anselme Hervet se maria avec Marie Genest, dont le père Jean était artisan charron dans cette commune rurale du nord-est du département de l’Indre. En même temps qu’il se mariait (en 1885 ou 86), il s’installait cordonnier avec l’aide de son beau-père. Le couple donna naissance en 1887 à Hélène.
Anselme Hervet fit l’objet d’un rapport de gendarmerie, daté du 28 septembre 1894 : « Il lit assidûment les journaux socialistes, notamment La Petite République. Il n’est pas étranger à la grève qui a éclaté le 4 mai dernier dans les bois de Saint-Pierre-de-Jards. Il s’est mis en relation avec Giraudon de Vierzon, secrétaire du syndicat des bûcherons du Cher qui est venu engager les bûcherons de Saint-Pierre à se constituer en syndicat » (Source Arch. Dép. Indre M3519).
Deux ans plus tard, en 1896, il devenait à 34 ans maire de cette commune rurale de 500 habitants. Jules Sauget devint son adjoint. Hervet fut élu également, pour un seul mandat, conseiller d’arrondissement du canton de Vatan. En 1898, il prit une part active à la campagne électorale de Jacques Dufour (maire d’Issoudun élu député) et écrivait régulièrement des articles dans Le Prolétaire du Centre comme celui daté du 29 avril 1900 qui répondait à des attaques de la droite : « Calomniez, dites ce que vous voudrez. Je suis honnête et sincère dans mon opinion. Mais ne dites pas que j’ai volé la cloche de l’église pour en faire une sonnette à mon âne. La pauvre bête ne pourrait la porter, elle est comme vous, sur sa fin ». Mais il intervenait aussi sur des enjeux importants comme l’emploi agricole dans cette période de généralisation du machinisme dans la Champagne berrichonne.
En 1903, sur fond de confrontation entre socialistes « réformistes » et « révolutionnaires », Anselme Hervet fut candidat aux élections cantonales (chef-lieu de canton : Vatan) au nom de l’U.S.R., Union socialiste révolutionnaire qui avait regroupé en 1901 les guesdistes et les vaillantistes. Les socialistes autonomes moquèrent cette candidature et appelèrent à voter pour Charbonnier, candidat radical-socialiste maire de Vatan. Ce dernier fut élu au 1er tour alors que deux candidats de droite étaient également en lice. Hervet ne fit pas un bon score sauf dans sa commune qui pesait peu démographiquement (500 habitants) et électoralement (104 votants) : il obtint 52 voix.
En 1904, il fut réélu maire avec toute sa liste et Alexandre Bigot, un cultivateur, devint son adjoint. Anselme Hervet avait favorisé l’entrée au conseil municipal de cinq journaliers agricoles ; ce qui comparativement à la quasi-totalité des autres communes rurales du département était tout à fait exceptionnel ; communes rurales où les propriétaires dominaient sans partage (liste des conseillers : Anselme Hervet cordonnier né en 1862, Alexandre Bigot cultivateur né en 1846, Etienne Mauchien cultivateur né en 1874, François Maçé journalier né en 1873, Jean Borget journalier né en 1849, François Têtenoir cultivateur né en 1836, Gaston Augé journalier né en 1878, Eugène Galon journalier né en 1879, François Beaufrère-Charbonnier journalier né en 1875 et Narcisse Morin cultivateur né en 1871). Les journaliers, qui composaient la moitié du conseil, avaient, de plus, une moyenne d’âge d’une trentaine d’années ; ce qui constituait également une particularité notable.
En 1900, Anselme Hervet dut faire face à un drame familial lorsque son fils de 20 ans, pris d’un accès de folie lors d’une soirée arrosée entre jeunes socialistes à Issoudun, poignarda l’un de ses camarades qui ne survécut pas à ses blessures.
Lors des élections municipales de 1908, et alors que les socialistes avaient conforté leur hégémonie politique, Anselme Hervet trouva face à lui une liste socialiste concurrente, celle d’un « Parti ouvrier » alors qu’il avait l’investiture du PSU. Cette liste « Parti ouvrier » était conduite par Ernest Bigot, le fils de son adjoint (Alexandre Bigot) au cours du mandant qui s’achevait. Cette division favorisa la droite qui fit élire trois conseillers au 1er tour. Les deux listes socialistes fusionnèrent pour le second tour en prenant les meilleurs candidats issus du 1er tour, candidats qui furent élus tous les sept. Anselme Hervet fut réélu conseiller municipal mais le nombre de voix obtenues donnait la place de maire à Ernest Bigot (Parti ouvrier) et la place d’adjoint à Ernest Charbonnier (PSU). Avec trois ouvriers agricoles sur sept élus socialistes, l’effort de promotion ouvrière qu’avait engagé Hervet se poursuivait, mais sans lui. Ernest Bigot, à supposer qu’il n’était pas déjà adhérent, rejoignit le PSU dont il sera le responsable cantonal jusqu’après la guerre de 14-18.
Au-delà de 1908, alors qu’il n’avait que 46 ans, la poursuite de l’activité politique d’Anselme Hervet ne trouvera plus d’occurrence dans l’historiographie du mouvement ouvrier. Le désaveu subit le poussa-t-il à se mettre à l’écart ? De 1886 à 1908, il avait puissamment œuvré à rougir les campagnes entre les deux pôles ouvriers d’Issoudun et de Vierzon.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article191127, notice HERVET Anselme par Jean-Luc Labbé, version mise en ligne le 5 avril 2017, dernière modification le 8 décembre 2022.

Par Jean-Luc Labbé

SOURCES : Arch. Dép. Indre, surveillance policière, résultats électoraux et journaux socialistes.

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