MORNET Philippe, Eugène

Par Jean-Luc Labbé

Né à Châteauroux (Indre) le 1 février 1906, mort le 28 décembre 1871 à Constantine (Algérie) ; huissier de justice à Lury (Cher) puis Saint-Benoit-du-Sault (Indre) ; démocrate condamné en 1850 et 1852 ; exilé en Angleterre ; gracié en 1857 et condamné à la prison en mars 1857, déporté en Algérie en 1858.

Né à Châteauroux d’un père marchand en 1806, huissier de justice à Lury (Cher) en 1833, il épousa Adélaïde Alexandrine Legendre en premières noces. La jeune femme décéda en 1836. Philippe Mornet se remaria le 12 août 1839 à Saint-Benoit-du-Sault (Indre) avec Jeanne Estelle Confoulant, 20 ans, fille de Louis Confoulant et de Jeanne Redaud, et soeur de Ferdinand Louis Confoulant. Militants démocrates pendant la Seconde République, les trois hommes vont avoir à faire avec la justice.

Démocrate-socialiste à Saint-Benoit-du-Sault (Indre), condamné plusieurs fois en 1848 (outrages à la gendarmerie) puis en 1849 (outrages envers le juge de paix), déchu de sa profession d’huissier, Philippe Mornet sera recherché dans les jours qui suivirent le coup d’Etat du 2 décembre 1851. En fuite, il avait rejoint l’Angleterre avant d’être condamné par contumace à la déportation en Algérie en février 1852. Il avait alors 45 ans.

Sa demande de grâce fut acceptée au début de l’année 1857. D’Angleterre, où il dut côtoyer nombre d’illustres exilés, Philippe Mornet décida de revenir en France. Le 3 mars 1897, il descendit du train en gare du nord à Paris. La suite fut racontée par plusieurs journaux, dont Le Journal des villes et des campagnes daté du 24 mars : « Un ancien huissier de département de l’Indre, le sieur Philippe Mornet, expulsé de France en décembre 1851, et gracié sans condition sur sa demande, rentrait en France le 3 mars [1857] et arrivait au débarcadère du chemin de fer du nord [à Paris]. Là, les douaniers en visitant sa malle découvraient dans un double fond ... 136 brochures politiques imprimées en français et dont l’introduction en France est prohibée. Cette découverte a amenée l’arrestation du sieur Mornet qui a comparu devant le tribunal correctionnel. Le tribunal l’a condamné à six mois d’emprisonnement, 500 F. d’amende et fixé à six mois la contrainte par corps ». Philippe Mornet avait tenté, sans convaincre, d’expliquer qu’il s’agissait d’une malle achetée d’occasion et dont il n’avait pas pas vérifié les doublures...

Ce ne fut donc que vers le début de l’automne 1857 que Philippe Mornet retrouva sa femme à Saint-Benoit-du-Sault. Sa femme dont le tribunal avait dit qu’elle était "une furie qui ne respire que le sang". Pour quelques mois seulement. Suite à l’attentant du 14 janvier 1858 par Orsini sur la personne de l’Empereur à Paris et suite à la vague de répression qui s’ensuivit, Philippe Mornet fut arrêté par la gendarmerie. Avec les Confoulant père et fils, il faisait partie d’une liste de militants de l’Indre à interpeler. Philippe Mornet fut condamné et déporté en Algérie où il décida vraisemblablement de rester après son affranchissement (vers 1860). Ce fut à Constantine qu’il décéda en décembre 1871. Sa femme Jeanne l’avait rejoint. En 1882, étant veuve, elle perçut la rente annuelle prévue dans la loi d’indemnisation des victimes politiques du Second Empire ; en cette année 1882, elle était domiciliée à Paris. Philippe Mornet, dont l’acte de décès le disait "agent d’affaires", était le beau-frère de Confoulant Ferdinand, frère de sa femme Jeanne, médecin, et qui fut lui aussi victime de la répression impériale.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article191366, notice MORNET Philippe, Eugène par Jean-Luc Labbé, version mise en ligne le 10 avril 2017, dernière modification le 29 août 2021.

Par Jean-Luc Labbé

SOURCES : B. Moreau, Marianne bâillonnée, Points d’Ancrage 2002. – Arch. Dép. Indre et Arch. Dép. Cher 2U233. – L’Echo des Marchés, octobre 1882. — État civil en ligne ANOM, CONSTANTINE 1871, acte 717. Etat civil de la ville de Saint-Benoit-du-Sault. - Base de données J-C Farcy, commissions mixtes de janvier 1852 qui confirment que Mornet était en fuite suite au coup d’Etat. Le Journal des villes et des campagnes du 24 mars 1857 pour l’arrestation de Mornet de retour d’Angleterre (Généanet et Rétronews).

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