CÉRÉDA Edmond

Par Tangi Cavalin, Nathalie Viet-Depaule

Né le 31 juillet 1919 à Trezzo sull’Adda (Italie), mort le 12 février 1985 à Marseille (XVe arr., Bouches-du-Rhône) ; fondeur, chaudronnier puis soudeur-tuyauteur ; jociste, permanent du MPF (1946-1947), membre du comité exécutif du syndicat CGT des Métaux de Marseille (1950-1952), secrétaire départemental du MLP (1951-1954), coopérateur.

Fils d’un socialiste italien qui émigra en 1921 à Marseille pour fuir le fascisme, Edmond Céréda, quatrième enfant d’une fratrie de sept, grandit dans le quartier de la Cabucelle, non loin des Raffineries Saint-Louis où son père était chargeur et déballeur. Ayant obtenu son certificat d’études primaires en 1932, il commença un apprentissage de dessin industriel qu’il dut interrompre au bout d’un an pour entrer au travail. Embauché en juillet 1933 chez Noël et Pellegrini comme apprenti chaudronnier puis, début 1934, comme manœuvre aux Établissements Savournin (chaudronnerie), il entra, après quelques mois de chômage, chez Tourchaninof où il se spécialisa dans la fonderie et la robinetterie. C’est à ce moment-là qu’il découvrit la Jeunesse ouvrière chrétienne (JOC) et devint propagandiste de son journal, Jeunesse ouvrière. Il était alors syndiqué à la CFTC.

C’est vraisemblablement le Front populaire qui l’amena à quitter la CFTC pour la CGT. Tout à la fois militant jociste et militant syndical, Edmond Céréda dut à sa participation active aux grèves de 1936, où il fut délégué du personnel, d’être licencié début 1937. Son père, qui travaillait alors aux Huileries Rocca Tassy de Roux, réussit à le faire embaucher. Il continua ses activités militantes grâce à son travail posté (3x8) qui lui permit de préparer le 10e anniversaire de la JOC (vente de fleurettes, meetings, fêtes, soirées, spectacles pour financer le voyage à Paris) auquel il participa avec des jocistes de la Cabucelle.

Mobilisé début 1940 dans l’artillerie à Valence, il se retrouva avec des réservistes de Marseille et put créer des foyers de soldats de l’Entraide fraternelle. Faisant partie de l’armée d’armistice qui le cantonna dans plusieurs endroits du sud de la France et en Algérie, il ne fut démobilisé que fin 1942. À son retour, il se maria avec Alberte Richiardi, une jociste du quartier des Crottes. En 1943, il trouva le moyen d’échapper au STO en bénéficiant, grâce à son beau-frère, d’un contrat de travail antidaté comme frappeur forgeron. Entre-temps, il avait adhéré avec sa femme au Mouvement populaire des familles (MPF) et en était rapidement devenu un militant actif, cherchant à développer des services de ravitaillement et d’entraide, notamment l’Association de travailleuses familiales qui allait compter une quarantaine de salariées.

Lorsque Marseille fut bombardée et devint ville sinistrée, Edmond Céréda fonda, au nom du MPF, avec Clément Prin-Clary et Raphaël Cicariello, l’Association des sinistrés de Marseille. Il accepta en 1946 un poste de permanent afin de mettre en place les structures nécessaires et faire en sorte que plus de 2 000 familles soient logées. Selon le témoignage de Clément Prin-Clary, « à la fin avril 1946, 24 960 sinistrés étaient recensés dans les Bouches-du-Rhône dont 4 880 sinistrés totaux. Plus de la moitié des sinistrés partiels et les trois-quarts des sinistrés totaux étaient situés à Marseille ». C’est aussi pour attirer l’attention des pouvoirs publics devant la pénurie des logements qu’il fit partie des squatters qui occupèrent des bastides ou des villas inhabitées à partir d’octobre 1946. Mais il ne se limita pas aux seuls problèmes du logement. Il participa, avec Séverin Montarello*, à la création de maisons familiales de vacances et fonda, avec Henri Bernus, en 1948, « Coopé-Sud », une coopérative de consommation qui allait vite fusionner avec « La Familiale ».

En 1949, il reprit le chemin de l’usine. Il allait, pendant onze ans, mener de front activité syndicale à la CGT et action sociale dans le cadre du MPF, puis du MLP. Embauché aux Chantiers et Ateliers de Provence, il devint en 1950 délégué du comité d’entreprise et membre du comité exécutif du syndicat des métaux de Marseille. Il était, en même temps, secrétaire départemental du MLP. Lorsque le MLP cessa ses activités, il adhéra, comme la majorité de ses amis qui avaient fait le choix du MLP et qui avaient refusé de rejoindre l’ACO, à l’UGS puis brièvement au PSU, qu’il quitta dès 1961.

Licencié en 1952, il retrouva successivement du travail comme soudeur-tuyauteur dans la pétrochimie chez Lavera-Berre, Situb (Marseille), Consip (Berre), Format-Reinier (base sous-marine) d’où il fut à nouveau licencié pour activité syndicale en 1956, et Bensa où il fut à l’origine d’une section syndicale. En 1960, les anciens responsables du MLP marseillais lui demandèrent de contribuer au développement de la coopérative « La Familiale » dont Marcel Coquillat* était le directeur. Entré comme manutentionnaire, il acquit la connaissance des différents rouages de la coopérative et devint, au bout de sept mois, inspecteur participant activement à son expansion : « Nous avons créé 41 magasins à Marseille, Aix et le département. À la fusion avec La Seyne, nous avions 74 points de vente et un chiffre d’affaire de plusieurs centaines de millions et 18 000 sociétaires. »

En 1978, il prit sa retraite, tout en continuant à être président de section de Coop-Rhône Méditerranée. Il présidait, depuis sa création en 1960, le Mouvement populaire familial et culturel (MPFC), l’Association populaire de culture et loisirs (APCL) et était administrateur de l’association « Villages clubs du soleil ». Il avait aussi adhéré, en 1975, au Parti socialiste et avait accepté d’être, en 1977, sur la liste d’Union de la gauche conduite par Gaston Defferre* dans la 7e circonscription (XIIIe et XIVe arr.).

Père de quatre enfants, Edmond Céréda avait trouvé depuis la guerre, dans la communauté missionnaire de la paroisse Saint-Louis, située dans les quartiers nord de Marseille, la possibilité de vivre ses convictions de chrétien, estimant que l’action sociale pouvait en être le prolongement. Il avait été de ceux qui avaient vivement protesté contre la suppression des prêtres-ouvriers et fait partie des responsables de la résolution adoptée le 8 février 1954, demandant à Mgr Delay de reconsidérer sa décision dans le diocèse. Sa formation de militant chrétien l’avait toujours persuadé que les laïcs devaient faire valoir leur responsabilité dans l’Église.

Son frère, Marius Céréda*, s’était fait connaître lui aussi comme militant du MPF puis du MLP à Marseille.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article19156, notice CÉRÉDA Edmond par Tangi Cavalin, Nathalie Viet-Depaule, version mise en ligne le 25 octobre 2008, dernière modification le 3 juin 2009.

Par Tangi Cavalin, Nathalie Viet-Depaule

SOURCES : CAMT, 1997015/86. — Les Cahiers du GRMF, 11, 2002 et 13, 2005. — Témoignage de Marius Apostolo, « Justice par effraction. Les squatters de Marseille et de Provence, 1946-1954 », Les Cahiers du GRMF, 7, 1992, p. 103-124. — Edmond Céréda 1919-1985, Témoignages d’amitié, brochure, sd. — Tangi Cavalin, Nathalie Viet-Depaule, « Catholiques engagés à Marseille », Les catholiques dans la République, Les Éditions de l’Atelier, 2004, p. 301-312. — Entretien et correspondance avec Sèverin Montarello, février 2006.

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