Par Frédéric Stévenot
Vingt-sept personnes, dont dix FTP venus du Pas-de-Calais et deux civils du Nord, furent exécutées à Guise, Vadencourt et Longchamps (Aisne) le 14 juin 1944, par les troupes allemandes (SS) et le Sipo-SD de Saint-Quentin.
Il y avait alors une forte présence allemande dans la région. Quelques jours plus tôt, dans la soirée du 3 juin 1944, un attentat visant un soldat (ou un officier, selon les sources) allemand fut commis à Aisonville-et-Bernoville (Aisne), à quelques kilomètres de Guise. En outre, le 10 juin 1944, des jeunes francs-tireurs et partisans (FTP) partirent du Pas-de-Calais pour rejoindre le maquis des Ardennes (peu avant le massacre des Manises, qui eut lieu le 13 juin).
Selon le site de la commune de Bourlon (Pas-de-Calais), le « 8 juin 1944 [est diffusé] Sur les ondes de la BBC, un message personnel : « Le canapé est au milieu du salon ».
Trois compagnies FTP [1], comprenant 350 hommes, font mouvement du bassin minier du Pas-de-Calais vers les Ardennes. Elles sont sous les ordres des commandants Bruno, Arthur et Tino. Leur destination finale : Revin où ils sont appelés à former un maquis destiné à se battre sur les arrières de l’ennemi.
Les jeunes dont la plupart ont moins de 20 ans prennent la route du maquis par petits groupes. Les itinéraires sont variés pour éviter les troupes de l’occupant.
Mais les Allemands sont informés de ces mouvements. C’est ainsi que le 9 juin, trois FTP sont arrêtés sur la route de Cambrai, ils avaient des pétards explosifs dans leurs musettes.
Les Allemands préparent leurs interventions et de nombreux accrochages se produisent.
Pour ce qui concerne uniquement le secteur de Guise, le massacre commença à Vadencourt-et-Bohéries, vers 5 h. du matin. Les premières victimes furent Édouard Bézeau, Raymond Virot et un inconnu. Une heure plus tard tombèrent Marcel Cavroy, Henri Legroux et le commandant « Jean », tandis que Roland Demeester et Charles Roche périssaient brûlés vif dans l’incendie de la maison Mulet, à Bohéries. Près de la gare de Vadencourt, furent abattus Serge Gentien, Jacques Lecœur et Maurice Lenfant.
Il se poursuivit à Longchamp, où Georges Lefort fut abattu, et à Guise. Vers sept heures du matin, onze personnes furent exécutées en bordure de la route de Villers-lès-Guise (Aisne), à la sortie de Guise. Le lieu est une pâture située après le « château » de Mademoiselle Godin (aussi appelé « château de Faÿ »), sur la droite en direction de La Capelle (Aisne). D’après le témoignage d’un employé de cette maison, Armand Alizard, une soixantaine de soldats SS avaient amené là deux hommes, qui furent exécutés. Les corps furent abandonnés près la clôture jusque dans l’après-midi. Il s’agissait de Pierre de Martimprey, maire d’Aisonville-Bernoville (Aisne), et Émile Borgne, de la même commune.
Vers 14 h. 30, toujours selon la même source, quatre hommes furent conduits sur les mêmes lieux, dont Henri Minet. Après qu’ils aient été obligés de creuser une fosse, ils y furent abattus. Les deux premiers cadavres du matin y furent également traînés, et le trou comblé.
Un homme blessé au bras droit, prisonnier, fut interrogé vers 15 h. 45 par la Gestapo (probablement la Sipo-SD de Saint-Quentin). Quatre hommes le furent également dans le salon du château, trois quarts d’heure plus tard, avant qu’on leur fasse creuser une nouvelle fosse. Les cinq furent abattus vers 18 h. 30.
Liste des vingt-sept victimes (ordre chronologique) :
Bézeau Édouard, Vadencourt (Bohéries), 5 h ;
Inconnu, Vadencourt (Bohéries), 5 h ;
Virot Raymond, Vadencourt (Bohéries), 5 h ;
Cavroy Marcel, Vadencourt (Bohéries), 6 h ;
Commandant « Jean », Vadencourt (Bohéries), 6 h ;
Legroux Henri, Vadencourt (Bohéries), 6 h ;
Demeester Roland, Vadencourt (ferme Mulet), 6 h ;
Roche Charles, Vadencourt (ferme Mulet), 6 h ;
Gentien Serge, Vadencourt (gare), 6 h ;
Lecœur Jacques, Vadencourt (gare), 6 h ;
Lenfant Maurice, Vadencourt (gare), 6 h ;
Oget Jules, Vadencourt (ferme Mulet), 6 h 28.
Guise René, Vadencourt (gare), 6 h 30 ;
Luthon Pauline, ép. Guise, Vadencourt (gare), 6 h 30 ;
Martimprey Pierre de, Guise, 7 h ;
Borgne Émile, Guise, 7 h ;
Lefort Georges, Longchamp, 8 h 30 ;
Maksymenko Stéphane, Guise, 9 h ;
Boulay Raphaël, Guise, 14 h 30 ;
Bucquoy Édouard, Guise, 14 h 30 ;
Williot Raymond, Guise, 14 h 30 ;
Minet Henri, Guise, 14 h 30 ;
Dubois Émile, Guise, 18 h 30 ;
Durocher Roger, Guise, 18 h 30 ;
Rousseau Marcel, Guise, 18 h 30
Salé Robert, Guise, 18 h 30 ;
Zygefrid Dominiak, Guise, 18 h 30.
Différents monuments commémoratifs ont été élevés dans les deux communes.
À Vadencourt, une plaque commémorative a été apposée sur le mur de l’ancienne abbaye cistercienne. Le texte (accompagné des photographies des victimes) indique :
« Hommage
de la population reconnaissante
aux vaillants résistants
qui, le 14 juin 1944,
ont ici lutté contre l’envahisseur
et sont tombés glorieusement
pour la défense de nos libertés
Une plaque commémorative plus récente existe près de la première :
« Hommage aux
vaillants résistants
F.T.P.
de la 2e compagnie
Morts pour la France ».
Une autre plaque a été placée dans l’église, avec les mêmes noms :
« Souvenir des héros
de Vadancourt [sic] ».
D’autres monuments commémoratifs ont été érigés dans le Pas-de-Calais.
Un monument surmonté d’une croix fut érigé à Guise, au château de Faÿ. Le texte indique ce qui suit :
« Ici ont été fusillés
par les Allemands le 14 juin 1944
Par Frédéric Stévenot
SOURCES. Site de l’Association des déportés, internés et familles de disparus de l’Aisne ; Généalogie Aisne ; La Voix du Nord ; site de la commune de Vadencourt ; site de la commune de Bourlon ; CRDP d’Amiens. — Renseignements de Jean-Marie Caudron.
ICONOGRAPHIE. Mémorial GenWeb.