Champlat-et-Boujacourt (Marne), ferme de Chantereine, 28 août 1944

Par Jean-Pierre Husson, Jocelyne Husson

À Champlat-et-Boujacourt (Marne), le monument du maquis de Chantereine se dresse au creux d’un vallon situé à l’écart du bourg, à côté des ruines de la ferme de Chantereine qui a donné son nom à ce maquis. Ce monument, lié à un épisode tragique des combats de la Libération dans la Marne, honore la mémoire de onze jeunes FFI.

Dans la région de Reims, près de Ville-en-Tardenois, un maquis s’était constitué sur le territoire du petit village isolé de Champlat où un agriculteur, Raymond Huiban, accueillait et ravitaillait des réfractaires du Service du travail obligatoire (STO) dès 1942. En mars 1944, ce dernier mit à la disposition de la résistance la ferme de Chantereine où les armes provenant des parachutages effectués sur les terrains voisins furent entreposées avant d’être réparties entre les différents groupes de résistants.

Le 25 août 1944, la centaine Davoust qui constituait la quatrième centaine formée dans le cadre du plan Paul dans la Marne, et qui était commandée par le lieutenant Pierre Demarchez, s’installa dans la ferme de Chantereine bien que celle-ci fût connue des Allemands qui y avaient perquisitionné en avril 1944. Trente-quatre containers parachutés dans la nuit du 25 au 26 août sur le terrain « Théophile Gautier » à Chambrecy (Marne), y furent entreposés. Complètement isolée, à découvert, au fond d’une cuvette entourée de bois, cette ferme constituait selon le médecin-colonel Pourcines « une véritable souricière ».

Le 26 août au matin, la centaine Davoust fut renforcée par les groupes FFI de Fismes et d’Aougny, commandés respectivement par le gendarme Gaston Raulin et par l’instituteur Jean Lambert. Ce dernier constata avec stupeur, qu’il n’y avait pas de service de garde autour de la ferme, que l’arrivée de son groupe n’avait pas été signalée, et que le plus grand désordre régnait à l’intérieur des bâtiments : matériel antichar resté dans les caisses, notices d’emploi accompagnant les explosifs égarées.
Au cours de la journée du 27 août arrivèrent individuellement ou en petits groupes des hommes et des femmes souvent très jeunes, venus offrir leurs services. Dans l’après-midi, alors que des avions allemands survolaient le site en rase-mottes, plusieurs FFI, les prenant pour des avions américains, sortirent de la ferme pour leur faire des signes d’amitié. Malgré les conseils des habitants de Champlat et du médecin-colonel Pourcines, le chef de la centaine Davoust refusa de donner l’ordre d’évacuer la ferme.

Le 28 août, la ferme de Chantereine fut survolé par un avion suspect balançant les ailes, puis aussitôt encerclée par plusieurs chars allemands et attaquée par surprise. Cette attaque provoqua la sortie précipitée sans ordre et sans armes de la plupart des occupants de la ferme qui s’enfuirent vers la forêt à travers les champs moissonnés, donc à découvert. Dix d’entre eux ont été tués et le plus jeune, Philippe COUTIEZ, avait 18 ans.

En novembre 1946, s’est constitué un Comité du souvenir du maquis de Chantereine qui prit la décision d’élever un monument sur le site de la ferme.
Ce monument, inauguré en août 1947, est constitué de trois blocs de granit.
Sur le bloc central en forme d’obélisque sont gravés le V de la victoire et une Croix de Lorraine au-dessus de l’inscription :

« Aux héros de la Libération tombés à Champlat le 28 août 1944
Patrie et Liberté -
Maquis de Chantereine ».
Sur les blocs latéraux en forme de stèle sont inscrits les noms des dix patriotes tués lors de l’attaque du maquis de Chantereine par des blindés allemands le 28 août 1944, auxquels a été ajouté le nom d’André Beuvelet tué accidentellement au maquis le 26 août 1944.

Sur la stèle de gauche :
- Louis BELLOT
- André BEUVELET
- Roger CHAUVET
- Philippe COUTIER (Philippe COUTIEZ)
- Robert GUILHEN (Robert GUILLEN)
- Marcel JAZERON

Sur la stèle de droite
- André LEBEAU (André LEBEAUX)
- Georges PATÉ
- Bernard PETITHOMME
- Henri SALMON
- André THOMAS

Le monument qui se dégradait, a été entièrement restauré en 2016, et à cette occasion, les erreurs concernant l’orthographe des noms de Philippe COUTIEZ et de Robert GUILLEN ont été corrigées.

Chaque année, le dernier dimanche d’août, une cérémonie commémorative des combats du maquis de Chantereine se déroule devant le monument à l’initiative du Comité du souvenir du maquis de Chantereine.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article193711, notice Champlat-et-Boujacourt (Marne), ferme de Chantereine, 28 août 1944 par Jean-Pierre Husson, Jocelyne Husson, version mise en ligne le 10 juillet 2017, dernière modification le 18 juin 2020.

Par Jean-Pierre Husson, Jocelyne Husson

Le site de la ferme de Chantereine
Le site de la ferme de Chantereine
L'inauguration du monument en août 1947
L’inauguration du monument en août 1947
SOURCE : Mairie de Champlat-et-Boujacourt
Le monument du maquis de Chantereine</br>à Champlat
Le monument du maquis de Chantereine
à Champlat
« Aux héros de la Libération
tombés à Champlat le 28 août 1944
Patrie et Liberté
Maquis de Chantereine »
Stèle de gauche
Stèle de droite
Le monument restauré en 2016
Le monument restauré en 2016
Commémoration du 28 août 2016
Commémoration du 28 août 2016
SOURCE : 
Photos Jean-Pierre et Jocelyne Husson

SOURCES : Arch. CH2GM-51, Rapport détaillé sur les événements qui se sont déroulés à la ferme de Chantereine rédigé par Jean Lambert. – Arch. mun. Reims, Fonds Marquet, 9S1. – Exposition en mairie de Champlat et Boujacourt, mai 2016. – (Médecin-colonel), Le maquis de Champlat (1942-1944) - Combat de Chantereine (28 août 1944), Reims, Matot-Braine, 1945. – Jean-Pierre et Jocelyne Husson, " La mémoire de la 2e guerre mondiale à Champlat ", in La Résistance dans la Marne, dvd-rom, AERI-Fondation de la Résistance et CRDP de Reims, 2013. – Jean-Pierre Husson, " Le monument de la ferme de Chantereine à Champlat ", site Internet Histoire et mémoires des deux guerres mondiales en Champagne, CRDP-Académie de Reims.

rebonds ?
Les rebonds proposent trois biographies choisies aléatoirement en fonction de similarités thématiques (dictionnaires), chronologiques (périodes), géographiques (département) et socioprofessionnelles.
Version imprimable