COLIN Raymond, Marcel

Par Daniel Grason

Né le 19 décembre 1908 à Boulogne-sur-Seine (Seine, Hauts-de-Seine), mort le 22 février 1996 à Binic arrondissement de Saint-Brieuc (Côtes-du-Nord, Côtes-d’Armor) ; tourneur sur métaux, mécanicien ; militant communiste et syndicaliste CGT ; résistant ; maire-adjoint communiste de Gennevilliers.

Fils de Henri [Marie, Henri, Augustin], mécanicien et de Jeanne Varland, Raymond Colin travailla comme tourneur sur métaux chez Laffly à Asnières (Seine, Hauts-de-Seine). Il épousa le 8 octobre 1927 Renée, Gabrielle Ibamounou en mairie de Clichy-la-Garenne. Ils eurent un fils Claude né le 20 mars 1928.
Avec son père Henri et son frère Roger dans l’atelier du 28 rue Héloïse-Isabelle Michaud à Gennevilliers, il fabriqua des moteurs à la demande. Raymond Colin et son frère participèrent à des courses automobiles, Raymond remporta le Bol d’Or en 1931 avec un moteur de 1000 cm3 Colin. Les courses automobiles et la fabrication de moteurs s’arrêta en 1934, Raymond Colin reprit son métier de tourneur chez Laffly.
Son père Henri fut élu sur la liste de Jean Grandel en 1934, Raymond Colin travailla à la mairie de Gennevilliers. Le 26 septembre 1939 par décret-loi le gouvernement interdisait le Parti communiste. Le 28 septembre 1939, le commissaire d’Asnières perquisitionnait un local occupé par la section locale du Parti communiste au 64 rue Jean-Jaurès à Gennevilliers. Jean Grandel, maire de la ville sur sa demande accompagna les policiers, un serrurier requit ouvrit la porte. Furent notamment saisis des portraits de Jacques Duclos, Maurice Thorez, Paul Vaillant-Couturier et Marcel Cachin ; un drapeau rouge au nom du « Parti communiste Gennevilliers centre » ; 2 330 brochures et livres. Chaque publication était gardée en cinq exemplaires sous scellés, les autres exemplaires furent détruits dont Fils du Peuple de Maurice Thorez, L’Histoire du Parti Bolchevik, « Pour un Gouvernement de salut public », France-Monde, etc.
Le maire Jean Grandel était bien imprudemment venu à Gennevilliers en juillet 1940. En application d’une directive de la direction clandestine du Parti communiste, quelques maires communistes de la région parisienne entendaient se mettre au service de leurs administrés. Le 26 juillet 1940 il se fit éconduire de la mairie, il rejoignit son domicile rue Claude-Bernard dans la Cité jardins. Il y avait deux accès à son pavillon, Raymond Colin et Marcel Lamour qui l’accompagnaient lui conseillèrent de s’éclipser par la rue des Chevrins, ce qu’ils firent. Jean Grandel resta, et a été interpellé par un inspecteur de la police judiciaire. Interné, il a été fusillé comme otage le 22 octobre 1941 à Châteaubriant (Loire-Inférieure, Loire-Atlantique).
En août 1940, Raymond Colin assista à une réunion clandestine dans l’île de la Jatte à Neuilly (Seine, Hauts-de-Seine). Gabriel Péri, ex. député communiste d’Argenteuil-Bezons, journaliste à l’Humanité y prenait la parole.
D’après une enquête policière du commissariat d’Asnières du 21 octobre 1940, Raymond Colin était soupçonné de distribuer des tracts de l’organisation clandestine avec François Saladini qui tenait un café 33 rue Hippolyte-Marsaud à Gennevilliers.
Les 4 et 5 décembre 1940 deux militants communistes ont été interpellés. Interrogés ils citèrent Raymond Colin comme l’un des dirigeants de l’organisation clandestine.
Le 4 février 1941 et le 12 avril 1941 un juge d’instruction délivra un mandat d’arrêt contre Raymond Colin pour « propagande clandestine ». Le 28 avril 1941 la 12e Chambre correctionnelle le condamna par défaut à trois ans de prison.
Raymond Colin fut le responsable de la région P3, selon Roger Linet, il aurait participé à la destruction du transformateur électrique chez Lavalette avenue Michelet à Saint-Ouen (Seine, Seine-Saint-Denis). Jean Baillet le chargea avec Marcel Paul d’essayer des plaquettes inflammables sur les bords de Seine, essai non concluant. Baillet aurait essayé dans sa cuisine dans le quartier Clignancourt dans le XVIIIe arrondissement, le lieu flamba. Jean Baillet aurait quitté précipitamment sa planque.
Toujours selon Roger Linet : « Interpellé par des policiers en février 1941, Raymond Colin se serait sauvé de l’automobile dans un virage. Il s’agrippa à la plateforme d’un autobus qui roulait en sens inverse. « Le receveur lui criait : « Vous êtes fou ! Vous auriez pu vous tuer ! » Raymond lui répondit : « Je descends au prochain arrêt, justement pour ne pas être tué, car j’ai les flics au cul. Je suis un militant, ils veulent m’arrêter !... » Quelques temps après, il apprenait qu’un tribunal l’avait condamné à mort ! Mais il courait encore… » Ces faits n’ont pas été confirmés ni dans les archives nationales ni dans celles de la préfecture de police.
Selon Sonia Colin : « Mon grand-père nous a raconté : "Interpellé, mis dans une voiture de police, je me suis sauvé dans un virage. J’ai sauté dans la rue quand un bus est passé en sens inverse ; je me suis agrippé à la plateforme et pu me glisser à l’intérieur. L’employé avait ôté la chaîne de sécurité, tout en me criant : "Vous êtes fou ! Vous auriez pu vous tuer !" Je savais que j’avais moins de risque de me tuer en sautant dans ce bus qu’en restant avec la police, je lui ai juste répondu : "Pas le choix ! Je descends au prochain arrêt, justement pour ne pas être tué !..." La plateforme était pleine de gens qui se sont mis immédiatement entre moi et la route. J’étais invisible. Les hommes armés ne pouvaient tirer." Son regret : ne pas avoir eu l’occasion de remercier le contrôleur du bus. »
Au cours de l’enquête concernant l’activité de militants communistes de Gennevilliers, selon les déclarations des militants communistes interpellés Raymond Colin avait remis des tracts à André Bourgogne, demandé à Jacinto Jimenez-Martin de distribuer des tracts de l’organisation, d’avoir en compagnie de Camille Ronce sollicité Hippolyte Génard qui accepta, il rencontra également avec René Sevi, Jean Gourdoux.
Toujours avec René Sevi, Raymond Colin tint une réunion chez Yvonne Collet sœur d’Eulalie Nicolas avec la femme Ferrer, Adèle Ribon et Marie-Louise Pempoulo.
Les policiers concluaient : « Le nommé Colin prend figure d’un des organisateurs de la propagande communiste dans la Région Paris-Ouest, il vit actuellement dans l’illégalité et son refuge n’a pu être découvert. » La 12e Chambre correctionnelle le condamna par défaut le 28 avril 1941 à trois ans de prison pour infraction au décret-loi du 26 septembre 1939.
Raymond Colin a été membre du triangle de direction des FTP de la région P3 (Paris Nord) de la Région parisienne avec Gaston Carré et Roger Linet. Il participa en juillet 1941 au sabotage d’une voie ferrée à Épinay-sur-Seine (Seine, Seine-Saint-Denis).
Par mesure de sécurité, la direction du Parti communiste clandestin muta Raymond Colin en province en septembre 1942, dans les Hautes-Pyrénées (Pyrénées-Atlantiques). Combattant FFI, il aurait participé à la libération de Tarbes, il a été homologué FFI.
Après la guerre, il fut élu conseiller municipal communiste de Gennevilliers le 29 avril 1945, le maire Waldeck L’Huillier présida aux destinées de la ville jusqu’en 1973.
Le 9 novembre 1946, il épousa en mairie de Gennevilliers Solange, Léontine Delaere. Le couple eut un fils Claude.
En mars 1946 il avait été élu membre du secrétariat de l’Union syndicale des métallurgistes CGT de la Région parisienne, et reconduit lors du congrès tenu les 28, 29 et 30 juin 1947 au siège de l’organisation 94 rue Pierre-Timbaud à Paris (XIe arr.).
Il représentait l’organisation syndicale au Conseil d’administration du Centre de Formation professionnelle Bernard Jugault. En 1949 ce centre comptait 35 moniteurs assimilés agents de maîtrise, et forma 406 stagiaires : ajusteurs, fraiseurs, tourneurs, chaudronniers, tôliers, rectifieurs et soudeurs. Raymond Colin devint en février 1949 administrateur du Château de Vouzeron, une maison de repos des métallurgistes située dans le Cher.
Aux élections municipales des 8 et 15 mars 1959, il était sur la liste présentée par le Parti communiste, fut élu conseiller municipal, il devint 3e adjoint. Élu 4e adjoint en mars 1965, il eut la responsabilité de l’Office municipal des sports, et de la caisse des écoles, de la restauration scolaire.
Lors des grèves de mai et juin 1968, il alla dans les entreprises occupées, au nom de la municipalité il apportait en solidarité du ravitaillement aux salariés en grève.
Aux municipales de 1971, âgé de 63 ans, il fut à sa demande élu conseiller municipal, et maire adjoint honoraire (délibération du 20 décembre 1971). Il était sur la liste en 1973.
Avant son départ en Bretagne à Binic, lors d’une réception au siège de la section locale du Parti communiste, Lucien Lanternier, maire de la ville rendit hommage à Raymond Colin pour ses actions dans la Résistance, à la CGT, au Parti communiste, et dans ses responsabilités d’élu.
Raymond Colin mourut le 22 février 1996 à l’âge de 87 ans à Binic.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article194383, notice COLIN Raymond, Marcel par Daniel Grason, version mise en ligne le 12 juin 2018, dernière modification le 28 mars 2022.

Par Daniel Grason

SOURCES : AN Z-4-11 dossier 111, Z/4/71 dossier 501. – Arch. PPo. GA 62, 1 W 1372. – Fiche de la police communiquée par Guillaume Bourgeois. – Bureau Résistance GR 16 P 136928. – AM Gennevilliers, Bulletin municipal, La Voix populaire. – Roger Bourderon, Rol-Tanguy, Tallandier, 2004. – Roger Linet, 1933-1943 La traversée de la tourmente, Messidor, 1990. – Jean Laffitte, Gennevilliers évocation historique, Ville de Gennevilliers, 1970. – État civil de Boulogne-sur-Seine 1908 E_NUM_BOU-N1908 acte n° 955 (acte numérisé). – Nos remerciements à Sonia Colin petite-fille de Raymond Colin pour son témoignage.

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