ROUVIÈRE Fernand, Alfred, alias « Rolland » dans la clandestinité

Par André Balent

Né le 30 août 1926 à Cassagnas (Lozère), mort fusillé sommaire le 29 mai 1944 à Badaroux (Lozère) ; cultivateur dans l’exploitation familiale ; résistant (maquis école de la Picharlarié, Armée secrète (AS) puis maquis Bir Hakeim, (AS).

Fernand Rouvière était le fils d’Alfred, François Rouvière, agriculteur à Cassagnas, commune cévenole, et de Berthe Guin. François Rouvière, maire de Cassagnas, était un résistant de son village, accueillant et cachant fugitifs et réfractaires à son mas isolé des Felzes.

En février 1944, il accepta de recevoir et de cacher l’ex député socialiste SFIO du Tarn (1936-1940), Alsacien d’origine et Juif, Salomon Grumbach. Assigné à résidence à Mende par Vichy, il devint menacé lorsque les Allemands occupèrent la zone sud. Il put se réfugier dans les Cévennes, plus sûres, et Alfred Rouvière put le cacher avec sa femme Vally dans son mas des Felzes.

Au début de 1944, Fernand Rouvière convoqué au STO devint réfractaire et n’eut pas besoin d’aller bien loin pour se cacher car il le fit aux Felzes mêmes où il côtoya les Grumbach cachés par ses parents. Il se rendait dans la journée suivre l’instruction militaire au maquis école de la Picharlariè, ferme isolée et inoccupée de la commune de Moissac-Vallée-Française. Le comité (AS) de Saint-Jean-du-Gard (Gard) (Voir Lapierre Marceau) avait implanté un maquis école qui rassemblait les réfractaires au STO.

Le 27 (ou le 28) février 1944, des SS, sous la conduite du facteur Danton Vier qu’ils avaient requis, se rendirent aux Felzes afin d’arrêter les couple Grumbach. Ils ignoraient que le jeune réfractaire Fernand Rouvière s’y trouvaient également. Vier pensait qu’ils le recherchaient, ignorant la présence des Grumbach. Le maire ouvrit la porte de son mas aux Allemands. Son fils partit dans la neige se réfugier au mas Touron où résidait la famille Molines. La sœur de Fernand avait épousé André Molines. Les SS abandonnèrent la fouille de lieux, négligeant ainsi le gîte des Grumbach qui s’étaient cachés dans une grange. Pensant que les traces laissées sur la neige étaient celles des Grumbach et non celles de Fernand Rouvière, ils se précipitèrent afin de se lancer à leur poursuite. Comme André Molines descendait du mas Touron vers celui des Molines, il convainquit les Allemands que ses traces étaient les siennes, prétendant qu’il avait passé la nuit aux Felzes et était revenu le matin à son mas afin de s’occuper de ses bêtes. Ce faisant, André Molines sauva la mise à Fernand Rouvière et aux Grumbach.

Fernand Rouvière, quant à lui, partit résider en permanence à la Picharlarié avec deux autres réfractaires de Cassagnas, Jean Chabrol et Roger Rampal. Il y poursuivit l’instruction militaire sous la conduite, d’abord du capitaine Edmond Basset puis de celle de Miguel Arcas alias « Victor » ancien officier de cavalerie de l’armée espagnole resté fidèle à la République pendant la guerre civile et étant entré en France au moment de la Retirada.

Vers la mi-mars, le maquis Bir Hakeim (AS) (Voir Capel Jean), en provenance du pays de Cèze, vint partager la Picharlarié avec le maquis école du comité de Saint-Jean-du-Gard. La plupart des jeunes réfractaires du premier maquis étaient attirés par le prestige de Bir Hakeim, les faits d’armes qui faisant sa renommée, son armement conséquent, ses uniformes. Ainsi s’effectua, progressivement, sur le terrain, l’absorption du premier maquis par le second.

Désormais à Bir Hakeim, Rouvière et ses deux amis de Cassagnas participèrent d’abord aux combats de la Vallée Française (7-12 avril 1944), en particulier contre la redoutable 9e Panzer Division SS Hohenstaufen aguerrie sur le front de l’est où elle s’était accoutumée à la « brutalisation » de la guerre. De là, il participa aux regroupements successifs de Bir Hakeim au château des Fons, puis au Grand Hôtel du Fangas à proximité du mont Aigoual, point culminant des Cévennes. Pendant la nuit du 25 au 26 mai 1944, Jean Capel alias « commandant Barot » donna l’ordre de quitter les lieux après avoir été informé de l’imminence d’une attaque conjointe de la Milice et de GMR. La majorité des maquisards marchèrent pendant deux jours sous la conduite de Marcel de Roquemaurel*, un des adjoints de Capel. Le 27 mai au soir, il arriva, exténué, à La Parade (Lozère) où Capel avait décidé d’installer le nouveau cantonnement du maquis. Rouvière fut affecté au hameau de La Borie, à proximité immédiate de La Parade.

Le 28 mai, à 8 heures du matin, les troupes d’occupation venues de Mende (Allemands et Arméniens de l’Ost Legion) attaquèrent après avoir encerclé le cantonnement. Pendant toute la journée, Rouvière participa aux combats acharnés pour la défense de La Borie. Après que plusieurs tentatives de sorties et de percées eurent échoué, les dernier défenseurs se rendirent après avoir reçu l’assurance qu’il seraient traités comme des prisonniers de guerre.

À 17 heures, ils montèrent dans des camions qui les amenèrent à Mende. Les militaires allemands les remirent à la Sipo-SD du chef lieu de la Lozère qui les enferma dans la cave de son siège, la villa Lyonnet. Pendant la nuit, ils y furent sauvagement torturés. Le lendemain matin, ils furent amenés en camion au ravin de la Tourette (commune de Badaroux, Lozère) le long du remblai de la voie ferrée de Labastide – Puylaurent (Lozère) à Marvejols (Lozère) via Mende. Il furent exécutés sommairement. Inhumé dans une fosse commune du cimetière de Badaroux, son corps fut identifié par Gustave Almès, conducteur du car reliant Mende (Lozère) à Alès (Gard). Rendu à sa famille, il fut ré-inhumé à Cassagnas. Il fut déclaré mort pour la France.

Son nom fut inscrit sur le monument aux morts de Cassagnas (Lozère), sur le monument érigé à Mourèze (Hérault) en l’honneur des membres du maquis Bir Hakeim morts au combat ou fusillés et sur le monument érigé à La Parade (commune de Hures-la Parade, Lozère) pour commémorer les morts du combat de La Parade et les prisonniers exécutés sommairement à Badaroux.
Voir Badaroux, Ravin de la Tourette, 29 mai 1944

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article194413, notice ROUVIÈRE Fernand, Alfred, alias « Rolland » dans la clandestinité par André Balent, version mise en ligne le 8 août 2017, dernière modification le 1er février 2021.

Par André Balent

SOURCES : Éveline & Yvan Brès, Un maquis d’antifascistes allemands en France (1942-1944, Montpellier, les Presses du Languedoc/Max Chaleil éditeur, 1987, 348 p. [pp. 148-149]. — Patrick Cabanel, Jacques Poujol, Bernard Spiegel, « Quelques Juifs dans les Cévennes », in Philippe Joutard, Jacques Poujol, Patrick Cabanel (dir.) Cévennes, terre de refuge, 1940-1944 , Sète, Nouvelles presses du Languedoc et Club cévenol, 5e édition, 2012, pp. 185-211 [pp. 187-189]. — Association pour des études sur la Résistance intérieure (AERI), Association départementale des Anciens de la Résistance de Lozère, ANACR Lozère, La Résistance en Lozère, CDROM accompagné d’un livret, 27 p., Paris, 2006. — Site MemorialGenWeb consulté le 8 août 2017.

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