MANARANCHE Robert, Victor

Par René Gallissot

Né le 20 octobre 1919 à Alger (Algérie), mort le 30 octobre 2004 à Villejuif (Val-de-Marne) ; enseignant à l’université de Paris VII ; directeur scientifique de l’Association française de myopathie et président du laboratoire Généthon ; militant communiste en Algérie.

Les grands parents paternels de Robert Manaranche, arrivés en Algérie en 1848-1849 et en 1866, furent marqués par les événements de la Commune. Toute cette famille de petits colons votait à gauche. Sa mère, née dans le Gers, vendeuse dans un grand magasin d’Alger, était aussi couturière à domicile. Son père mourut en 1925 à l’hôpital d’Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône). Robert Manaranche passa sa jeunesse à Alger et ses vacances chez des cousins colons à Fromentin entre Ténès et Orléansville (Chlef).

En 1935, bien que son ambition fût d’entrer à l’École normale d’instituteurs, la situation financière de la famille l’obligea à trouver un emploi. Il devint en juillet 1935 auxiliaire journalier temporaire dans le Service Topographique, futur Service du Cadastre où il fut titularisé comme dessinateur topographe. Plus tard, il fréquenta les cours de la faculté des sciences d’Alger et obtint deux certificats de licence. Il fut admissible en 1955 au concours interne de l’Ecole nationale d’administration.

Robert Manaranche, après le débarquement allié de novembre 1942, militait avec les étudiants communistes et adhéra au Parti communiste algérien en 1945. Il ne reprit pas sa carte à partir de 1950. En 1943, Lucette Larribère, issue de la famille Larribère communistes oranais, achevait à la Faculté d’Alger une licence d’histoire-géographie. Les jeunes gens se marièrent le 16 mars 1943 à Alger ; ils eurent deux garçons, Pierre né en 1946 et Jean en 1952.

Robert Manaranche assurait la situation financière et laissait du temps à son épouse, responsable de l’Union démocratique des femmes, journaliste à Liberté puis à Alger Républicain, membre du Comité central du PCA.

Leur domicile, 4 rue Négrier, à Alger fut très surveillé à partir de 1955. Dans la clandestinité, commença une liaison entre Bachir Hadj Ali et Lucette Larribère. Pour sa part, Robert Manaranche apportait un concours considérable au PCA clandestin.

Les 25-26 février1957, les parachutistes français, investissant l’appartement, y retinrent pendant deux jours Robert Manaranche, Jean-Marie Larribère son beau-père et Pierre Manaranche, son fils,. Robert Manaranche fut alors transféré jusqu’au 3 juillet au centre de tri de Beni-Messous, dans le plus total isolement, sans que sa famille ait de nouvelles. Il fut ensuite transféré au camp de Lodi (Draa Essamar) au Sud-Ouest d’Alger où il put recevoir l’assistance de la famille Larribère qui avait recueilli ses enfants à Oran. Selon Henri Alleg, amené un temps au camp de Lodi, Robert Manaranche, tant sa culture était étonnante, excellait à donner des cours dans l’enseignement mis en place par l’ancien maire de Sidi-bel-Abbès René Justrabo qui faisait autorité dans le camp.

Sa détention se termina le 5 juin 1959 et il fut expulsé vers la France où il s’installa avec ses enfants, d’abord chez André Prenant au Plessis-Robinson (Seine/Hauts-de-Seine) puis à Morsang-sur-Orge (Seine-et-Oise/Essonne). Il ne réintégra pas le service du cadastre préférant terminer les deux certificats (Géologie, Paléontologie), obtenir la licence (1960) et devenir assistant au Laboratoire d’anatomie comparée dirigé par Marcel Prenant, professeur d’histologie et d’anatomie comparée à la Sorbonne. Il fut chargé de recherches au laboratoire de Roscoff (Finistère) où il se rendait régulièrement l’été, pour poursuivre ses travaux. Divorcé, il se remaria, le 20 décembre 1963, à Paris (XIVe arr.) avec Ruchla (dite Rachel) Scyfer, d’origine polonaise (Varsovie) arrivée en France en 1926. Elle fut l’assistante d’Henri Wallon, puis de René Zazzo, dans un laboratoire de psychologie de l’enfant du CNRS situé rue Gay Lussac à Paris. Ils s’étaient connus à la station biologique de Roscoff.

Ayant soutenu une thèse de doctorat en sciences, il enseigna à l’Université de Paris VII à la fin des années 1960. Chercheur en neurobiologie, attaché à un laboratoire du CNRS installé à Gif sur Yvette (Essonne) jusqu’en 1988, il travaillait aussi depuis 1969 dans le laboratoire de l’hôpital de la Salpétrière, dirigé par Maurice Israël, spécialisé dans les neuro-sciences et les maladies neuromusculaires. Retraité en 1984, il poursuivit des recherches de génomique médicale. Membre du conseil scientifique de l’Association française de myopathie qu’il fréquentait depuis 1988, il en devint jusqu’en 1991 son directeur scientifique. Il présida de 1995 à 1998 le laboratoire Généthon, qui bénéficiait de l’apport de l’argent recueilli par les campagnes médiatiques dites du téléthon.

Militant du Syndicat national des chercheurs scientifiques puis du Syndicat national de l’enseignement supérieur, il fit partie de sa commission administrative et présida la commission des conflits. Élu au Conseil d’Université de Paris VII à la fin des années 1960, il y participa pendant plusieurs années. Il adhérait aussi à l’Union rationaliste et continuait à avoir des rapports avec les milieux algériens soutenant Alger républicain autour d’Henri Alleg.

Lors de son inhumation le 4 novembre 2004 au cimetière de Villejuif au sud de Paris, aux hommages scientifiques, Henri Alleg apporta le salut des communistes ayant milité en Algérie.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article195189, notice MANARANCHE Robert, Victor par René Gallissot, version mise en ligne le 6 septembre 2017, dernière modification le 6 septembre 2017.

Par René Gallissot

SOURCES : Notice de René Gallissot, dans Dictionnaire Algérie (MEL 153472]. — H. Alleg, La guerre d’Algérie, op. cit., t.1. — Témoignage de Paulette Larribère dans A. Dore-Audibert, Des Françaises d’Algérie dans la guerre de libération,. Karthala, Paris, 1995. — Lucette Larribère Hadj-Ali, Itinéraire d’une militante algérienne, Éditions du Tell, Blida, 2011. — l’Humanité, 9 novembre 2004, hommage d’Henri Alleg aux obsèques. — Site internet Histrecmed, histoire de la recherche médicale en santé publique, "Entretien avec Robert Manaranche", 2002. http://www.histcnrs.fr/histrecmedco....~— Notes de Fabrice Riceputi. — Renseignements de son fils, Pierre, recueillis par Jacques Girault.

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