CHARUAU Joseph, Charles, Benjamin, Ferdinand

Par Éric Belouet, Michel Dreyfus

Né le 17 juin 1905 à l’Île-d’Yeu (Vendée), mort le 9 septembre 1970 à Nantes (Loire-Atlantique) ; serrurier puis contremaître EDF ; syndicaliste CFTC puis CFTC maintenue, membre du bureau de la Fédération CFTC Gaz-Électricité (1950-1957 et 1960-1964), président de la Fédération nationale des syndicats d’inspiration chrétienne du personnel des industries électrique et gazière (FNSIC, CFTC maintenue) (1964-1968).

Les parents de Joseph Charuau, Ernest Joseph Charuau et Nelsie Clara Naud, étaient tous deux originaires de familles de l’Île-d’Yeu. Son père était marin pêcheur et servit dans la Marine au cours de la Première guerre mondiale. La famille était très marquée par la foi catholique. Après l’obtention du certificat d’études primaires en 1917, Joseph Charuau travailla brièvement comme marin mais devant l’opposition de sa mère, il entra dans une forge où il apprit les rudiments du métier de serrurier. En août 1919, il partit pour Paris et s’établit dans le XVe arrondissement, chez un couple de cousins. Il fut d’abord apprenti puis occupa divers emplois d’ouvrier serrurier tout en suivantt des cours du soir. Il effectua son service militaire dans l’aviation, au Bourget et à Villacoublay. En 1930, il intégra la Compagnie parisienne de distribution de l’Électricité (CPDE), comme serrurier à la centrale thermique d’Issy-les-Moulineaux, affecté à la maintenance des installations. Il adhéra à la CFTC en 1932 et, selon son fils, il aurait également été membre de la Ligue ouvrière chrétienne (LOC).

Mobilisé le 2 septembre 1939 comme maréchal des logis à la 777e compagnie du Train, Joseph Charuau fut affecté spécial à la CPDE à partir d’avril 1940 et démobilisé en novembre suivant.

Devenu contremaître à l’entretien au début des années 1950, Joseph Charuau fut un des fondateurs du syndicat CFTC de la Région parisienne dont il devint le président. Au cours de l’année 1950, il intégra la direction de la Fédération CFTC Gaz-Électricité, affaiblie par la maladie de Fernand Hennebicq et le départ en province d’André Colders. Il fut notamment chargé de la propagande. Il fut élu secrétaire fédéral à l’issue de son Xe congrès (octobre 1951). Il fut élu au bureau de la fédération de son XIIe à son XVe congrès (octobre 1953 à octobre 1956) puis appartint à son comité directeur à l’issue du XVIe congrès (Paris, octobre 1957). Du XVIIIe au XXe congrès (avril 1960 à octobre 1964), il fut à nouveau élu au bureau fédéral. Tout au long de cette période, il représenta la CFTC comme membre suppléant à la Commission supérieure nationale du personnel (CSNP) d’EDF et comme membre titulaire de plusieurs sous-commissions (classement-avancement, organismes statutaires, apprentissage et formation professionnelle, actifs insalubres).

Influencé par la morale chrétienne, Joseph Charuau fut parmi ceux qui, au sein de la CFTC, s’opposèrent à la déconfessionnalisation. Le 12 octobre 1963, deux cents militants de la CFTC venus d’une cinquantaine de départements créèrent l’Association des groupes d’études économiques sociales et syndicales d’inspiration chrétienne (AGESSIC) dont Joseph Charuau fut le vice-président, les deux présidents étant Joseph Sauty* et Jacques Tessier* et le secrétaire général Jean Bornard. Ce groupement se dota d’un centre national de recherches sur divers points de doctrine ainsi que d’un bulletin, Rénovation, qui remplaça la revue Équipes syndicalistes chrétiennes. Il s’agissait pour les promoteurs de cette initiative de s’opposer à la montée de ceux qui allaient créer la CFDT lors du congrès extraordinaire d’octobre 1964. Joseph Charuau intervint au cours de cette réunion. Seule l’unanimité des congressistes était, selon lui, en mesure d’autoriser une mutation si profonde de l’organisation syndicale : pour lui, le mouvement syndical français était partagé entre le « courant social chrétien » et le « courant marxiste » et entre ces deux conceptions antagonistes et inconciliables, il n’y avait pas de troisième voie possible.
Après la constitution de la CFDT, Joseph Charuau mena un combat d’arrière garde, tant au niveau confédéral que fédéral. Représentant la minorité « fidèle au contrat » originel, il revendiquait en effet toute la CFTC « avec droit au titre et au patrimoine » : comme le dit Frank Georgi, « toute modification substantielle » au contrat devait être acceptée « à l’unanimité des membres associés ». Joseph Charuau fut fortement impliqué dans les polémiques et les actions de justice qui opposèrent CFTC et CFDT et qui ne devaient se conclure qu’en janvier 1971.
Au niveau de sa profession, Joseph Charuau fut le créateur et le président de la Fédération nationale des syndicats d’inspiration chrétienne du personnel des industries électrique et gazière (FNSIC) qui, créée le 30 décembre 1964, regroupa initialement quatre syndicats : celui de la région parisienne, celui du centre de Nantes, celui de la région de Marseille et celui du centre de distribution Paris-Gaz. En 1963, à la veille de la scission, avec ses 28 500 adhérents, la Fédération CFTC Gaz-Électricité se classait en septième position dans la Confédération, mais la Fédération CFTC maintenue ne regroupa que 6 450 adhérents. Sa représentativité fut admise à partir de l’arrêté du 31 mars 1966 qui consacrait la représentativité de la CFTC dans l’ensemble des entreprises françaises. Néanmoins son influence resta limitée chez les électriciens-gaziers où elle ne dépassa jamais 4 à 5 % des voix lors des différentes élections professionnelles. Joseph Charuau fut le président de cette organisation jusqu’à la réunion des instances fédérales du 14 juin 1968 au cours de laquelle il fut remplacé par André Resch*.
Il fut nommé au Conseil économique et social où il représenta la CFTC et fut promu au grade de chevalier de l’ordre national du Mérite par décret du 16 décembre 1966.

Joseph Charuau avait épousé Anne Auger le 9 septembre 1930, à l’Île-d’Yeu. Le couple eut trois fils et une fille. Leur fils aîné, lui aussi prénommé Joseph, fut secrétaire général de la Fédération CFTC de 1981 à 1987 (voir Joseph Charuau fils).

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article19546, notice CHARUAU Joseph, Charles, Benjamin, Ferdinand par Éric Belouet, Michel Dreyfus, version mise en ligne le 25 octobre 2008, dernière modification le 18 septembre 2013.

Par Éric Belouet, Michel Dreyfus

SOURCES : Arch. de la FGE-CFDT (Congrès fédéraux, boîtes 1 J 1-6) —Arch. FNSIC du personnel des industries électrique et gazière : extraits du PV de sa réunion constitutive. — Gaz-Électricité, n° 36 (septembre-octobre 1951), 55 (octobre 1954), 72 (novembre 1956), 81 (novembre 1957), 99 (mai 1960), 144 (novembre 1964), 172 (décembre 1967). — CFTC Information, n° 4 (novembre 1965), 10 (février 1967), 18 (août-septembre 1968), 28 (février-mars 1971). — Frank Georgi, L’invention de la CFDT 1957-1970, Les Éditions de l’Atelier, 1995. — Jean-Philippe Papin, Les syndicats d’EDF, 1946-1996, manuscrit, 1996. — Renseignements et documents fournis par son fils Joseph Charuau (octobre 2011). — Entretien avec son fils Joseph Charuau (octobre 2011). — Notes de Paul Boulland. — État civil.

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