BOGER Eugène

Par Daniel Heudré, Michel Thébault

Né le 4 janvier 1907 à Saint-Aubin-du-Cormier (Ille-et-Vilaine), exécuté le 15 mars 1943 dans le camp de concentration d’Oranienburg (Allemagne) ; fondeur à Poitiers (Vienne) ; membre de la communauté Rom ; victime civile de la politique raciste des nazis.

Eugène Boger était le fils d’Alexandre Boger vannier et de Louise Berger. Il épousa le 2 avril 1940 à Poitiers (Vienne) Théodora, Marie Lenestour (née le 10 février 1894 à Ecommoy, Sarthe). Cette dernière, fille de Pierre Lenestour et de Jeanne Boussat était issue d’une grande famille de la communauté Rom et avait 11 frères et sœurs ; ses parents étaient alors vanniers, domiciliés à Mignaloux-Beauvoir à côté de Poitiers ; elle exerçait en 1940 le métier de chiffonnière. Eugène Boger est indiqué fondeur sur son acte de mariage domicilié avec son épouse route de Gençay à Poitiers. Une annotation écrite au crayon de papier dans la marge de l’acte, précise : "5 enfants à légitimer". En effet le couple avait alors cinq enfants, Jean né le 26 mars 1923 à Moulins (Allier), Berthe née le 9 octobre 1925 à Cosne (Nièvre), Louise née le 4 septembre 1929 à Chabris (Indre), Jean né le 11 juin 1931 à Romilly-sur-Andelle (Eure) et Joseph né le 11 novembre 1933 à Saint-Jammes (Mayenne), selon sa fiche du camp de Poitiers (peut-être Saint-Jammes-sur-Sarthe, Sarthe ?). A la fin de l’année 1940, la famille résidait toujours à Poitiers 50 côte de Montbernage.

Le 2 décembre 1940 deux trains en provenance de Bordeaux transférèrent dans le département de la Vienne des expulsés du département de la Gironde (juifs, roms, étrangers) interdits dans les départements côtiers sur décision des autorités allemandes. Parmi eux 120 « romanichels » furent logés à Rouillé « dans des baraquements gardés pour la gendarmerie de Lusignan » et 102 débarqués à Saint-Saviol (Vienne) « tous logés chez l’habitant à défaut de baraquement » (AD 86 op. cit.). De plus 90 venaient également dans les mêmes conditions d’arriver dans le département des Deux-Sèvres voisin. Le 4 décembre 1940 le commandant de la compagnie de gendarmerie de la Vienne proposa au préfet de rassembler tous les roms dans un camp situé route de Limoges à Poitiers ayant jusque là servi à interner des républicains espagnols. Le Préfet donna son accord ainsi que la Feldkommandantur 677 de Poitiers qui exigea en même temps l’internement des roms du secteur de Poitiers. La famille Boger fut donc internée le 5 décembre 1940 sur ordre de l’autorité allemande avec comme motif d’internement « nomade ». Théodora Boger y retrouva son frère Théodore né le 7 novembre 1885 à St-Nicolas-de-Redon (Loire Inférieure) brossier, venant du camp de Boussais (Deux-Sèvres).

Le 13 janvier 1943 70 hommes âgés de 16 à 60 ans furent extraits du camp à la demande des autorités allemandes pour être envoyés au camp de Royalieu à Compiègne avant d’être déportés en Allemagne vraisemblablement pour répondre aux besoins de main d’œuvre de l’économie de guerre allemande. Eugène Boger et son fils aîné Jean firent partie de ce groupe. Ils furent déportés par un transport parti de Compiègne le 24 janvier 1943 en direction du camp de Sachsenhausen à Orianenburg (Allemagne) où Eugène Boger reçut le matricule 58378. Il fut fusillé (selon la Fondation pour la Mémoire de la Déportation et « condamné à mort par l’ennemi » selon Mémorial genweb) le 15 mars 1943. Son fils Jean fut l’un des rares membres du groupe à revenir de déportation.

Il obtint la mention mort pour la France (son nom apparaît dans le recensement des morts pour la France de Poitiers). Par arrêté du Secrétariat d’État à la Défense et aux Anciens Combattants en date du 27 février 2009, la mention « Mort en déportation » a été apposée sur ses actes et jugements déclaratifs de décès.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article196155, notice BOGER Eugène par Daniel Heudré, Michel Thébault, version mise en ligne le 7 février 2022, dernière modification le 7 février 2022.

Par Daniel Heudré, Michel Thébault

SOURCES : SHD Caen AVCC Cote AC 21 P 427 518 (nc) — Arch. Dép. Morbihan (état civil) — Arch. Dép. Vienne état civil, dossiers 109 W 47 – 211 – 313 (dépouillés par Loïc Richard). — Emmanuel Filhol L’internement et le déportation de Tsiganes français sous l’occupation : Mérignac - Poitiers - Sachsenhausen 1940-1945 Revue d’Histoire de la Shoah n° 170 2000 — Paul Lévy Un camp de concentration Poitiers 1939 – 1945 Ed. SEDES 1995 — Site Internet Fondation pour la Mémoire de la Déportation — Mémoire des Hommes — Mémorial genweb.

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