KHANTINE Pierre

Par Bernard Reviriego, Dominique Tantin

Né le 18 décembre 1915 à Paris (XIVe arr.), exécuté sommairement le 31 mars 1944 à Azerat (Dordogne) ; professeur de mathématiques à l’École navale ; résistant de la « Sixième », branche clandestine des Éclaireurs israélites de France (EIF).

Plaque commémorative sur le mur du cimetière d’Azerat (Dordogne)
Plaque commémorative sur le mur du cimetière d’Azerat (Dordogne)
Pierre Khantine fut exécuté le 31 mars non le 2 comme indiqué sur la plaque.
Crédit : MémorialGenWeb

Pierre Khantine fut l’une des nombreuses victimes de la division Brehmer en Dordogne.
Du 26 mars au 2 avril 1944, la division Brehmer, ou division B de l’initiale du patronyme de son chef, le général Brehmer, accompagnée par des éléments de la Sipo-SD et de la Brigade nord-africaine et bénéficiant de renseignements collectés par des délateurs, collaborationnistes ou non, et par l’administration de Vichy, traversa le département de la Dordogne, traquant les maquisards et massacrant des civils en représailles dans le cadre d’opérations de répression, mais aussi en conduisant une politique génocidaire à l’encontre des nombreux Juifs réfugiés dans le département ; les hommes furent abattus parce que juifs et les femmes et les enfants furent arrêtés, transférés à Drancy puis déportés vers les centres de mise à mort, Auschwitz-Birkenau principalement.
En zone dite libre puis zone sud, les Juifs avaient été recensés en application d’une loi de Vichy du 2 juin 1941, le jour même de la promulgation du second statut des Juifs ; un recensement spécifique des Juifs étrangers intervint en janvier 1942 ; enfin, une loi de Vichy du 11 décembre 1942 imposa en zone sud la mention « juif » sur la carte d’alimentation et sur la carte d’identité des Juifs français et étrangers.
Pierre Khantine eut un parcours universitaire exceptionnel. Il fut reçu à l’École polytechnique et l’École Normale supérieure, et choisit cette dernière pour préparer l’agrégation de mathématiques à laquelle il fut reçu second. Il enseigna ensuite à l’École navale.
Les lois racistes de Vichy entrainèrent son exclusion de l’enseignement. Il s’engagea dans les organisations légales et clandestines de la communauté juive et entra très tôt en Résistance. Dès l’été 1942, il est chargé de mission au sein de la Sixième, branche clandestine des Eclaireurs Israélites de France et devient le commissaire régional des EIF en zone non occupée, travaillant à la confection de faux-papiers et à l’organisation de l’hébergement des enfants cachés. Il était enseignant au centre artisanal de Moissac (Tarn-et-Garonne), centre de regroupement des EIF après l’occupation de la zone Nord par les Allemands. Après le 11 novembre 1942 et l’occupation de la totalité de la France par les Allemands, la Sixième dispersa les enfants du centre de Moissac et Pierre Khantine et Paulette Benroubi, également active dans la « Sixième » et qu’il épousa, le 15 juillet 1943 à Moissac, s’installèrent à Rouffignac, en Dordogne. Là, le maire leur procura de fausses cartes d’identité au nom de Cantine, sans la mention "Juif".
Il fut arrêté à Rouffignac le 31 mars, jour de l’incendie du bourg, ainsi que 65 autres hommes de Rouffignac, qui furent conduits au 35e RAD de Périgueux. Mais Pierre Khantine, sans doute dénoncé aux Allemands par un Français, fut vite repéré et mis à part pour être abattu par un détachement de la division Brehmer, le jour même, dans le cimetière d’Azerat.
Cinq autres Juifs furent exécutés au même endroit entre le 31 mars et le 2 avril : Tobias Grunbaum et Joseph Cohen (arrêtés à Grange-d’Ans), Nathan Schenkel et Nephtali Grün (arrêtés à La Bachellerie), René Kahn (arrêté à Hautefort).
Leurs noms sont inscrits sur une plaque commémorative apposée sur le mur du cimetière.
Le nom de Pierre Khantine est également inscrit sur le monument aux Morts de Rouffignac et à l’École normale supérieure de Paris. Son nom a été donné à l’école primaire de Rouffignac-Saint-Cernin-de-Reilhac.
A Rouffignac, ce même jour, les Allemands arrêtèrent aussi Sylvain Asch qu’ils fusillèrent, le 2 avril, à Condat-sur-Vézère (Dordogne).
Voir La Bachellerie et ses environs (Dordogne), 30-31 mars 1944

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article196568, notice KHANTINE Pierre par Bernard Reviriego, Dominique Tantin, version mise en ligne le 29 octobre 2017, dernière modification le 4 mars 2022.

Par Bernard Reviriego, Dominique Tantin

Plaque commémorative sur le mur du cimetière d'Azerat (Dordogne)
Plaque commémorative sur le mur du cimetière d’Azerat (Dordogne)
Pierre Khantine fut exécuté le 31 mars non le 2 comme indiqué sur la plaque.
Crédit : MémorialGenWeb

SOURCES : Arch. dép. Dordogne, 1 W 1901 ; 1573 W 6 ; 14 J 10. — Registre d’état civil d’Azerat. — CDJC CCXV-41, Liste des morts du mouvement EIF. — Biographie sur Wikipedia. — État civil en ligne de Paris, registre des naissances. — Bernard Reviriego, Les Juifs en Dordogne, 1939-1944, Périgueux, Éditions Fanlac-Archives départementales de la Dordogne, 2003, pp. 245, 250-251, 376. — Guy Penaud, Les crimes de la division Brehmer, La traque des résistants et des juifs en Dordogne, Corrèze, Haute-Vienne (mars-avril 1944), Périgueux, Éditions La Lauze, 2004, p. 257-404. — Paul Mons, La folie meurtrière de la division Brehmer, mars-avril 1944, Dordogne-Corrèze, Haute-Vienne, Brive-la-Gaillarde, Éditions Les Monédières, 2016, pp. 97-100. — Anacr Dordogne, Chemins de la mémoire… Dordogne, volume 1, Conseil général de la Dordogne, 2011, p. 119-122.

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