HŒGER Karl

Par Georges Haupt

Né et mort à Vienne : 3 octobre 1847- 17 octobre 1913 ; typographe ; un des pionniers du mouvement ouvrier en Autriche ; rédacteur et député socialiste.

Fils adoptif d’un garçon de salle de l’institut de physique de l’École polytechnique de Vienne, Karl Hœger commença à l’âge de douze ans l’apprentissage du métier d’imprimeur. A la fin de son apprentissage, en 1865, se trouvant sans travail, il voyagea à l’étranger, puis, rentré à Vienne, travailla dans diverses entreprises de presse, notamment la Wiener Zeitung (Journal de Vienne) et le Fremdenblalt (Bulletin étranger). Sous l’influence de la lecture de Lassalle, il devint socialiste et adhéra en 1867 au club d’éducation ouvrière de Vienne. Dès 1869, il entreprit une propagande systématique à l’Association professionnelle des typographes, l’organisation la plus ancienne, la plus traditionnelle et la plus hostile aux idées socialistes. Il parvint grâce à un travail systématique pendant des années, non seulement à modifier l’orientation traditionnelle, mais à en faire un bastion du socialisme. A partir des années 1870, Hœger joua un rôle croissant dans le mouvement social-démocrate naissant et fut l’un des dirigeants les plus doués des « modérés ». Il fut le rédacteur du Vorwärts (En avant) de 1877 à 1883 et édita en 1883 un journal satirique, Elektrische Streiflichter (Aperçus électriques). Il soutint activement Victor Adler dans ses tentatives d’unification à partir de 1886 et fit partie du Comité d’organisation qui prépara le congrès de Hainfeld de la fin décembre 1888. Il fut en proie à une répression policière permanente, ses prises de position, ses discours lui valurent d’être arrêté plus de dix fois de 1877 à 1895.
Dirigeant ouvrier expérimenté, il joua un rôle important dans l’élaboration de la politique social-démocrate à l’égard des syndicats. Au congrès du parti social-démocrate de 1891, ce fut lui qui présenta le rapport sur « la situation et les objectifs des organisations syndicales en Autriche ». Il proposa d’accentuer l’activité social-démocrate dans les syndicats, de réorganiser les associations professionnelles sur des bases modernes pour aboutir à un rapport organique entre le mouvement politique et le mouvement syndical sous la direction de la social-démocratie. C’est alors qu’il proposa la création d’une organisation centrale des syndicats de l’Empire qui devait remplir le rôle de confédération et il joua un rôle important dans la fondation de la Commission des syndicats de l’Empire. Il entreprit lui-même la transformation de l’Association professionnelle des typographes en syndicat des travailleurs du Livre dont il fut élu président le 23 décembre 1894. Il défendit son point de vue sur la subordination des syndicats aux luttes politiques au congrès socialiste international de Zürich, en août 1893, où il fut délégué. A son retour du congrès il fut de nouveau arrêté. Après sa libération, il fut l’un des présidents au premier congrès des syndicats autrichiens tenu le 24 décembre 1893 et où les objectifs qu’il proposait furent atteints.
Le 8 avril 1897, il renonça à ses fonctions syndicales et se consacra dès lors à la rédaction de Volkstribüne (La Tribune du peuple) à laquelle il avait collaboré dès sa création en 1892 et dont il prit la direction en 1911 après l’assassinat de son ami Schuhmeier. Autodidacte, il fut un écrivain doué et un journaliste de talent. Il collaborait à presque tous les périodiques ouvriers de son temps. Possédant une culture étendue, il écrivait sur les sujets les plus variés : articles techniques, politiques, essais, feuilletons. Il consacra même une grande étude à l’historien Michael Denis qui fut plus tard conservateur de la bibliothèque impériale. Mais il fut surtout l’auteur d’une volumineuse histoire de l’association professionnelle des typographes, contribution importante à l’histoire du mouvement ouvrier autrichien du XIXe siècle.
Combatif, d’une énergie hors de pair, personnalité colorée, Karl Hœger fut le type du militant enthousiaste qui ne briguait pas des fonctions et les cédait volontiers aux jeunes. En 1907, il appartint de nouveau au Comité directeur du Parti et fut élu député au « Keichsrat » (Conseil d’Empire). Mais en 1911, il refusa de poser une nouvelle fois sa candidature, considérant qu’il devait céder sa place aux jeunes militants. En revanche, il se consacra entièrement à la chorale Freie Typographia (Typographie libre) qu’il avait fondée en 1898. Il voyait dans les chants ouvriers un puissant moyen de propagande et fut lui-même chef des chœurs et compositeur.
Le 28 septembre 1913, le Vorwärts lui rendit un hommage solennel. Il mourut quelques semaines plus tard.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article197490, notice HŒGER Karl par Georges Haupt, version mise en ligne le 28 novembre 2017, dernière modification le 21 novembre 2018.

Par Georges Haupt

ŒUVRES : Michaël Denis. Ein biographisches Gedenkblatt ((Miehaël Denis. Une page biographique), Vienne, 1879. — Aus eigener Kraft. Die Geschichte eines œsterreichischen Arbeitervereins seit 50 Jahren (A la force du poignet. L’histoire d’une association ouvrière autrichienne depuis 50 ans), Vienne, 1892, 592 p. — Die Lebensmittelverteuerung (Le Renchérissement des denrées alimentaires), Vienne, 1892, 52 p.

SOURCES : L. Brügel, Geschichte der œsterreichischen Sozialdemokratie (Histoire de la social-démocratie autrichienne), vol. II-IV, Vienne, 1922-1925. — Karl Hœger, 1847-1947, dem mutigen Baumeister der Organisation der graphischen Arbeiter in Dankbarkeit gewidmet (Karl Hœger, 1847-1947, en reconnaissance au courageux organisateur des travailleurs de l’imprimerie), Vienne 1947, 40 p. — Karl Hœger. Denkschrift zum 2 September 1913. Vier Jahrzehnte in der vordersten Reihen der Buchdrukkerorganisation (2 septembre 1913, quatre décennies aux premiers rangs de l’organisation des travailleurs du livre), Vienne, 1913, 48 p. — Werk und Widerhall. Grosse Gestalten des œsterreichischen Sozialismus (L’Œuvre et son écho. Grandes personnalités du socialisme autrichien), édité par Norbert Leser, Vienne, 1964.

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