KULCSAR Leopold et Ilse BAREA-KULCSAR

Par Yvon Bourdet

Bien qu’ils n’aient vécu ensemble qu’une quinzaine d’années, l’action publique des Kulcsar, sous peine de répétitions incessantes, ne peut faire l’objet de deux notices distinctes. A l’époque de l’austrofascisme, ce « couple oppositionnel » formait une véritable équipe politique. Transfuges du P.C., ils avaient tous deux une situation particulière au sein de la social-démocratie ; ils se spécialisèrent dans les méthodes de l’action clandestine, à laquelle ils se préparaient activement dès avant février 1934, en s’inspirant du groupe allemand « Neu Beginnen » (Nouveau commencement). Après la défaite de la social-démocratie autrichienne, ils fondèrent le groupe « Funke » (l’Etincelle) qui était aussi un rappel de l’« Iskra » de Lénine. C’est Ilse qui, la première, utilisa, dans une feuille clandestine, l’expression de « socialistes révolutionnaires » pour désigner les socialistes qui continuaient le combat dans l’illégalité ; mais les Kulcsar éprouvèrent de la difficulté pour s’intégrer à la lutte commune ; on les soupçonnait de vouloir diriger seuls le mouvement. Cependant, ils avaient la confiance d’Otto Bauer à Brünn (Brno) qui fit débloquer des fonds pour leur permettre d’agir.
Léopold était né à Vienne le 9 septembre 1900, et, très jeune, avait adhéré au mouvement socialiste des jeunes ouvriers. Après la révolution russe, en 1917, il fit partie du groupe d’opposition qui fut à l’origine du Parti communiste autrichien. Il joua un rôle actif lors des grèves de janvier 1918 ; arrêté, il resta en prison jusqu’à la fin delà guerre. Libéré, il adhéra au P.C.A., travailla dans une banque, puis comme journaliste.
Ilse Pollak, née également à Vienne, le 20 septembre 1902, était la fille d’un proviseur de lycée. Après le baccalauréat, elle étudia les sciences politiques à l’Université de Vienne. Elle avait fait partie du Comité central des lycéens socialistes et rédigé leur publication : Jeunesse socialiste. Après avoir milité à la gauche du Parti socialiste, elle adhéra au P.C., en 1921. L’année suivante, elle épousait Léopold Kulcsar et se voyait confier la rubrique économique du Drapeau rouge (Rote Fahne), mais, déçus par les dissensions internes des communistes autrichiens, les Kulcsar quittèrent le P.C., pendant l’hiver 1924-1925. Ensuite Leopold travailla avec Helmer à l’organisation du Parti socialiste de Basse-Autriche et devint rédacteur du journal syndical des cheminots. Ilse fut chargée principalement d’un travail itinérant d’éducation. En 1933, elle fut arrêtée pendant deux semaines pour « injure au gouvernement ». Ils étaient tous deux partisans de la résistance armée. En février 1934, Leopold fut arrêté pendant quelques jours. Repérés par la police, après quelques mois d’activité clandestine, ils durent gagner Brünn (Brno) séparément, en décembre 1934, où ils continuèrent la lutte auprès d’Otto Bauer.
En novembre 1936, Ilse fut invitée par des socialistes espagnols et partit pour Madrid avec des recommandations d’Otto Bauer. Elle s’occupa de la presse et de la radio à destination de l’étranger. Leopold, pour sa part, avait, en 1937, quitté Brünn (Brno) pour Prague où il fut secrétaire de l’ambassadeur d’Espagne. Il y mourut le 28 janvier 1938. Ilse, qui avait épousé Barea, un écrivain espagnol, quitta l’Espagne pour Paris, en février 1938, puis elle gagna l’Angleterre où elle occupa des fonctions de traductrice à la B.B.C. et milita au sein du Labour Party et des syndicats anglais.
En 1965, Ilse Barea revint à Vienne, professa dans les écoles syndicales et écrivit dans la presse socialiste. En 1971, elle reçut le prix Josef-Luitpold Stern pour services rendus à la cause de l’éducation ouvrière.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article197549, notice KULCSAR Leopold et Ilse BAREA-KULCSAR par Yvon Bourdet, version mise en ligne le 28 novembre 2017, dernière modification le 13 mars 2019.

Par Yvon Bourdet

ŒUVRES d’Ilse Barea-Kulcsar : Die Grossmächte der Finanz und Industrie (Les grandes puissances de la finance et de l’industrie), Vienne, 1930, 39 p. — Vienna Legend and Reality, London, 1966, 380 p., et de nombreux articles dans la presse socialiste d’Autriche, de Suisse et de Tchécoslovaquie. Elle fut en particulier, rédactrice en chef de la Tribune (Die Tribüne), publication trimestrielle, parue à Brno et diffusée clandestinement à Vienne, après février 1934, une des dernières manifestations de l’austromarxisme,

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