Par Herbert Steiner
Née en 1895 ; gazée par les nazis en février 1942 ; militante et théoricienne socialiste.
Née dans une famille aisée, Käthe fit de bonnes études. Très douée dans le domaine des arts, en particulier pour la musique, elle acquit une culture générale étendue. Elle s’inscrivit à l’université de Vienne, mais ne put cependant passer ses examens de sciences politiques alors interdits aux femmes. Le grand événement qui marqua sa jeunesse fut l’attentat de Friedrich Adler contre le premier ministre Stürgkh en octobre 1916. Elle désirait poursuivre ses études à Heidelberg, mais le « Commandement général » le lui interdit en raison de ses idées pacifistes. Ce n’est qu’à l’été 1918, qu’elle obtint une autorisation de séjour de trois semaines. Elle passa alors son doctorat en philosophie avec la mention très bien.
Pendant les grèves de janvier 1918 en Autriche, elle rejoignit dans l’action les opposants de gauche à la guerre. Elle avait étudié en profondeur les principes du socialisme ; aussi l’économiste Schumpeter fit appel à elle comme collaboratrice et Otto Bauer la prit comme secrétaire personnelle lorsqu’il devint ministre des Affaires étrangères pour huit mois, en novembre 1918. Elle travailla également au sein du bureau de la commission de socialisation. Avec W. Ellenbogen, elle participa pendant plusieurs années aux travaux de l’Association pour l’économie communautaire. Elle était aussi membre du conseil ouvrier du district de Vienne et appartenait aux éléments de gauche qui critiquaient Friedrich Adler.
En 1924, elle fit de la politique sociale son champ d’activité principal et prit en charge le département du travail féminin à la Chambre des ouvriers et employés. Elle publia de nombreux écrits sociopolitiques et son activité s’étendait à de nombreux domaines : elle fut la théoricienne la plus brillante de la jeune génération des austromarxistes. Membre du Comité central des femmes socialistes, présidente de l’organisation du 1er arr. de Vienne du Parti social-démocrate, elle ne fit cependant jamais acte de candidature à des fonctions électives. Se situant à l’aile gauche, elle s’opposa énergiquement à la politique de passivité de la direction du parti devant la montée de l’austro-fascisme. L’échec de l’insurrection de février 1934 l’obligea à quitter l’Autriche et, avec son mari, Otto Leichter, qu’elle avait épousé en 1921, elle se rendit pour quelques mois à Zurich. En août 1934, elle rentra à Vienne et milita dans la clandestinité. Elle prit alors la direction du travail d’éducation politique des Socialistes révolutionnaires. Deux ans plus tard, elle devint directrice de leur service d’information. Après l’invasion des troupes allemandes, le 12 mars 1938, elle aida son mari à fuir à l’étranger. Mais lorsqu’elle voulut fuir elle-même, le 31 mai 1938, elle fut dénoncée et arrêtée avec ses deux fils par la Gestapo. Détenue d’abord à la prison du tribunal de grande instance de Vienne, elle fut ensuite déportée au camp de concentration de Ravensbrück et, en février 1942, gazée dans un wagon de chemin de fer près de Magdebourg.
Par Herbert Steiner
ŒUVRES : Frauenarbeit und Arbeiterinnenschutz in Œsterreich (Travail des femmes et protection des ouvrières en Autriche), Vienne, 1927, 238 p. — Wie leben die Wiener Heimarbeiter ? (Gomment vivent les travailleurs à domicile viennois ?), Vienne, 1928, 146 p. — Handbuch der Frauenarbeit in Œsterreich (Manuel du travail féminin en Autriche), Vienne, 1930, 674 p. — So leben wir (C’est ainsi que nous vivons), Vienne, 1932, 156 p. — Vom revolutionären Syndicalisme zur Verstaatlichung der Gewerkschaften (Du syndicalisme révolutionnaire à l’étatisation des syndicats). — Mélanges Carl Grünberg, Leipzig, 1932.
SOURCES : Werk und Widerhall. Grosse Gestalten des œsterreichischen Sozialismus (L’Œuvre et son écho. Grandes personnalités du socialisme autrichien), édité par Norbert Leser, Vienne, 1964. — Walter Wisshanpt, Wir kommen wieder t... (Nous reviendrons !...), Vienne, 1967.