SCHÄRF Adolf. Pseudonyme : Schàfer Albert

Par Georges Haupt

Né le 20 avril 1890 à Nikolsburg ; mort à Vienne le 28 septembre 1965 ; leader social-démocrate ; président du Parti socialiste de 1945 à 1957 ; président de la république de 1957 à sa mort.

Septième enfant d’un souffleur de verre, Adolf Schärf fréquenta le lycée de l’arr. de Hernals à Vienne, étudia le droit et les sciences politiques à l’université de Vienne et passa son doctorat en 1914. Pendant la guerre, il fut appelé sous les drapeaux. En 1918-1919, il fut le secrétaire de Karl Seitz et, en 1919, il fut nommé secrétaire du groupe parlementaire social-démocrate, fonction qu’il exerça jusqu’en 1933 sous les trois présidences de Seitz, Eldersch et Renner. Il écrivit ses premières brochures consacrées essentiellement au domaine agricole et à la question paysanne sous le pseudonyme de Schäfer. En 1933, le « Landtag » de Vienne l’élut suppléant du conseiller fédéral Max Winter qu’il remplaça au « Bundesrat » (Conseil fédéral) le 27 juin 1933. A cette dernière tribune où l’on pût encore exprimer des opinions démocratiques, Schärf plaida contre les « lois sur les pleins pouvoirs en période d’économie de guerre », tirées de l’oubli par Dollfuss. Le 1er décembre 1933, il présenta au « Bundesrat », en tant que membre de la Commission constitutionnelle et juridique, une motion exigeant que soit fixée la date à laquelle les « lois sur les pleins pouvoirs en période d’économie de guerre » seraient abrogées. Le 18 janvier 1934, il présenta son dernier rapport sur cette motion, mais les événements de février coupèrent court à son activité politique. Comme les autres élus sociaux-démocrates, Schärf fut arrêté. On le relâcha, faute de preuves. Il devint alors avocat-stagiaire au cabinet de l’avocat social-démocrate Heinrich Steinitz. Le parquet refusa de l’admettre comme défenseur au grand procès des socialistes révolutionnaires de mars 1936.
De 1934 à 1938, il rencontra régulièrement d’anciens membres du Comité directeur du Parti social-démocrate tels que R. Danneberg, O. Helmer, H. Schneidmadl et P. Richter. En mars 1938, il fut arrêté par les nazis. Relâché, il put reprendre sa profession d’avocat tout en conservant ses liaisons avec le mouvement socialiste clandestin. Après l’arrestation de Karl Seitz en juillet 1944, il fut lui-même détenu puis relâché et il représenta en Autriche la direction de la social-démocratie clandestine. Dès le lendemain de la libération partielle de Vienne, il prit l’initiative de la reconstruction du parti et réunit la vieille garde, dont il faisait partie avec Helmer et Schneidmadl, et les socialistes révolutionnaires. Le 14 avril 1945, il fut élu président du Parti socialiste à titre provisoire ; confirmé dans cette fonction, il s’imposa rapidement comme son chef de l’après-guerre. Adversaire de toute collaboration avec les communistes, il s’opposa violemment avec Bruno Pittermann à Erwin Schärf, secrétaire général du Parti socialiste partisan de la collaboration. Lorsqu’en août 1946, le Parti communiste formula son programme en dix points, il réussit à renverser la majorité qui en 1945 avait été favorable à Schärf.
« Le Dr Schärf était un politicien têtu, pragmatique, que les débats idéologiques n’intéressaient absolument pas. Tacticien politique expérimenté, il défendit les intérêts de son parti avec vigueur et intelligence... Plus que tout autre Autrichien peut-être, Schärf personnifie la remarquable transformation du socialisme d’après guerre — une transformation si décisive qu’on a noté qu’aucun parti socialiste n’a parcouru aussi rapidement la longue route qui va de la gauche à la droite » (Baader).
Il fut membre du gouvernement provisoire dirigé par Renner qui proclama l’indépendance de l’Autriche le 27 avril 1945. II y occupa les fonctions de secrétaire d’État du cabinet politique, puis fut vice-chancelier des gouvernements Figl et Raab en tant que porte-parole politique de son parti. Il exerça ces fonctions pendant douze ans et fit partie de la délégation gouvernementale qui en avril 1955 à Moscou prépara la conclusion du traité d’État signé le 15 mai 1955 qui ouvrait la voie à la neutralité de l’Autriche. Après le décès de Th. Kœrner, il fut élu le 5 mai 1957 à la présidence de la République et son mandat lui fut renouvelé le 28 avril 1963. Homme politique modéré qui déclarait : « Notre programme est un programme de tolérance et d’entente », il milita en faveur de la détente politique dans le monde et contre la course aux armements atomiques. L’O.N.U. reprit sa proposition de convoquer une conférence des savants du monde entier pour débattre de la nocivité des expériences nucléaires. Il mourut à Vienne le 28 septembre 1965 dans l’exercice de ses fonctions.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article197682, notice SCHÄRF Adolf. Pseudonyme : Schàfer Albert par Georges Haupt, version mise en ligne le 23 avril 2019, dernière modification le 9 avril 2019.

Par Georges Haupt

ŒUVRES : (Pseud. Albert Schäfer) Sozialdemokratie und Landvolk (Social-démocratie et population rurale), Vienne, 1920, 30 p. — (Id.) Bauer, wach auf ! Die Sozialdemokraten kommen (Debout, paysan, les sociaux-démocrates arrivent), Vienne, 1923, 40 p. — Pachtrecht und Pächterschutz in Œsterreich (Le Droit de fermage et la protection du fermier en Autriche), Vienne, 1925, 47 p. — Die Frau im Spiegel des Rechts (La Femme à la lumière du Droit), Vienne, 1926, 16 p. — April 1945 in Wien (Avril 1945 à Vienne), Vienne, 1948, 127 p. — Zwischen Demokratie und Volksdemokratie (Entre la démocratie et la démocratie populaire), Vienne, 1950, 143 p. — Die Lage des demokratischen Sozialismus (La Situation du socialisme démocratique), Vienne, 1953, 23 p. — Œsterreichs Erneuerung 1945-1955 (La Rénovation de l’Autriche 1945- 1955), Vienne, 1955, 420 p. — Œsterreichs Wieder aufrichtung in Jahre 1945 (Le Relèvement de l’Autriche en 1945), Vienne, 1960. — Erinnerungen aus meinem Leben (Souvenirs de ma vie), Vienne, 1963, 177 p.

SOURCES : Adolf Schärf ; zum 60. Geburtstag (A l’occasion du soixantième anniversaire d’A. Schärf), Vienne, 1950, 18 p. — Das Buch vom Doktor Schärf. Textes de Thea Leitner et Franz Kreuzer (Le Livre du Docteur Schärf), Vienne, 1957, 192 p. — Dr. Schärf, ein Bundespräsident für alle Œsterreicher (Dr Schärf, un président fédérai pour tous les Autrichiens), Vienne, 1963, 46 p. — William B. Baader, Austria between East and West, 1945-1955 (L’Autriche entre l‘Est et l‘Ouest, 1945-1955), Stanford University Press, 1966.

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