STRASSER Josef

Né le 11 septembre 1870 à Cracovie ; mort le 15 octobre 1935 à Vienne ; chef de file de la « gauche de Reichenberg » ; un des fondateurs du PC d’Autriche ; rédacteur en chef de la Rote Fahne.

Le père de Josef Strasser était receveur des chemins de fer et sa mère domestique. Il passa sa jeunesse à Vienne et, après des études secondaires, il entreprit d’étudier le droit aux universités de Vienne et de Zurich tout en gagnant sa vie en donnant des leçons particulières. Professant une grande admiration pour Victor Adler, il adhéra au Parti ouvrier social-démocrate d’Autriche et acquit en autodidacte une solide formation marxiste.
Collaborateur à l’Arbeiterzeitung (Journal des Travailleurs), Strasser fut envoyé en 1900 à Reichenberg (Libérée) en Bohême où il devint rédacteur en chef de l’hebdomadaire social-démocrate local Freigeist (Libre Penseur) qui devint quotidien sous le nom de Vorwärts (En avant). Il constitua avec Karl Kreibich et Alois Nemetz la « Gauche de Reichenberg » qui adopta une attitude critique envers la direction du Parti social-démocrate, principalement sur la question du militarisme et sur la question nationale. Dans la Bohême du Nord multilingue, Strasser étudia de près ce dernier problème, s’opposa avec succès aux Nationaux-Allemands et publia en 1912 sa brochure Der Arbeiter und die Nation (L’Ouvrier et la nation). Ce « manifeste des radicaux autrichiens » fut l’un des travaux les plus importants sur la question nationale et suscita d’âpres discussions, notamment une réplique d’Otto Bauer.
Rentré à Vienne en 1913, Strasser collabora jusqu’en 1917 à la rubrique culturelle de l’Arbeiter-Zeitung où ses critiques théâtrales furent très appréciées. Il collabora également à la rubrique littéraire de l’organe théorique du parti, Der Kampf (Le Combat), et à l’hebdomadaire satirique Glühlichter (Les Lumières chatoyantes). Opposant résolu à la guerre, il entra de nouveau en conflit avec le Comité directeur du Parti lors du déclenchement de la Première Guerre mondiale et fit partie en 1916 de la direction du cercle « Karl Marx ». Militant d’extrême gauche, il mit un terme à son activité à l’intérieur du Parti social-démocrate à l’issue de la grève de janvier 1918. Après de longues hésitations, Strasser adhéra, au début de 1919, au Parti communiste d’Autriche où il exerça les fonctions de rédacteur de l’hebdomadaire die Soziale Revolution (La Révolution sociale), puis, à partir de l’automne de 1919, celles de rédacteur en chef de l’organe central du parti, die Rote Fahne (Le Drapeau rouge). Élu au Comité directeur du parti au IIIe congrès en décembre 1919, mais esprit indépendant, il entra bientôt au conflit avec les autres membres de la direction, principalement lors des grands débats sur les conséquences de l’insurrection manquée du 15 juin 1919. Seul représentant de la tendance modérée et antiputschiste, il fut soutenu par l’Internationale communiste en la personne de Radek et se solidarisa lui-même avec Paul Levi lorsque celui-ci fut exclu du Parti communiste d’Allemagne en 1921. Il intervint également en faveur de la démocratie dans le parti et pour son indépendance politique et financière. Le comité exécutif de l’Internationale communiste recommanda en vain « aux camarades autrichiens » de confier à Strasser des fonctions plus en rapport avec ses capacités. Bien qu’on l’eût fêté en 1921 comme l’un des fondateurs spirituels du parti, on le tint désormais à l’écart. En 1923, il fut appelé à Moscou comme rédacteur de la revue en langue allemande de Radek, Die Internationale, et comme lecteur à la maison d’édition de l’Internationale communiste. Lénine appréciait beaucoup ses qualités, le considérant comme le meilleur journaliste de langue allemande et le qualifia même de « plume d’or ». Démis de ses fonctions lors de la querelle pour la succession de Lénine, Strasser devint quelques mois plus tard correcteur de l’édition allemande des œuvres de Lénine grâce à l’intervention de Boukharine. En janvier 1928, il fut rappelé en Autriche pour siéger au Comité central du Parti communiste d’Autriche et reprit son poste de rédacteur en chef de la Rote Fahne. Il entra une nouvelle fois en conflit avec la direction et donna sa démission des fonctions qu’il détenait. Exclu avec sa femme en tant que « trotskyste », il abandonna alors le mouvement communiste et la vie politique en général pour se consacrer aux mathématiques, depuis toujours son violon d’Ingres. Il mourut dans la misère.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article197733, notice STRASSER Josef, version mise en ligne le 23 avril 2019, dernière modification le 9 janvier 2022.

ŒUVRE : Der Arbeiter und die Nation (L’Ouvrier et la nation), Reichenberg, 1912, 68 p. — Der Weg des Intellektuellen (Le Cheminement de l’intellectuel).
Quatre lettres (1905-1912) à Karl Kautsky sont déposées à l’Institut international d’histoire sociale, Amsterdam.
Sa brochure de 1912 a été traduite en français en 1977 par Claudie Weill, et regroupée avec un texte d’Anton Pannekoek sous le titre Nation et lutte de classe (un extrait concernant l’internationalisme est numérisé sur le site La Bataille socialiste).

SOURCES : Isa Strasser, article commémoratif pour le centième anniversaire de Josef Strasser, Wiener Tagebuch, septembre 1970.

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