WINTER Ernst, Karl

Né le 1er septembre 1895 à Vienne, mort le 4 février 1959 à Vienne ; historien ; homme politique ; catholique de gauche.

E. Winter étudia la sociologie et l’histoire à l’Université de Vienne. Héritier du romantisme du XIXe siècle, il resta partisan de la Grande Autriche. En octobre 1914, il s’engagea pour un an au 11e régiment de tirailleurs de Bozen, sa patrie d’élection. Il y fit la connaissance de Dollfuss et ils se trouvèrent d’accord pour s’élever contre le nationalisme allemand de certains Autrichiens germanophones qui escomptaient la victoire de l’Allemagne et la défaite de l’Autriche. Ayant refusé une provocation en duel, Winter fut déclaré inapte à devenir officier.
E. |Winter avait subi l’influence non seulement du juriste Hans Kelsen, mais aussi de Max Adler. Ainsi ce conservateur catholique et romantique, dans sa lutte pour la patrie autrichienne qu’il mena toujours à contre-courant, dans des postes perdus, resta proche des ouvriers sociaux-démocrates.
Winter fit partie du cercle Anton Orel et fut l’un des fondateurs de la Fédération des socialistes religieux dont l’emblème était un drapeau rouge avec, au milieu, une croix noire. Winter, dont la devise était « être à droite, penser à gauche », était venu, selon ses propres termes, de la science à la politique. En 1933, il interrompit ses recherches devant la menace du national-socialisme dans lequel il voyait « la négation de toutes les valeurs de la culture occidentale ». Il voulait rassembler tous les adversaires du nazisme et réconcilier le régime Dollfuss avec le mouvement ouvrier pour conjurer le péril nazi. Il adjura le régime de la nouvelle Autriche « d’abandonner l’orientation autoritaire » pour parvenir à une entente avec la social-démocratie, et il réclama publiquement que les membres condamnés du « Schutzbund » (Ligue de protection républicaine) fussent graciés. Dans ses Wiener politische Blätter (Feuilles de politique viennoise), il combattit les violations de la constitution par Dollfuss. Il écrivait, par exemple, peu avant février 1934 : « En tant qu’Autrichien catholique, je dois dire que je mépriserais le prolétariat autrichien s’il ne défendait pas par tous les moyens qui sont en son pouvoir les positions qu’il s’est acquises dans l’État ». Il écrivit de même au président fédéral qu’un coup d’État qui supprimerait les libertés démocratiques justifierait « le déploiement complet du droit à la résistance à l’oppression ».
Son amitié avec son ancien camarade de régiment Dollfuss résista à leurs divergences politiques. Le 6 avril 1934, il fut nommé troisième maire-adjoint de Vienne. Révoqué en octobre 1936 par Schuschnigg, il fut accusé d’avoir « fait ouvertement de la propagande pour le bolchévisme ».
En mars 1938, Winter émigra volontairement sachant qu’il n’échapperait pas aux camps de concentration nazis. La même année, il fut nommé professeur de sociologie et de philosophie sociale à la New School for social Research de New York. Mais il voulait rester Autrichien et travailler pour l’Autriche, il se retira donc de toute activité universitaire et vécut à Tenafly (N.Y.) comme écrivain. Pour des raisons politiques, Winter s’est toujours vu refuser une chaire d’Université en Autriche qu’il sollicitait depuis 1929. Il mourut à Vienne, le 4 février 1959.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article197775, notice WINTER Ernst, Karl, version mise en ligne le 23 avril 2019, dernière modification le 20 mai 2020.

ŒUVRE : Die Sozialmetaphysik der Scholastik (La Métaphysique sociale de la scolastique), 1929. — Das soziologische in Platons Ideenlehre (Le fait sociologique dans la doctrine des idées chez Platon), 1930. — Arbeiterschaft and Staat (Classe ouvrière et État), 1934. — Rudolf IV von Œsterreich (Rodolphe IV d’Autriche), 1934-1936. — Saint Séverin, 1958. — Ignaz Seipel als dialektisches Problem. Ein Beitrag zur Scholastikforschung (Ignaz Seipel en tant que problème dialectique. Contribution à l’étude de la scolastique), Vienne, 1956,192 p.

SOURCES : Alfred Missong, E.K. Winter, Bahnbrecher des Dialogs (E.K. Winter, pionnier du dialogue). Choix de textes avec étude introductive, Vienne, 1960, 228 p.

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