CHÉREAU Ernest, Charles

Par Claude Geslin, Jean-Luc Pinol, Armand Rébillon

Né le 10 avril 1869 à Rennes (Ille-et-Vilaine), mort le 27 janvier 1947 ; ouvrier plâtrier ; militant syndicaliste d’Ille-et-Vilaine.

D’une famille ouvrière, Ernest Chéreau travailla dans diverses villes de l’Ouest, puis se fixa à Rennes où il se maria en 1896. Il militait alors au syndicat du Bâtiment, dont il devint secrétaire en 1900. Il fut délégué aux XIe, XVIe, XVIIIe congrès nationaux corporatifs - 5e, 10e, 11e et 12e de la CGT - tenus respectivement à Paris, septembre 1900, Marseille, octobre 1908, Toulouse, octobre 1910, Le Havre, septembre 1912. Secrétaire de l’Union locale, puis de l’UD, constituée en 1911, il exerça ces fonctions jusqu’en 1940. Il fut délégué en 1923 au congrès de Vienne de la Fédération internationale des syndicats. Fervent admirateur de Jaurès, Chéreau n’adhéra cependant pas au Parti socialiste SFIO par souci d’indépendance syndicale.
Pendant une quarantaine d’années, il présida à l’extension de l’organisation ouvrière à Rennes et dans le département. C’est sous son administration que l’ancienne Bourse du Travail de Rennes, installée place du Champ-Jacquet, dans un local fourni par la municipalité, fut transférée rue Saint-Louis dans l’ancien presbytère de la paroisse de N.-D. de Bonne-Nouvelle dont la municipalité de coalition radicale et socialiste du maire Janvier avait obtenu la dévolution et qu’elle attribua à la Société civile de la Maison du Peuple (délibération du conseil municipal de juin 1911) - voir P. Beaupérin. Cette société civile avait été créée par l’Union locale des syndicats et demeurait sous son contrôle. C’est sur l’initiative de Chéreau que fut créé, en 1918, Le Semeur d’Ille-et-Vilaine, organe bimensuel de l’Union départementale des syndicats.
Chéreau négocia avec la même municipalité la construction d’une grande salle des fêtes (décidée en novembre 1919 et inaugurée en avril 1925) ; puis, avec la municipalité élue en 1929, celle d’un vaste bâtiment neuf à la place de l’ancien presbytère. Il conduisit la négociation des conventions qui assurèrent à l’Union locale des syndicats la jouissance indépendante de cette Maison du Peuple.
Depuis ses débuts dans l’action syndicale, Chéreau dirigea de nombreux mouvements revendicatifs, ceux-là particulièrement qui, à partir de la grande grève de 1900 dans le Bâtiment, améliorèrent sensiblement les conditions de travail dans cette corporation en y imposant un système de conventions collectives.
Ernest Chéreau joua un grand rôle dans le cadre des congrès de la Fédération du Bâtiment. Au congrès tenu en avril 1914, il se heurta violemment aux minoritaires à propos de la non-rééligibilité des fonctionnaires syndicaux. L’application de ce principe ruinerait le syndicalisme, estimait-il « car le manque de militants y est avéré ; j’ai voulu depuis longtemps me démettre du secrétariat, ajoutait-il, et je n’ai pu trouver personne qui puisse ou qui veuille me remplacer ». De plus, être permanent à 150 F par mois, ne constitue pas « un fromage ». Les partisans de la non-rééligibilité furent battus par 172 voix contre 39 et 5 abstentions.
Après la Première Guerre mondiale, Chéreau fut, lors des congrès fédéraux du Bâtiment, l’un des plus fidèles soutiens de la majorité confédérale. En juillet 1918, lors du congrès de Versailles, il appuya totalement Chauvin et Charbonnier. En mai 1921, à Dijon, il présenta avec Legay de Lyon et Selinghoffe de Paris, les thèses de la majorité confédérale en matière d’orientation syndicale. Mais cette motion, opposée à celle des minoritaires présentée par Le Pen, n’obtint pas la majorité : 96 mandats à la motion Chéreau, 165 à celle de Le Pen (cf. compte rendu du congrès, p. 689 et 738). Désormais les anciens minoritaires dirigèrent la Fédération.
Après la scission syndicale, Chéreau fut membre de la commission exécutive de la Fédération CGT du Bâtiment, Constant en étant le secrétaire (voir liste des noms à Berchon) et il continua à jouer un grand rôle au cours des congrès nationaux.
Le 17 février 1924, il faisait partie de la délégation de la Fédération nationale confédérée des travailleurs du Bâtiment et des Travaux publics qui rencontra une délégation de la Fédération nationale unitaire des travailleurs du Bâtiment et des TP (où figurait un autre rennais, Quemerais) en vue d’examiner la question de l’unité fédérale. Il fut aussi depuis sa création jusqu’en 1939 délégué titulaire de la Fédération régionale du Bâtiment (les cinq départements bretons, la Mayenne et la Sarthe).
En 1940, Chéreau était secrétaire de l’Union départementale CGT de l’Ille-et-Vilaine. Dès la signature du Manifeste des douze et la création du Comité d’études économiques et sociales, il avait été un des secrétaires d’Union départementale qui avait apporté un soutien fidèle à Christian Pineau (selon les archives de celui-ci dépouillées par Alya Aglan).
Il n’exerça plus de fonctions syndicales après la guerre. Il était fatigué et, d’autre part il ne l’aurait pu, ayant accepté un poste de conseiller municipal à Rennes pendant l’Occupation.
Ernest Chéreau s’éteignit, au début de 1947, à la suite d’une longue maladie. Ses obsèques eurent lieu à Rennes le 31 janvier 1947. Force ouvrière du 30 janvier 1947 salua celui qui « avait doté l’Union [d’Ille-et-Vilaine] de sa première maison ».

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article19788, notice CHÉREAU Ernest, Charles par Claude Geslin, Jean-Luc Pinol, Armand Rébillon, version mise en ligne le 25 octobre 2008, dernière modification le 8 novembre 2022.

Par Claude Geslin, Jean-Luc Pinol, Armand Rébillon

SOURCES : Arch. Nat. F7/13567 et F7/13603. — Le Semeur d’Ille-et-Vilaine, 1919-1947. — Comptes rendus des congrès de la Fédération CGT du bâtiment, 1918, 1921, 1925, 1927. — L’Aurore d’Ille-et-Vilaine, 1924. — L’Aurore socialiste, 1er février 1947 (portrait). — Alya Aglan, La Résistance sacrifiée, Flammarion, 1999, p. 44. — Témoignages recueillis par A. Rébillon. — État civil de Rennes.

ICONOGRAPHIE : La CGT, op. cit., p. 505.

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