JIMENEZ-MARTIN Jacinto

Par Daniel Grason

Né le 16 août 1902 à Garrovillas en Estrémadure (Espagne) ; communiste ; secrétaire du Comité de défense du peuple espagnol de Gennevilliers (Seine, Hauts-de-Seine).

Fils de Pablo et de Francisca Martin-Caldera, Jacinto Jimenez-Martin était marié et père de deux enfants, un garçon de douze ans et une fille de neuf ans. Dès 1929 il vivait avec sa famille 28 impasse Madeleine à Gennevilliers (Seine, Hauts-de-Seine). Il devint français par naturalisation en mai 1932.
Il travailla en 1936 aux Etablissements La Licorne à Colombes (Seine, Hauts-de-Seine), adhéra au Parti communiste, il n’y exerça aucune responsabilité. Il s’engagea dans le militantisme lors de la guerre d’Espagne. Il devint secrétaire du comité de Défense du Peuple espagnol. Il anima des initiatives de solidarité avec l’Espagne républicaine dans plusieurs villes de la banlieue Ouest. La défaite de l’armée républicaine l’affecta profondément. Il prit de la distance avec le Parti communiste « le Pacte germano-soviétique m’avait refroidi » déclara-t-il lors de son interrogatoire le 6 mars 1941.
Manœuvre spécialisé, il travailla aux Ateliers de Constructions de Puteaux (Seine, Hauts-de-Seine) du 30 août 1939 au 15 juin 1940, il fut évacué avec le personnel à La Rochelle (Charente-Maritime). Il s’inscrivit à son retour au fond de chômage de la ville de Gennevilliers le 1er juillet 1940.
Au cours du mois d’octobre 1940, l’un des dirigeants communistes de la ville, Raymond Colin lui demanda de participer à la diffusion de tracts de l’organisation clandestine, il refusa. Deux autres militants se présentèrent comme des réfugiés espagnols, venant de la part d’Henri Aguado le sollicitèrent en décembre 1940 pour participer à nouveau à un Comité d’aide aux réfugiés espagnols, il accepta.
Le 5 mars 1941 deux inspecteurs de la Brigade spéciale d’intervention (BSi) du commissariat de Puteaux se présentèrent vers 16 heures 30 au domicile de Jacinto Jimenez-Martin. Ils saisissaient dans sa cave deux livres sur la solidarité avec le peuple espagnol. Interrogé le lendemain, il fit remarquer que les deux ouvrages qui dataient de 1939 et lui avaient été remis par Izquierdo, un ancien secrétaire d’un comité de défense du peuple espagnol qui habita Colombes (Seine, Hauts-de-Seine). Ces livres provenaient du siège du Comité de défense du peuple espagnol avenue Mathurin-Moreau à Paris (XIXe arr.).
Incarcéré le 7 mars 1941 à la Maison d’arrêt de la Santé, 13e Division, cellule 46, il écrivit au Juge d’instruction le 6 mai. Il faisait part des difficultés familiales « mon épouse travaille, et se trouve dans des difficultés inouïes pour le ravitaillement, et pour s’occuper des soins ménagers. » Il s’inquiétait pour ses enfants « ils ont besoin de leur papa pour leur éducation. » Il relevait « la fragilité » de son inculpation, s’engageait « sur l’honneur, à [se] tenir à la disposition de la justice. » Le 17 avril le Juge d’instruction lui fit signifier son refus.
Le 23 avril 1941 il désigna son avocat Maître Guilpet 14 rue Monsieur le Prince à Paris (VIe arr.). Le 18 juin Jacinto Jimenez-Martin adressa un nouveau courrier au Juge d’instruction. Il demandait sa mise en liberté provisoire, écrivait « Je suis innocent des faits qui me sont reprochés. Je n’ai jamais été condamné et je suis malgré cela, détenu depuis le 7 mars 1941, à la Santé. » Il promettait de se présenter à chaque convocation, il soulignait que si sa « détention devait se prolonger [sa] femme et [ses] enfants seraient plongés dans le plus grand dénuement. »
Le 24 juillet 1941 il était relaxé. Du fait de son interpellation le 5 mars 1941. Il avait été radié rétroactivement du fonds de chômage de la ville de Gennevilliers à la date du 21 février 1941.
Le 12 mai 1945 Jacinto Jimenez-Martin témoigna devant la commission d’épuration de la police sur son interrogatoire au commissariat de Puteaux. « J’ai été interrogé, et frappé à coups de pied et de poing par le commissaire de police lui-même [Lucien Bizoire] qui a commencé et par deux autres personnes dont j’ignore l’identité. »
« Ces policiers voulaient savoir quelle part était la mienne dans l’activité clandestine du Parti communiste et il voulait que je leur dénonce d’autres personnes. Je suis resté 48 heures sans nourriture, après quoi, j’ai été transféré au Dépôt, puis à la prison de la Santé d’où j’ai été relaxé le 24 juillet 1941. »
« Je tiens à préciser que d’après le professeur Walter de l’Hôtel Dieu, les coups que j’ai reçus ont été la cause de ma trépanation, opération qui s’est déroulée à l’hôpital Laennec, le 12 août 1942. »
Le commissaire Lucien Bizoire fut arrêté le 22 août 1944 sur la voie publique et écroué le jour même. Transféré au camp de Saint-Denis le 29 octobre, transféré à nouveau au dépôt, le 10 janvier 1945 sur mandat de Monsieur Gerbinis, Juge d’instruction, il était incarcéré le 24 au Fort de Charenton, puis à la prison de Fresnes, le 24 avril 1945.
Lors de son procès le 19 octobre 1945, le Commissaire du gouvernement déclara que l’adjoint à la tête de la BS2, Pierre Gautherie : « Cent fois plus coupable » que Bizoire « a été gracié par le général de Gaulle que je considère comme le premier Résistant de France ; je ne passerai pas outre, car il y aurait injustice et je demande une peine de travaux forcés à perpétuité. » Puis s’adressant à Bizoire, ex. commissaire de Puteaux et dernier chef de la 3e section des Renseignements généraux, il lui lança  : « Il faut que vous portiez le poids de votre châtiment jusqu’à votre dernier souffle. » Après délibération, la Cour condamna Lucien Bizoire à cette peine et à l’Indignité nationale.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article198683, notice JIMENEZ-MARTIN Jacinto par Daniel Grason, version mise en ligne le 2 janvier 2018, dernière modification le 2 janvier 2018.

Par Daniel Grason

SOURCES : AN Z/4/11. – Arch. PPo. KB 10, 77W 1346, BA 1849. – Jean-Marc Berlière avec Laurent Chabrun, Les policiers français sous l’Occupation, Éd. Perrin, 2001.

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