RÜFHEL Eugène

Eugène Rüfhel naquit dans une famille protestante le 2 octobre 1873 à Strasbourg en Basse-Alsace, en Alsace-Lorraine, région de l’Empire allemand de 1871 à 1918. Né allemand, il devint français par réintégration en 1918. Comme ses frères Henri (1er août 1877-26 septembre 1961), et Charles, Eugène Rüfhel choisit les métiers du livre. Il termina son apprentissage typographique le 1er mars 1892. Eugène Rüfhel exerça ensuite sa profession en tant que compositeur à l’imprimerie Populaire Strasbourgeoise. Cette imprimerie fondée en 1902 et liée à la Section Française de l’Internationale Ouvrière dirigée par Jacques Peirotes (voir ce nom), Georges Weill (voir ce nom) et Eugène Imbs (voir ce nom) publie entre autre le quotidien socialiste La Presse Libre (Die Freie Presse). Eugène Rüfhel partit à la retraite le 26 octobre 1935.

Eugène Rüfhel adhéra au Syndicat Typographique de Strasbourg le 1er mars 1892. Cette organisation syndicale fondée le 18 septembre 1871 est reconnue depuis le 1er juillet 1919 comme la 175ième section de la Fédération Française des Travailleurs du Livre CGT. Mais Eugène Rüfhel débuta réellement sa carrière syndicale après la première guerre mondiale. Considéré par ses collègues comme « combattant, entreprenant et activiste », Eugène Rüfhel représenta les 2, 3 et 4 octobre 1919 la section de Strasbourg à la Conférence régionale de Metz. Il fut également délégué strasbourgeois aux congrès régionaux Alsace-Lorraine de 1921 à 1932. Parallèlement Eugène Rüfhel fut l’un des dirigeants du Comité régional Alsace-Lorraine.
La grande tâche de Eugène Rüfhel fut d’être le biographe des organisations du livre dans l’entre-deux-guerres. Il fut l’auteur de nombreux ouvrages en allemand sur le monde du livre strasbourgeois. Il rédigea en 1921 les Ecrits pour la commémoration des 50 ans d’existence du Syndicat des Typographes de Strasbourg, 1871-1921 ( Gedenkschrift zur Feier des 50 jährigen Bestehen des Syndikats der Buchdruckergehilfen zu Strasbourg 1871-1921) succédant à E. Hoffmann qui avait rédigé celui pour les 25 ans d’existence. En 1933, Eugène Rüfhel écrivit un opuscule sur les 150 ans d’existence de Société Typographique (150 jährigen Bestehens der Alten Kasse) et un livret sur la fête du jubilé de la Société Typographique, (Jubiläumfeier der Alten Kasse).
Le Congrès Régional Alsace-Lorraine du 4 et 5 mai 1921 décida la création d’un journal Le Travailleur du Livre en remplacement de l’ancienne gazette, le Bulletin. Cette tâche fut confiée à Eugène Rüfhel. Sous sa responsabilité parut le premier numéro du Travailleur du Livre le 1er novembre 1921. Le sommaire est très large. On y trouve aussi bien des informations générales et d’actualité, la situation politique et des informations plus spécifiques sur les techniques de l’industrie graphique ou sur les caisses de secours. On y trouve également des annonces publicitaires.
Imprimé sur les presses de l’Imprimerie Populaire Strasbourgeoise, Le Travailleur du Livre parut chaque mois au départ puis 3 fois par mois (les 1er, 11 et 21 du mois). Dès le début, Le Travailleur ainsi nommé par les typographes fut quasi exclusivement rédigé en allemand. Il fut cependant considéré comme un organe de transition jusqu’au moment où tous les collègues comprendront le français. Pour les francophones, les dirigeants conseillèrent, à défaut, la lecture du journal fédéral, l’Imprimerie Française. Le Travailleur du Livre tint aussi bien lieu de revue professionnelle, que de journal syndical et politique. Le rôle et la place du Travailleur du Livre se précise dans les années 1930, servant entre autre l’intégration dans l’ensemble français et à la formation des typographes alsaciens à la vie syndicale française. Ce fut aussi une ouverture vers les autres sections de la Fédération Française des Travailleurs du Livre. Eugène Rüfhel assumera la tâche de rédacteur jusqu’en 1923 puis fut remplacé en 1924 par Jacques Herb (voir ce nom).

Eugène Rüfhel s’impliqua dans le système mutualiste du livre. En Alsace, le monde du livre est caractérisé très tôt par l’existence de nombreuses caisses mutuelles de solidarité : la Société Typographique de Strasbourg en faveur des malades et des invalides fondée en 1783, la caisse des veuves et des invalides des typographes d’Alsace-Lorraine fondée en 1835 et la mutuelle des travailleurs du livre de Strasbourg fondée en 1910. Ces sociétés de secours sont des caisses d’entraide mais également des lieux de défense collective et d’affirmation d’une appartenance à une profession. Le mutualisme a contribué à la naissance du syndicalisme typographique le 18 septembre 1871. Eugène Rüfhel fut assesseur de la Société Typographique de Strasbourg en 1931.

Eugène Rüfhel s’impliqua dans le mouvement coopératif alsacien. Eugène Rüfhel fut un des membres fondateurs de Société Coopérative de Consommation de Strasbourg en 1902. Cette coopérative surnommée « la Coopé » comptait en 1902, 260 sociétaires et 1 magasin, rue des dentelles à Strasbourg. En 1914, la "Coopé" possède son propre entrepôt (construit en 1911 au Port du Rhin) et compte déjà 35 magasins. En 1928, la Coop regroupe 35000 sociétaires et 100 magasins.

Marié et père de deux filles, Eugène Rüfhel habitait au 39 rue de Zurich à Strasbourg. Il mourut le 22 octobre 1959.