Par Antoine Olivesi, Gérard Leidet
Né le 9 janvier 1912 à Nanterre (Seine, Hauts-de-Seine), mort le 7 novembre 1969 à Paris ; militant communiste ; rédacteur en chef de l’Avant-Garde ; résistant ; rédacteur en chef de l’Humanité dimanche ; historien.
Issu d’une famille ouvrière, militant des Jeunesses communistes, Maurice Choury entra à la direction du mouvement lors du congrès extraordinaire d’Ivry-sur-Seine en février 1934. Autodidacte, il fut pendant six ans rédacteur en chef de l’Avant-Garde où il signa parfois de son pseudonyme, Léchaud, tout en collaborant à l’Humanité. Choury fit partie de la délégation française au IIe congrès mondial de la Jeunesse réuni en août 1938 à Vassar College (près de New York).
Mobilisé en 1939, il fut envoyé sur le front en Alsace et en Lorraine où il fut fait prisonnier puis libéré au titre du corps sanitaire.
À la fin de l’année 1942, afin de rejoindre sa belle-famille, Maurice Choury regagna la Corse devenue sa terre d’adoption depuis son mariage avec Emma Perini, (voir Emma Choury - dont la sœur Vincentella, qui se faisait appeler Danielle, avait pris le nom de Danielle Casanova depuis son mariage avec Laurent Casanova en 1933.
Appelé à siéger au conseil municipal d’Ajaccio après la Libération, il installa Le Patriote, journal clandestin, dans les locaux réquisitionnés de La Dépêche de la Corse. Maurice Choury était membre du conseil de préfecture et du Comité départemental de Libération mis en place en octobre par le Gouvernement d’Alger. Son ouvrage Tous bandits d’honneur, publié en 1956, retraça le combat des résistants corses. Il rendait ainsi hommage à ses camarades de combat en écrivant ce livre, réédité en 1958 et 1988, qui sera longtemps l’ouvrage de référence sur l’histoire de l’occupation et de la libération de la Corse, avant la parution du livre collectif dirigé par Hélène Chaubin (voir Corse des années de guerre 1939-1945, Éditions Tirésias-AERI, Paris, 2005) et la thèse de Sylvain Gregori (Forti saremu se saremu uniti. Entre continuité et ruptures, Résistance (s) et société corse juillet 1940-septembre 1943, Université Aix-Marseille I, 2008). Cependant, cet ouvrage suscita de fortes critiques de la part de résistants communiste du nord de l’île qui estimaient qu’il avait fait la part trop belle à la région d’Ajaccio et à certains résistants au détriment d’autres. Ils lui reprochaient aussi de mettre en avant le Front national en passant sous silence le rôle fondamental de la région corse du PCF dans la mise en place et le contrôle de ce mouvement. La polémique remonta jusqu’au Comité central.
Dix ans plus tôt déjà, Maurice Choury avait été averti par le secrétariat et critiqué sévèrement par André Marty pour la publication d’un texte sur la libération de la Corse. Dans une lettre envoyée à Maurice Thorez le 12 juillet 1946, l’ancien dirigeant du Parti communiste à Alger écrivait : « Je tiens à faire observer qu’il me paraît indispensable de maintenir l’uniformité des décisions pour tous les Ministères, afin d’éviter de créer des frictions. Or il est bien évident que si on relève Cliques par exemple, il faut également relever Choury. Car Choury, comme membre du Parti, a publiquement accompli un acte de falsification de la ligne du Parti par l’édition de son document illustré sur la Corse. Il connaissait cependant très nettement la ligne du Parti puisqu’elle a été imprimée dans Sept ans de lutte (rapport au 10e Congrès). Il est évident que le fascicule Choury-Giovoni est un document fractionnel qui visait uniquement à attaquer certains camarades. En toute justice communiste, il devrait être relevé avant Cliques et avant Nesk, qui sont incomparablement moins fautifs que lui. Propositions : maintenir Cliques et Nesk au cabinet Tillon, faire remplacer Nesk. Faire observer à Choury que l’avertissement décidé par le secrétariat sera le dernier. Il y a urgence à prendre une décision pour que le ministère intéressé fasse passer ces nominations à l’officiel. » (Arch. Thorez, carton 626AP/284, dossier « André »). Plus consensuelle avait été la bande-dessinée qu’il avait préparée avec Arthur Giovoni et qui avait été publiée dans collection « Jeunesse » des éditions France d’Abord peu après la libération du continent (Vendetta, une aventure épique. Résistance et Libération de la Corse).
Démobilisé, revenu sur le continent à la Libération de la France, Maurice Choury redevint journaliste. Il dirigea La Victoire à Bordeaux, puis, à Paris, l’Union française d’information qui travaillait pour la presse communiste, et, enfin, participa à la création de l’Humanité dimanche.
Homme de culture et d’engagements, Maurice Choury consacra plusieurs livres à la Commune de Paris, aux grognards, à Courbet, à Rimbaud… Il participa, notamment, (avec Pierre Angrand, Jean Bouvier, Henri Dubief, Jeanne Gaillard et Claude Perrot) à la deuxième édition, revue et complétée, de l’ouvrage dirigé par Jean Bruhat, Jean Dautry, et Emile Tersen, La Commune de 1871 (Éditions sociales, 1970) sans pouvoir assister cependant à la parution de l’ouvrage, prévue pour les commémorations du centenaire de la Commune. Il fut le second membre de l’équipe d’historiens (peu après Jean Dautry décédé en 1968) qui disparaissait à la veille de l’édition du livre. Maurice Choury succomba en effet à une crise cardiaque le 7 novembre 1969 au cours d’une conférence qu’il donnait à la Maison des Jeunes d’Ivry, avant de pouvoir réaliser son rêve de revenir s’installer à Ajaccio, dans cette Corse qu’il avait si passionnément aimée.
En juillet 1970, Jean Bruhat, dans l’avant-propos de l’ouvrage rendit hommage à son travail d’historien, et salua sa mémoire : "Après Jean Dautry qui avait été l’un des maîtres d’œuvre de cette entreprise, le destin a frappé Maurice Choury qui s’imposait de plus en plus comme un des historiens les plus avertis des hommes et des choses de la Commune. Il avait eu la gentillesse de revoir notre texte et l’on a retrouvé sur son bureau de très utiles remarques dont il devait s’entretenir avec moi. C’est un devoir pour nous que d’ajouter son nom à la liste des collaborateurs de cette Commune de Paris".
Par Antoine Olivesi, Gérard Leidet
ŒUVRE : Parallèlement à sa carrière journalistique, il fit œuvre d’historien en publiant
Vendetta, Editions France D’abord, 1950, [rééd. Alain Piazzola, 2013]. – Tous bandits d’honneurs ! Résistance et libération de la Corse (juin 1940-octobre 1943), préface d’Arthur Giovoni, Editions sociales, 1958, [rééd. Alain Piazzola, 2011]. – Les Origines de la Commune, Paris livré, Éditions sociales, 1960 – La Commune au quartier Latin, Amis du livre progressiste, 1961 – Eugène Pottier, auteur de l’Internationale, Amis de la Commune, 1966. – La Commune au cœur de Paris, Éditions sociales, 196. – Les Grognards et Napoléon, Librairie académique Perrin, 1968. – 1871, les damnés de la terre, Tchou, 1969. – Bonjour, monsieur Courbet, Éditions sociales, 1969. – Les Poètes de la Commune, Éditions Seghers, 1970. – Les Cheminots dans la bataille du rail, Librairie académique Perrin, 1970 – Le Paris communard, Librairie académique Perrin,1970. – Participation à la deuxième édition de l’ouvrage collectif La Commune de 1871, Jean Bruhat, Jean Dautry, Emile Tersen, Éditions sociales, 1970.
Fonds Maurice Choury
à découvrir sur www.bdic.fr/pdf/Fonds_Maurice_Choury.pdf
Issu du don que fit la famille de Maurice Choury à la Bibliothèque de Documentation Internationale Contemporaine, ce fonds constitue un ensemble de près de 400 monographies et périodiques.
SOURCES : Arch. Thorez. — Le Monde, 9-10 novembre 1969. — J. Varin, Jeunes comme JC, op. cit. — Le Mémorial des Corses, op. cit., t. 4, p. 449, 463, 469, 474, 475 et 505. — L’Humanité-Dimanche 9 novembre 1969. — L’Humanité, 8 novembre 1969. — Renseignements fournis par son épouse, Emma Choury. — RGASPI, Moscou, archives biographiques du Komintern, 495 270 8461. — Jean Bruhat, Jean Dautry, et Émile Tersen (dir.), La Commune de 1871, deuxième édition revue et complétée, Editions sociales, 1970. — Témoignage de sa fille Isaline Amalric Choury (« Portrait intime ») http://www.tousbanditsdhonneur.fr/maurice-choury-biographie.html — Notes de Jean-Marie Guillon.