MOREAU Arthur, Juste

Par Daniel Grason

Né le 9 août 1900 à Somain arrondissement de Douai (Nord), mort le 17 juillet 1944 à Mauthausen (Autriche) ; trempeur ; sympathisant communiste ; déporté de Villeneuve-la-Garenne (Seine, Hauts-de-Seine).

Fils de d’Émile, 45 ans, voiturier et de Elisabeth née Laboux, 44 ans, ménagère, Arthur Moreau savait lire et écrire, de la classe 1920 recrutement de Cambrai, il effectua son service militaire au 81e Régiment d’Artillerie. Il épousa le 22 décembre 1922 Angèle Meunier. Le couple eut trois enfants Arthur, Angèle et Georgette, âgés en 1941 de dix-huit ans, seize-ans et treize ans, en 1934 le couple Moreau divorça.
Arthur Moreau quitta alors son pays natal avec ses trois enfants, la famille habita 1 rue Saint-Denis à Saint-Ouen (Seine, Seine-Saint-Denis). Depuis 1939, Arthur Moreau louait une maisonnette au 47 boulevard Galliéni à Villeneuve-la-Garenne il vivait outre ses trois enfants avec Jeanne, mère d’un garçon âgé de treize ans prénommé Jacques.
Il travailla de 1934 à 1939, en qualité de trempeur aux Aciéries Delachaux 119 avenue Louis-Roche à Gennevilliers, puis affecté spécial à la Somua, 170 avenue de Saint-Ouen (boulevard Victor-Hugo). En juin 1940, des ateliers ont été évacué à Périgueux, Arthur Moreau revint vers 20 juillet, il travailla à nouveau chez Delachaux.
En sus de son travail, il tenait à son domicile un commerce de bois de récupération pour les particuliers et de bois de chêne pour les boulangers, il était inscrit au registre du commerce cette activité. Il était sans engagement politique, un militant communiste lui rendit visite, un soir de janvier 1941. Il se présenta comme se prénommant « Émile » , ce qui était exact, il ne donna pas son nom, se nommait Le Rigoleur habitait Gennevilliers, et venait de la part de Raymond Aubrun, ex. secrétaire de la Bourse du Travail, il lui demanda s’il n’avait pas un local à lui louer pour entreposer du matériel de la Bourse du Travail. Arthur Moreau lui proposa son grenier où il y avait une petite chambre. « Émile » accepta. Il revint quelques jours plus tard, un soir vers 20 heures 30 accompagné de deux militants qui tiraient une voiture à bras, ils déchargèrent plusieurs paquets de papier et les entreposèrent dans le grenier.
« Émile » demanda à Arthur Moreau s’il pouvait contre rétribution prendre ses repas. Après concertation avec son amie Jeanne, il accepta. Un soir le militant hébergé annonça qu’il avait « la bécane » et qu’il allait « pouvoir travailler ». Un jour « Émile » lui montra un tract et lui lut quelques lignes. Artur Moreau fut surpris, en parla le soir même à Jeanne. Selon ses déclarations ultérieures aux policiers Arthur Moreau avait « pressenti que cet homme allait nous attirer des ennuis, toutefois je ne lui ai pas dit de se transporter ailleurs. »
Arthur Moreau accepta d’emmener sur son vélo des paquets de tracts à des militants de Gennevilliers rue Alexandre, rue des Caboeufs et deux fois boulevard Galliéni. Á la mi-février « Émile » lui annonça qu’il y avait eu des arrestations, il tira les derniers tracts le lundi 24 février. Moreau s’inquiéta que faire en cas de visite policière ? Il devait répondre que le duplicateur était là avant la dissolution du Parti communiste.
Le 3 mars 1943 vers 18 heures deux inspecteurs de la BSi du commissariat de Puteaux interpellèrent Arthur Moreau, sa maison fut perquisitionnée, mais la machine ne fut pas trouvée. Lors de son interrogatoire il déclara que les tracts étaient dupliqués par un prénommé « Émile » qui prenait ses repas chez lui, et qui réglait le 25 de chaque mois, il reconnut qu’il avait transporté des tracts. Devant le commissaire Lucien Bizoire, il affirma : « Je n’ai jamais appartenu au Parti communiste, j’ai quelquefois fréquenté les réunions, mais je n’ai pas assez d’instruction pour faire de la politique. »
De retour au commissariat les deux inspecteurs pressèrent Arthur Moreau de questions, il fut pour le moins bousculé, voire tabassé. Il indiqua que la machine et le papier était dans le grenier. Moreau accompagna les policiers à son domicile, la ronéo de marque Gestetner, et 66 000 feuilles de papier duplicateur dissimulés dans la cavité d’un tas de bois étaient saisis. Mesure rarissime pour des raisons de santé, Arthur Moreau fut laissé libre probablement que très peu de temps.
Les policiers firent une enquête de voisinage, personne ne connaissait Arthur Moreau comme militant politique. L’entreprise Delachaux qui l’employait en tant que trempeur au chalumeau le considérait comme un ouvrier sérieux, jamais il n’avait manifesté d’opinion politique.
Incarcéré à la prison de la Santé il désigna un avocat pour assurer sa défense. Le 21 octobre 1941, vingt détenus de Gennevilliers, Levallois-Perret, Villeneuve-la-Garenne, Puteaux, Suresnes, Bois-Colombes et Rueil-Malmaison, comparurent devant la Section spéciale de la Cour d’appel de Paris. Arthur Moreau a été condamné à huit ans de travaux forcés.
Il a été transféré le 12 janvier 1942 à la centrale de Caen (Calvados), le 16 juillet 1942 il était envoyé à la prison de Fontevrault, le 23 octobre 1943 à Blois (Loir-et-Cher). Transféré au camp de Compiègne, le 22 mars 1944 il était dans le convoi de 1218 hommes qui arriva le 25 mars 1944 à Mauthausen. Très affaibli par les épreuves de l’emprisonnement, Arthur Moreau a été gazé au château d’Hartheim le 17 juillet 1944, moins de quatre mois après son arrivée. Plus de la moitié des déportés de ce convoi moururent. Sur son acte de naissance figure comme date de sa mort le 17 juillet 1944 sans indication de lieu, et sur le Livre-Mémorial le 25 septembre 1944.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article200026, notice MOREAU Arthur, Juste par Daniel Grason, version mise en ligne le 10 février 2018, dernière modification le 11 juin 2018.

Par Daniel Grason

SOURCES : AN Z/4/11. – Arch. PPo. BA 1928, BA 2057, KB 11. – Bureau Résistance (pas de dossier). – Livre-Mémorial, FMD, Éd. Tirésias, 2004. – Roger Poitevin, Abbaye-Bagne de Fontevraud 1940-1944, Éd. AFMD 49, 2009. – État civil 1 Mi EC 574 R 002 acte n° 94.

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