CHÊNE Joseph, Jean

Par Robert Goujon

Né le 16 février 1908 à Bourg-en-Bresse (Ain), mort déporté le 24 mai 1945 dans le camp de concentration de Sandbostel , cheminot ; syndicaliste CGT, militant communiste ; résistant FTP.

Stèle des déportés au dépôt SNCF de Lyon-Mouche
Stèle des déportés au dépôt SNCF de Lyon-Mouche

Joseph Jean Chêne est le fils de Jean Baptiste Chêne, maçon de 28 ans et de Marie Prudence Paubel, âgée de 19 ans. La famille habite dans cette préfecture de l’Ain.
Il commence sa vie professionnelle comme fleuriste puis est appelé sous les drapeaux du 10 mai 1928 au 7 octobre 1929.
Après sa libération, Joseph Jean Chêne fut embauché à la compagnie de chemin de fer PLM, le 28 octobre 1929 comme Homme d’équipe auxiliaire au dépôt d’Ambérieu (Ain). Il fut affilié à la Caisse des retraites le 1er novembre 1930 comme manœuvre. Muté sur Dijon en octobre 1930, puis au dépôt de Lyon-Mouche, il devint manœuvre spécialisé (MVSP) le 1er octobre 1937.
Le 7 juin 1930 Joseph Jean Chêne se maria avec Marie Henriette Neyroud à Bourg en Bresse, ils eurent une fille, Monique, en 1931. Le couple résidait 16 rue Croix-Barret, Lyon 7e.
Militant de la CGT et du PCF, Joseph Jean Chêne prit part à l’action communiste clandestine dès la fin 1939. Avec la dissolution du Parti Communiste, la fédération du Rhône était coupé de la direction, les militants étaient, soit mobilisés, soit internés. Joseph Jean Chêne fut chargé de la continuité politique et en compagnie de Jules Serval, cheminot de Perrache, il rétablit le contact avec le comité central, notamment avec Georges Maranne. Il organisa des sabotages sur les installations ferroviaires ; en décembre 1940 et janvier 1941 se sentant menacé au sein même de l’entreprise, qui pouvait être un allié zélé du régime, Joseph Jean Chêne décida de ne pas reprendre son poste au dépôt de Lyon-Mouche. Il se consacra exclusivement à la résistance. Il fut radié des cadres SNCF le 9 janvier 1941.
Arrêté par la police de Vichy le 14 mars 1941 avec son camarade Antoine Neyret, il fut incarcéré à la prison à Saint Paul de Lyon et « jugé ». Le Procureur Général de la cour d’appel de Lyon le condamna à 3 ans de prison ferme pour infraction à la loi du 24 septembre 1939 (luttes contre les menées communistes et antinationales). Il formula un pourvoi en cassation.
Le 13 novembre 1941, il fut condamné cette fois par le Tribunal Militaire de Lyon pour activité politique illégale et est transféré à la prison de Saint Étienne-Bellevue. Le 25 septembre 1943, les FTPF de la Loire opèrèrent une attaque surprise sur cette prison et 31 détenus sont libérés. Ils comprennaient des membres important du réseau. Joseph Jean Chêne s’évada de sa cellule avec ses camarades et rejoignit les rangs des FTP de la Loire. Il retrouva son camarade Henri Favoriti, cheminot d’Oullins, licencié de la SNCF pour « propagande communiste », qui fut l’un des organisateurs de cette spectaculaire évasion. Favoriti recommença la même opération 6 jours plus tard au Puy (Haute Loire), libérant cette fois 80 prisonniers politiques.
Joseph Jean Chêne prit le pseudonyme de « Jean Louis Dubois ». Grâce à ses qualités, son courage et sa clairvoyance, Joseph Jean Chêne se vit confier des responsabilités de plus en plus grandes au sein de l’armée des Francs-Tireurs et Partisans. Il fut nommé au grade de commandant et à partir du 12 mai 1943, il exerça les fonctions de chef du service liaisons et transmissions de l’état-major de l’Inter-Région Loire, Haute Loire, Puy de Dôme. Il assura de nombreuses missions de plus haute importance sur Saint Étienne et ses alentours.
En avril 1944, Joseph Jean Chêne fut envoyé en mission au service de l’Etat-major à Avignon. Une nouvelle fois il fut arrêté sur dénonciation le 1er mai 1944 par la Sipo-SD et terriblement torturé.
Il fut transféré à Royalieu-Compiègne. Le 23 juillet 1944 il fut déporté pour le camp de concentration de Neuengamme par le convoi I 250 où il arriva le 31 juillet sous le matricule 40293. On curut d’abord qu’il était décédé des suites des mauvais traitements lors de son interrogatoire. Le camp de Neuengamme fut libéré par les Britanniques le 5 mai 1945. La mort de Joseph Jean Chêne est déterminée « entre le 1er août 1944 et le 1er juillet 1946 » (note du Ministère de Anciens Combattants de 1952, avis de disparition 577823). Mais le témoignage d’un camarade déporté, non datée, indique qu’il l’a vu en avril 1945 à l’infirmerie de Hambourg.
La date officielle de son décès est le 24 mai 1945 dans le camp de concentration de Sandbostel. Ce camp était qualifié par les nazis eux même, de mouroir de Neuengamme. Joseph Jean Chêne s’éteignit à l’âge de 38 ans.
Il fut décoré de la Croix de Guerre avec citation de l’ordre de la division en 1952 et fait Chevalier de la Légion d’Honneur par décret du 7 novembre 1958. La mention « Mort pour la France » est apposée sur son acte de décès ainsi que la mention « Mort en déportation » (Arrêté du 9 mai 2012, Journal Officiel de la République Française). Il est homologué FFI et Déporté Interné Résistant (DIR).
Sa mémoire fut honorée sur deux plaques commémoratives du dépôt de Lyon-Mouche. La plaque dites « des déportés » auxquels sont associés les noms de Dien, Guérin, Lavignon, Largier et celle des cheminots du dépôt, morts pour la France. Son nom est également gravé sur la stèle régionale SNCF de Lyon (ex-4ème arrondissement du réseau Sud-Est), porte Saône en gare de Lyon Perrache. Le monument aux morts de Bourg en Bresse rappelle sa mémoire.
Après-guerre, les responsables du secteur CGT des cheminots de la région de Lyon décidèrent d’organiser à Givors, un grand tournoi de boules afin de retrouver des moments de fêtes et de fraternité après ces années sombres. Ils donnent à ce grand rassemblement convivial et festif, le nom de Challenge Pierre Semard et associent tout naturellement celui de Jean Joseph Chêne. Ce tournoi se perpétua jusqu’à l’aube des années 2000.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article200772, notice CHÊNE Joseph, Jean par Robert Goujon, version mise en ligne le 11 mars 2018, dernière modification le 11 mars 2018.

Par Robert Goujon

Stèle des déportés au dépôt SNCF de Lyon-Mouche
Stèle des déportés au dépôt SNCF de Lyon-Mouche

SOURCES : Guide des recherches SNCF pour la période 39/45-118LM108/001, 118LM120/009, 118LM120/015 Attestation de Charles Perrin alias Vauban, commandant FTPF. — Témoignage d’Antoine Neyret dans le livre « Mémoire et Civisme » de Marcel Chadebech. — Site Rail & Mémoire. — Service historique de la Défense, Caen cote AC 21 P 43885 et Vincennes, GR 16 P 126120. — Recherche et documentation de Robert Goujon de l’IHS des cheminots Rhône-Alpes.

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