CHARPENTIER Albert

Par Frédéric Stévenot

Né le 22 juin 1891 à Évergnicourt (Aisne), mort le 21 janvier 1971 à Menton (Alpes-Maritimes) ; marié ; mécanicien-ajusteur, quincaillier ; résistant (sous-lieutenant) au sein du groupe Liberté (Ceux de la Résistance), région C du département de la Marne ; déporté.

Albert Charpentier à son retour de Dachau, 14 mai 1945
Albert Charpentier à son retour de Dachau, 14 mai 1945

Fils de Charles Charpentier et de Marguerite Harmant, domiciliés à Évergnicourt (Aisne), Albert Charpentier se maria le 22 mai 1920 à Juvincourt (Aisne) avec Germaine Avé. Le couple eut six enfants : Pol, Henri, Gisèle, Jeannine, Jean-Claude et Gérard.

Résidant à Witry-lès-Reims (Marne) en 1912, où il exerçait comme mécanicien-ajusteur, Albert Charpentier fut incorporé au 6e régiment de cuirassiers le 1er octobre 1912. Il passa ensuite au parc aéronautique n° 4, au 3e groupe d’aviation (21 mars 1916), au 2e groupe (1er janvier 1917). Il fut enfin démobilisé le 30 mars 1919, où il déclara se retirer à Neufchâtel-sur-Aisne (Aisne).

Père de cinq enfants à la déclaration de la guerre, il fut brièvement mobilisé le 12 septembre 1939, pour être affecté à la base aérienne de La Malmaison (Aisne) comme conducteur. Il fut renvoyé dans ses foyers le 4 novembre suivant, et classé sans affectation.

Dès l’été 1940, Albert Charpentier commença à récupérer du matériel militaire (armes, munitions...) abandonné lors de la campagne de France. Il constitua des dépôts, et facilita également l’évasion de prisonniers de guerre (notamment pour passer l’Aisne). Il fut en cela aidé par l’un de ses enfants, Henri et d’autres personnes.

La proximité avec Reims permit des contacts avec la Résistance rémoise. Un groupe fut constitué à Neufchâtel-sur-Aisne, qui fut à l’origine de nombreux sabotages dans le secteur, notamment le canal de l’Aisne, la sucrerie de Guignicourt, etc.

Le groupe fut démantelé à la suite d’une dénonciation, le 24 février 1944. Vingt-quatre résistants, dont Albert Charpentier, furent arrêtés par la Sipo-SD de Saint-Quentin pour « actes de franc-tireur, attentats et sabotages de voies ferrées ». Les arrestations suivirent celle de Paul Gillant, intervenue le 19, ce qui a jeté la suspicion sur lui : il fut accusé post mortem d’avoir donné les noms de ses camarades lors de l’interrogatoire, ce qu’aucun élément ne permit de confirmer. Il est probable, sans aucune certitude, que le groupe fut infiltré comme le furent ceux de la région d’Aubenton (voir Gilbert Sauvez et Émile Fontaine), démantelés à la même période.

Quoi qu’il en soit, dix-sept membres de « Liberté » périrent : huit furent fusillés ; huit moururent en déportation ; un autre fut tué en mission [1].

Détenu à Saint-Quentin, comme les autres arrêtés, Albert Charpentier fut transféré à Compiègne, ce que son fils emprisonné au même endroit en fut informé, comme l’indique ses dernières lettres. Henri avait en effet été arrêté le même jour que lui ; condamné à mort, il fut exécuté au stand de tir de Saint-Quentin le 8 avril 1944.

Albert Charpentier fit partie du cinquième convoi (I. 240) à destination de Dachau (le premier partit le 18 juin 1944), qui fut appelé le « train de la mort » en raison de la forte mortalité pendant le transport (on dénombra au moins 500 morts sur un total de 2 152 déportés). Le départ eut lieu de Compiègne, le 2 juillet 1944, sous une chaleur accablante ; il fut freiné par des sabotages de la voie à proximité de Reims (Saint-Brice-Courcelles, Bétheny) ; il arriva à destination le 5 juillet.

Malgré son âge (53 ans), Albert Charpentier (matricule 76 646) réussit à survivre. Les Américains libérèrent Dachau le 29 avril 1944, mais le camp fut mis en quarantaine. Avec quelques autres, il put s’enfuir en profitant du bus affrété par une Rémoise, le docteur Desormeaux. Le groupe arriva le 13 mai au centre d’accueil, rue de la Paix à Reims, en fin d’après-midi. Albert Charpentier était dans un état tel que son épouse ne le reconnut pas dans un premier temps. Il souffrit dès lors des séquelles de sa déportation (troubles pulmonaires, articulaires, cardiaques, traumatismes...).

Albert Charpentier fut homologué comme sous-lieutenant de la Résistance intérieure française et déporté-interné de la Résistance (dossier GR 16 P 121605). Il reçut la médaille militaire (par décret du 29 août 1953) ; la croix de guerre 1939-1945 lui fut attribuée subséquemment. La Légion d’honneur (décret du 9 janvier 1962, JO du 13 janvier 1962) lui fut remise à Laon le 3 juin 1962, des mains de René Burlot, président des Déportés de l’Aisne et officier de la Légion d’honneur.

Profondément marqué par les souffrances subies lors de son incarcération et de sa déportation, très affecté par la mort de son fils, Albert Charpentier mourut le 21 janvier 1971.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article201893, notice CHARPENTIER Albert par Frédéric Stévenot, version mise en ligne le 17 avril 2018, dernière modification le 20 octobre 2019.

Par Frédéric Stévenot

Albert Charpentier à son retour de Dachau, 14 mai 1945
Albert Charpentier à son retour de Dachau, 14 mai 1945

SOURCES : Arch. dép. Aisne, J1447 ; J 1461/13 ; 1 R 2 204 ; 5 Mi 1743 (état civil d’Évergnicourt). SHD, dossiers adm. des résistants. — Pol Charpentier, La Résistance dans l’Aisne. Neufchâtel-sur-Aisne. Le groupe « Liberté », sans lieu ni date, ni pagination (rédigé « quarante ans après » les faits, il comporte les deux lettres). — Sites Internet : Fondation pour la mémoire de la déportation ; base Léonore, Légion d’honneur. — Renseignements communiqués par Gérard Charpentier.

ICONOGRAPHIE. Coll. part.

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