BIOSCA Marius, Julien [pseudonyme dans la résistance : Robert]

Par Louis Botella, Eric Panthou, Manuel Rispal

Né le 21 mars 1897 à Anduze (Gard) ; mort le 5 février 1974 à Cavaillon (Vaucluse) ; mécanicien cheminot ; syndicaliste CGT du Gard ; militant communiste ; résistant au sein du réseau Résistance-Fer et des Francs-tireurs et partisans (FTP) ; membre du camp Wodli ; déporté.

Fils de Julien Biosca et de Marie, Antonie, née Dugas, Marius Biosca eut une instruction primaire. Il fut mobilisé en 1917 au 8ème Génie à Angoulème, combattant en France et en Orient et reçut la croix de guerre. Il se maria le 30 novembre 1917 à Anduze avec Brigitte, Églantine Ménard. Le couple eut trois enfants.

Il devint mécanicien cheminot en 1920, habitant 25 rue Richelieu à Nîmes (Gard). Il adhéra à la CGTU en 1926 (prétendant lors de son arrestation en 1943 l’avoir quitté dès l’année suivante pour rejoindre la CGT en 1934 seulement). Mécanicien de route au dépôt de Nîmes, et alors qu’il était secrétaire du syndicat CGT de la section technique des mécaniciens-chauffeurs du dépôt de Nîmes, délégué du personnel, il fit l’objet d’une suspension sans solde du 16 décembre 1938 au 20 février 1939, après la grève générale et les manifestations du 30 novembre 1938 où il avait été considéré comme un des meneurs. Le conseil de discipline le sanctionna d’un déplacement d’office au même grade au dépôt de Vesoul (Haute-Saône), accompagné d’un dernier avertissement. Il rejoignit donc le réseau de l’Est.
Le 1er juillet 1939, il fut réintégré dans son réseau suite à une grâce administrative et nommé à Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme). La famille s’installa dans cette commune au 20, rue Jeanne-d’Arc. Pendant cette période, Biosca se rendit régulièrement à Nîmes pour voir son fils mais aussi résider dans la maison qu’il avait conservée 25 rue Richelieu. Il était considéré à Nîmes comme un communiste notoire selon la police.

Établir son parcours de résistant est complexe ; parce qu’il a appartenu à plusieurs mouvements (FTP et Résistance-Fer) mais aussi parce que ses déclarations et écrits donnent des informations sur les dates et lieux ne correspondant pas toutes. Surtout, si on s’en tient à la période durant laquelle il a été en Ardèche et où il dit avoir été un des fondateurs du camp Wodli en Haute-Loire, son témoignage est très fermement rejeté par l’un des cadres du Wodli, Henri Julien, jetant ainsi le doute sur l’ensemble des propos de Biosca parus dans son livre témoignage. Le travail des historiens confirme la mise en doute des propos de Biosca.

Marius Biosca rejoignit la Résistance au sein du réseau Résistance Fer en Auvergne et fut considéré comme le premier FTP au dépôt de Clermont-Ferrand, saboteur spécialisé.
Dans son dossier de résistant, il place sa date d’entrée dans la Résistance au 19 février 1943. En revanche, dans l’ouvrage qu’il a publié, il dit avoir pris des responsabilité dès la fin de l’année 1941 dans les FTP, après avoir été contacté par un dénommé Jean, non identifié. Il s’agissait d’organiser les cheminots. Biosca se présente alors comme "responsable de la ville", ce qu’il faut sans doute interpréter comme responsable des FTP pour Clermont-Ferrand. Il nomma alors son camarade Dédé, non identifié, responsable des groupes FTP cheminots du dépôt de Clermont-Ferrand, le voyant une fois par semaine pour lui donner ses instructions, en particulier de sabotages. Il raconte comment il parvint en décembre 1941 à mettre 6 heures pour acheminer un train avec des Allemands de Gannat (Allier) à Clermont-Ferrand, cinquante kilomètres plus loin. Il reçut plusieurs blâmes et sanctions pécuniaires de sa hiérarchie pour ces retards, et même accusé d’être un saboteur. Cela lui valut d’être perquisitionné à l’hôtel où il demeurait. Il contribua aussi à la propagande en diffusant tracts, affiches et papillons dans Clermont-Ferrand.

En octobre 1942, il indique qu’il se mit à la tête des grèves des 15, 16 et 17 octobre contre l’envoi de jeunes en Allemagne au titre de ce qu’il appelle à tort le STO mais qui relevait alors de la relève. Il continua ses opérations de sabotages, occasionnant de sérieuses avaries aux machines et fut à maintes reprises signalé à la police comme communiste dangereux, meneur de grèves.
Une attestation d’Émile Mourrier, assura que Biosca fit passer la ligne de démarcation de Moulins (Allier) à plusieurs personnes évadées ou recherchées par les Allemands, grâce aux locomotives dont il était le mécanicien, au passage de Moulins. Ceci lui permit également d’acheminer du courrier, de l’argent et des émetteurs TSF.

En février 1943, une enquête fut menée sur lui. Le 6 février, un mandat de perquisition à son domicile de Nîmes fut lancé par le préfet du Gard. Aucun document de la période clandestine fut trouvé ; en revanche, la police acquit la certitude que Biosca était militant communiste depuis 1926. Cette enquête de police est consécutive à l’interception d’une lettre du 7 janvier 1943 destinée à Biosca par un dénommé Deganis, de Clermont-Ferrand, et adressée au fils Biosca à Nîmes, 11 rue Robert. Sur la base de cette enquête, malgré l’absence de preuves contre Biosca, l’Inspecteur de police de Sûreté chargé de l’affaire émit le 10 février la recommandation d’un internement de Biosca, celui-ci étant considéré comme dangereux au point de vue politique. L’enquête révéla que le soi-disant Deganis était en fait Biosca lui-même. Le commissaire Moritz, de Clermont-Ferrand, appuya donc, le 20 février, la demande de son confrère de Nîmes en faveur d’un internement de Biosca au regard du caractère séditieux et injurieux contre Pétain de la lettre interceptée.

Le 19 février 1943 au matin, il fut arrêté par l’inspecteur de police Robert, de la PJ de Clermont-Ferrand. Il fut interrogé à plusieurs reprises et relâché le 21 février au soir. Il prétendit n’avoir adhéré au Parti communiste qu’en 1936. Biosca affirma n’avoir jamais eu aucune activité clandestine à Clermont-Ferrand et se plaignit d’avoir été déjà perquisitionné à trois reprises depuis qu’il était à Clermont-Ferrand, interrogé à plusieurs reprises et suivi par la police. Il put rejoindre sa famille mais pour peu de temps car dès le 2 mars 1943 il fut de nouveau arrêté par deux inspecteurs déguisés en ouvrier se présentant comme les camarades de Biosca. Le 27 février 1943, le préfet régional venait de prendre un arrêté à son égard en vue de son internement immédiat au camp de Saint-Paul-d’Eyjeaux (Haute-Vienne). Il fut arrêté ce 2 mars avenue Charasse et les deux gardiens de la Paix l’autorisèrent à revenir chez lui prendre une valise avant de la accompagner à la gendarmerie. Il profita que sa fille discutait avec les deux hommes dans l’escalier, pour s’enfuir.
L’enquête permit d’établir que Biosca avait depuis le 15 février été muté à Veynes (Hautes-Alpes), avec prise de poste au 5 mars, mais que le 7, il l’avait pas pris son service.
Il put se cacher chez un ami avant de prendre dans la nuit un train pour Moulins (Allier). Après s’être reposé quelques jours à Nevers, il reprit contact avec son camarade Lucien, responsable des cadres FTP, et fut désigné pour rejoindre Saint-Étienne (Loire). Là, il dit être entré en contact en mars avec le responsable militaire régional, Henri Favoriti alias La Cuve, qui l’informa qu’il était nommé responsable militaire d’un maquis situé dans la Haute-Ardèche, vers La Lauvesc, au Mont-Sardier, en remplacement d’un dénommé Pilote. Favoriti ne prit ses fonctions inter régionales qu’en mai, vraisemblablement au moment de l’arrestation de Giovanni Sosso et de la vague de répression qui fit suite à la première évasion du Puy.

Biosca se présenta dans son dossier de résistant comme chef militaire FTP, lieutenant, en juin 1943 pour le secteur Loire, Haute-Loire, Ardèche, Rhône. Mais le groupement de départements qu’il mentionne ne correspond, dans l’organisation territoriale des FTP, ni à un secteur ni une région. La Loire et la Haute-Loire sont un cas particulier car les deux départements forment une seule région. Il est surprenant qu’un cadre de son niveau soit aussi confus. En outre, la fonction de « chef de détachement » qu’il évoque pour lui n’existe pas au Wodli qui reste sur le schéma du triangle de direction jusqu’à la prise de fonction de Théo Vial en mai 1944.

Au Mont-Sardier, il organisa le maquis Pierre-Semard, formé de plusieurs groupes qui participèrent à des opérations dans la région de Saint-Étienne. Mais on ne trouve aucune trace d’un tel maquis dans les sources consultées jusqu’à présent.
Biosca affirme avoir eu sous ses ordres, le sergent Joseph, nom de guerre d’André Croizet, un des 3 jeunes FTP qui exécutèrent un officier allemand à Clermont-Ferrand le 26 avril 1943. Joseph fut blessé par un brigadier de gendarmerie de Saint-Joseph (Ardèche), hospitalisé à Tournon puis transféré à Lyon avant d’être fusillé après avoir été dénoncé au SD par la PJ de Clermont-Ferrand.

Les gendarmeries de La Louvesc, Saint-Félicien et de la région ayant appris que sa compagnie se trouvait au Mont-Sardier, l’ordre de repli fut donné et le 20 juillet 1943 les groupes firent 65 km pour se rendre en Haute-Loire au Suc-d’Achon. Là, Biosca, divisa ses groupes au Suc-d’Ollières, dans la vallée de Saint-Jeures, à la Vareillette, et il entra en relations avec les responsables FTP d’Yssingeaux (Haute-Loire).
C’est à partir de cette date du 20 juillet que le témoignage de Biosca, ainsi que l’attestation de Wallers, le présentent comme le fondateur du maquis Wodli, nom pris en souvenir d’un de ses camarades cheminots, alsacien. Tout en considérant que l’ouvrage de Marius Biosca concernant son activité de résistant était un "tissu de mensonges" concernant l’évocation du camp Wodli et les hautes responsabilités qu’il y aurait assumées, Henri Julien reconnut que c’est sur la suggestion de Biosca, lors d’un entretien à Firminy (Loire), vers septembre 1943, qu’on décida de donner le nom de Wodli à ce nouveau maquis.

Biosca prétendit qu’à ses côtés, parmi ceux ayant fondé le maquis, figuraient son camarade Jojo, nom de guerre d’Henri Julien, alias commandant Bossuet, de Nîmes, bientôt nommé responsable aux effectifs, Jean Bruguière, alias John Wallers, originaire de Montpellier, et Riri, nom de guerre d’Alain Joubert. Biosca est alors le commandant Robert. Raymond Vacheron et Pierre Broué donnent une autre composition au triangle de direction de ce qui va devenir le camp Woldi. Joubert est le commissaire technique, Henri Julien est le politique, et le responsable militaire est bien Robert, mais non pas Biosca mais Marcel Imms. Le nom de Biosca apparaît en effet rarement dans les documents concernant le Wodli.
Dans une lettre à Raymond Vacheron, datant de 1992, Henri Julien a des propos très durs à l’encontre de l’ouvrage de Biosca concernant sa période dans la région de la Haute-Loire. Il parle de la "prose" de Biosca, "invraisemblable et rocambolesque" pour ce qui touche le Wodli. Pour Julien, Biosca s’approprie des actes dont il n’était pas l’auteur ou le responsable. Julien quitta la région en janvier 1944 et selon Henri Julien, au moins jusqu’à cette date, Biosca ne pouvait être considéré comme FTP. En revanche, il reconnaît qu’il a pu appartenir à l’Armée Secrète (AS). Julien affirme qu’il n’a connu qu’un Robert au camp Wodli, sous les ordres duquel il était, et ce n’était pas Biosca. Il s’agissait très certainement de Marcel Imms, dont, selon Raymond Vacheron et Pierre Broué, l’un des pseudos était Robert. Mais les deux auteurs se trompent en affirmant que ce dernier était alsacien. Y a-t-il eu confusion chez ces auteurs ?

Dans son dossier de résistant, Biosca se revendique de juillet à octobre 1943, « chef de détachement » de la compagnie constituant le camp Wodli, installé aux marges de la Haute-Loire, de l’Ardèche et de la Loire. Dans son dossier de demande d’attribution de grade, il indique qu’il appartenait au camp FTP Wodli (Haute-Loire), du 1er mars au 16 décembre 1943.
Il fait état de plusieurs opérations : sabotage le 3 juillet 1943 de la Société électro-mécanique de Saint-Étienne ; vol de dossiers du STO à Saint-Étienne quelques jours plus tard ; exécution le 7 août 1943 d’un policier par des FTP, au Chambon-sur Lignon (Haute-Loire) ; destruction d’une locomotive le 8 août au dépôt de Saint-Étienne, etc. Le Wodli a certes effectué des sabotages mais certainement pas de manière quotidienne comme l’écrit Biosca et certainement pas à comme il le dit Montbrison – ville de la plaine du Forez - où opérait une autre unité de FTP.
Le 6 août 1943, Wallers exécuta un traître suite à l’enquête menée par Biosca, selon l’attestation de Wallers, attestation qualifiée de complaisance par Henri Julien.

Jusqu’à sa convocation à Saint-Étienne, le 9 septembre, Biosca dit avoir diriger des groupes qui quotidiennement ont commis des sabotages sur la matériel et les voies de chemin de fer de la région. Il fut trahi une première fois à Montbrison (Loire) par un faux maquisard. Il parvint selon Wallers, à s’évader puis fut repris par les gendarmes avant une nouvelle fois de s’enfuir pour rejoindre Saint-Étienne.

Le 9 septembre, le responsable militaire régional, La Cuve, l’envoie le lendemain à Lyon (Rhône). Le 17 septembre, il rencontre le responsable FTP interrégional, Andral, nom de guerre de Raymond Perinetti.
Le lendemain, il part avec Thibault, Interégional de la IIIème Région, pour Limoges (Haute-Vienne). Là, il retrouve Henri Favoriti, le responsable FTP militaire Inter-région qui l’accompagne le lendemain auprès d’Albert, alias Albert Thomas, responsable militaire régional, Commissaire aux Opérations (COR) en Corrèze puis en Dordogne.

Il a été nommé capitaine FTP en septembre 1943 à Ussel (Corrèze). Il prit alors la direction des maquis de la région. Il appartenait au groupe FTP Robert, secteur Dordogne - un groupe sous ses ordres puisque son nom de guerre était Robert - du 17 décembre 1943 au 25 avril 1944. Il avait été nommé responsable militaire du camp en remplacement du capitaine Germain, sanctionné pour diverses fautes.

Il devint responsable du camp Faïta, du maquis de la Tourette à Ussel (Corrèze), un maquis à quelques kilomètres de l’ouest du Puy-de-Dôme. Le camp Faïta porte le nom de Vincent Faïta. Au début de la création du camp de la Tourette, en mai-juin 1942, il est constitué de réfractaires au STO. Il ne porte pas, alors, le nom de Faïta.

Depuis les régions parisienne et marseillaise, les filières communistes de repli des sédentaires grillés ou risquant d’être arrêtés passaient parfois par la veuve de Gabriel Péri, Mathilde, née Taurinya. Son frère Albert Taurinya, cheminot communiste interné au camp Bossuet (Algérie), libéré sous caution, fut assigné à résidence au dépôt SNCF d’Ussel. Par le biais de cette filière (Mathilde à Paris, Albert à Ussel, et peut-être Pauline, leur sœur, ex-épouse d’André Marty), des militants communistes et/ou des réfractaires au STO ont été orientés vers Ussel et le camp de la Tourette.

Vincent (Vinicio) Faïta, né à La Spezzia, Italie, le 6 mai 1918, et Jean Auguste Robert, né à Marseille le 4 juillet 1917, étaient amis d’enfance dans la région de Marseille. Arrêtés par la police de l’État français le 3 mars 1943, avec Jean Auguste Robert, ils furent tous les deux condamnés à mort par la section spéciale de la cour d’appel de Nîmes, le 29 mars 1943, et guillotinés le 22 avril 1943, dans la cour de la maison d’arrêt de Nîmes (Gard).

Également militant communiste, Edo Faïta, né en 1921 à La Spezzia, le frère de Vincent, forma un groupe FTP armé, en 1942, sur l’initiative de Jean Auguste Robert, alors que Vincent était en prison et que Jean Robert s’en était échappé. Plusieurs opérations furent menées en 1942. Le 31 janvier 1943, Vincent Faïta s’évada lors d’un transfert à la maison d’arrêt de Périgueux et rejoignit le groupe à Nîmes.

Après l’arrestation de Vincent et de Jean Robert, Edo se mit au vert dans le Lubéron puis, sur les indications de Mathilde Péri, il rejoignit le maquis de la forêt des Saulières (entre Sainte-Féréole et Donzenac, Corrèze), puis celui de la Tourette (commune d’Ussel, Corrèze). L’arrestation de Vincent Faïta, le 3 mars 1943, et la mort de Vincent et de Jean Robert, le 22 avril 1943, donnent l’indication du parcours d’Edo Faïta alias Bernard, et de la datation de la dénomination « camp Faïta » du camp de la Tourette. Les maquis FTP ont reçu pour nom celui d’une victime communiste de l’État français et/ou des Allemands. Ce n’est donc qu’après l’arrivée d’Edo au camp de la Tourette et après avoir pris connaissance de la mort de son frère et de celle de Jean Robert que le camp Tourette s’est appelé camp Faïta, fin avril 1943.

Jean Auguste Robert était tout autant une victime communiste de l’État français. Le « groupe FTP Robert, S secteur Dordogne » (plus sûrement groupe FTP Robert, 12e région Corrèze-Dordogne. Les FTP étant peu implantés en Dordogne, ils étaient rattachés à la Corrèze) provenait de celui de Jean Auguste Robert. Et c’est certainement en son hommage que Marius Biosca a pris Robert comme pseudo, seulement à partir du 17 décembre 1943.
Quand il arriva au camp, Biosca apprit que que camp était composé de 144 hommes qu’il fallait décentraliser en plusieurs groupes dont un groupe d’étrangers, principalement d’Espagnols, guidés par un ancien des Brigades internationales, Francisco. Aux côtés de Biosca, comme responsables de la Compagnie Faïta, figuraient les dénommés Kléber, commissaire technique, originaire du Midi, et Léon R.

Le 27 septembre, le maquis fut attaqué par plusieurs centaines d’Allemands au Bois des Trois Faulx. 4 jeunes furent arrêtés et exécutés sommairement. Biosca considéra que cette attaque aurait pu être évitée si le commandant du camp, Germain, et son adjoint, le lieutenant Kléber, avaient fait preuve de plus de clairvoyance en confondant deux espions venus la veille. Germain fut sanctionné, rayé des cadres FTP et envoyé ailleurs.
La compagnie comprenait 216 hommes fin septembre 1943. A la suite de l’attaque du maquis le 27 septembre, 32 maquisards désertèrent.
Dans les semaines qui suivirent, le maquis multiplia les actions, en particulier les sabotages sur les voies ferrées et les poteaux électriques. Ceci entraîna la venue de la PJ de Clermont-Ferrand et de Limoges à Ussel. Biosca dut se cacher puis fut transféré à Limoges où on le nomma commandant du sous-secteur zone Sud Dordogne. Il partit et prit contact avec le maquis de Terrasson et de Bergerac. Il était alors à la tête de 150 hommes.
Le 22 janvier, à la tête de sa compagnie, il tenta en vain de saboter le dépôt des machines SNCF de Périgueux. Mais les hommes revinrent le 28 janvier et réussirent leur coup, paralysant le réseau pendant plusieurs semaines.
La Compagnie procèda à de nombreuses récupérations d’armes, d’essence.

Le Chef de détachement Valmy fut alors nommé responsable du sous-secteur de la Dordogne et Biosca repartit en Corrèze où il retrouva la Compagnie Faïta.
Durant le mois de mars 1944, un groupe du détachement Faïta sabota la voie entre Ussel et Clermont-Ferrand et Biosca fit arrêter un train pour le lancer ensuite sur la voie sabotée, ce qui produisit une paralysie du réseau quelques jours.
Le dernier samedi de mars 1944, les groupes Faïta et Perruchon firent sauter l’usine Montupet à Ussel. Celle-ci fut inutilisable durant des mois. Ceci suscita la venue des SD de Clermont-Ferrand, Limoges, Tulle et Brive-la-Gaillarde, accompagnés de GMR.
Le maquis fut obligé de se replier dans les gorges de la Dordogne, sur la lisière des départements de la Corrèze et du Puy-de-Dôme.
Traqué, les hommes prirent quelques jours de repos au Moulin de Vazeilles, dans les gorges de la Dordogne. Puis un groupe réussit un coup spectaculaire en volant le ravitaillement de l’École des cadres des Chantiers de Jeunesse à Bourg-Lastic (Puy-de-Dôme). Ceci suscita une réaction de Darnand qui ordonna à toutes les polices de la région de traquer les maquisards.
Dans la nuit du 24 au 25 avril 1944, alors qu’un groupe de FTP Faïta était en mission, Biosca était resté au camp avec 5 camarades. Ils furent cernés. Après avoir riposté, les hommes durent se rendre, faute de munitions.
Marius Biosca a été arrêté en même temps que Narcisse Silvestri lors d’une opération des GMR, le 25 avril 1944, à Avèze (Puy-de-Dôme), un village au bord de la Dordogne. Sur sa fiche d’homologation d’interné-résistant, il indique comme lieu d’arrestation « Moulin de Vazeilles », « gorges de la Dordogne », dans le Puy-de-Dôme.
Deux de ses camarades, blessés, furent transportés par les GMR à La Bourboule puis à l’Hôtel-Dieu de Clermont-Ferrand. Biosca et ses trois autres camarades furent quant à eux conduits à la mairie d’Avèze où ils furent durement interrogés. Biosca fut le seul à recevoir des coups de nerfs de bœuf d’un brigadier des GMR.

La création de la 236e Cie FTP (Ussel), à laquelle Biosca appartenait, date d’avril-mai 1944. Marius Biosca ne figure dans aucun organigramme FTP de l’Historique des unités combattantes FFI, Corrèze-Creuse et Dordogne. Il n’y a pas d’index dans Maquis de Corrèze, mais Marius Biosca n’est pas mentionné dans la partie qui traite du camp Faïta. Selon une attestation fournie par Yvette Placet, alias Jeannine, agent de liaison du commandant Robert, c’est-à-dire Marius Biosca, ce dernier était le responsable militaire de la Corrèze-Dordogne, 306ème Compagnie, 2ème Région.

Après deux jours à la prison de Clermont-Ferrand, il fut envoyé à la Maison d’arrêt de Riom (Puy-de-Dôme) où il retrouva deux camarades du Wodli, Alain Joubert et Eugène Malzac, alias Géno ou lieutenant Jean.

Marius Biosca fut interrogé deux fois par jour pendant 25 jours par des policiers de Clermont-Ferrand mais aussi un commissaire de Limoges. Ayant fait usage d’armes contre la police venue l’arrêter au Moulin de Vazeilles, Biosca et ses deux camarades, Moreno et Narcisse Silvestri, devaient être jugés le 29 juin 1944 à Riom. Mais la veille du procès, les Allemands investirent la maison d’arrêt et récupèrent 157 prisonniers qui furent envoyés immédiatement en train pour Compiègne. Parmi eux, 43 moururent dans le convoi pour l’Allemagne et 77 moururent dans les camps.

Il fit partie du fameux Train de la mort, parti le 2 juillet 1944 pour Dachau où plus du tiers des 2500 détenus moururent durant les 3 jours de trajet. Dans l’ouvrage qu’il écrivit en 1947, Biosca témoigna de l’horreur des conditions de ce voyage puis décrivit les conditions de son internement.
Il fut successivement envoyé aux kommando de Neckargerach, Neckarelz. A Neckargerach il fut utilisé pour construire d’immenses usines souterraines fabriquant du matériel d’aviation. Fin mars 1945, devant l’avancée américaine, les prisonniers furent déplacés à pieds d’une centaine de kilomètres. Puis, aux environs de Stuttgart, on les embarqua dans un train qui les ramena à Dachau le 1er avril 1945, non sans qu’une partie des prisonniers succomba durant le trajet. Il semble qu’il retourna au camp de Neckargerach où il fut envoyé au Revier, l’infirmerie. C’est là qu’il a été libéré le 29 avril 1945. Dès le rétablissement du Parti léga et avant d’être rapatrié, Marius Biosca est le militant désigné par le Parti pour animer une conférence d’information au camp de Dachau, le 24 mai 1945. Ill a été rapatrié le 3 juin 1945, après avoir dû s’arrêter à Vesoul car malade. Il fut accueilli à Clermont-Ferrand par son épouse, ses camarades cheminots et du Parti communiste qui organisèrent un vin d’honneur, en présence du secrétaire régional, Minard.

Dans la proposition de citation pour lui attribuer la croix de guerre, il est écrit ceci : « Résistant de la première heure. Premier FTP au dépôt de Clermont. Saboteur spécialisé. Responsable militaire sous le nom de Robert des FTP 306e Compagnie, 12e Région Corrèze-Dordogne. Cité à l’ordre de l’Armée secrète. Déporté à Dachau. Sujet exceptionnellement méritant ».
Dans l’attestation qu’il fut pour Biosca, Bruguières, ex Wallers, devenu Chef de corps FTP de la Région de Montpellier, assura que Biosca avait été commandant du camp Wodli en juillet 1943, considéré comme un des meilleurs chefs de la Résistance.

Pendant cette période de déportation, sa fille Jeanne, alias Christiane dans la Résistance, épousa Germain Amouroux, le 18 décembre 1944, à Clermont-Ferrand. C’était un jeune résistant FTP, communiste, originaire de l’Aude, qui avait fait partie des 80 évadés de la maison d’arrêt du Puy-en-Velay en novembre 1943 avant de rejoindre les maquis du Puy-de-Dôme et de l’Allier.

Le 16 juin 1952, Marius Biosca reçut la carte de déporté-interné-résistant (DIR). Le 1er mars 1948, il fut homologué Forces françaises combattantes (FFC) pour la période du 25 avril 1944 au 26 mai 1945 avec le grade de capitaine. Il fut considéré comme agent du réseau Résistance-Fer à compter du 1er octobre 1943 puis agent P2 à compter du 25 avril 1944, date de son arrestation. Il fut fait chevalier de la Légion d’honneur en 1961.

En 1947, il publia son témoignage de résistant dans « De la résistance à Dachau », ouvrage soutenu par la FNDIRP et absent des collections des bibliothèques publiques. Dans cet ouvrage Biosca n’évoque ni son passé militant, ni son engagement comme communiste mais uniquement les faits de résistance auxquels il a participé puis ses souvenirs de déporté.

Il vécut, après-guerre, 8, rue du Champ-de-Mars à Nîmes (Gard). On ignore s’il continua à militer syndicalement ou politiquement.

Il est mort le 5 février 1974, à Cavaillon (Vaucluse).

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article202270, notice BIOSCA Marius, Julien [pseudonyme dans la résistance : Robert] par Louis Botella, Eric Panthou, Manuel Rispal, version mise en ligne le 25 avril 2018, dernière modification le 11 août 2021.

Par Louis Botella, Eric Panthou, Manuel Rispal

Marius Biosca, Déporté politique 77 818 : De la résistance à Dachau, Nîmes : Impr. Richelieu, 1947, 97p.

SOURCES : AN Fontainebleau, 19800035/1238/42902. Dossier d’attribution de Légion d’Honneur de Marius Biosca (non communicable avant transfert à Pierrefitte). —SHD Vincennes, GR 16 P 61042, dossier Marius Biosca. — SHD Vincennes, GR 16P 93852, Attestation de Marius Biosca à Jean Bruguière (Nîmes, 24 mai 1950). — Arch. dép. du Puy-de-Dôme, 900 W 84, dossier d’interné de Marius biosca. —Le Cri du Gard, organe régional hebdomadaire du Parti communiste, 25 février 1939 (BNF Gallica) .— Marius Biosca, Déporté politique 77 818 : De la résistance à Dachau, Nîmes : Impr. Richelieu, 1947, 97 p. .— Lettre d’Henri Julien à Raymond Vacheron, le 5 décembre 1992 (archives privées Roger Vacheron) .— Fondation pour la Mémoire de la Déportation : http://www.bddm.org .— Manuel Rispal, La Libération désirée, tome 2, Editions Authrefois, 2016, p. 67. —"20 cheminots sont suspendus à Nîmes", Le Peuple, 23 décembre 1938 .—Filae. — Mail d’Henri Destour à Eric Panthou, le 27 avril 2020. — "Tous de suite après leur libération le militants communistes du camp de la mort de Dachau ont organisé une réunion d’information du Parti", La Voix du Peuple, 16 juin 1945. —État civil Clermont-Ferrand (acte de mariage de Jeanne Biosca).

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