Par Jacques Girault
Né le 12 octobre 1920 à Brech (Morbihan) ; instituteur ; résistant ; militant syndical du SNI dans le Morbihan puis dans le Var ; militant communiste, maire de Carqueiranne (Var) de 1971 à 1983.
Armand Conan était le fils d’un mécanicien roulant à la Compagnie de chemins de fer du Paris-Orléans, en poste successivement à Tours (Indre-et-Loire), à Saint-Nazaire (Loire-Inférieure, Loire-Atlantique), puis à Auray (Morbihan), qui fut secrétaire de son syndicat lors de la grève générale en mai 1920, et d’une femme de ménage d’origine italienne (Piémont), devenue buraliste à Lorient (Morbihan) en 1930. Par tradition, se parents le firent baptiser. Il passa une partie de sa jeunesse en Bretagne puis l’autre partie à Carqueiranne.
Il fréquenta les écoles primaires supérieures de Lorient et de Quimperlé où il obtint le brevet supérieur. Durant l’Occupation, il participa aux combats du Front national avec son frère, Henri, qui fut fusillé par les Allemands, le 30 avril 1942 à Vannes (Morbihan). Il adhéra au Parti communiste en 1942 à Auray, devint responsable communiste à Belz et à partir de la fin 1943, accueillit l’état-major FTPF du Morbihan. Il siégea au Comité départemental de Libération du Morbihan comme représentant du Parti communiste. Membre du comité départemental de confiscation des profits illicites, rédacteur en chef de L’Espoir du Morbihan, hebdomadaire communiste, créé en septembre 1944, il participa en 1946 à l’école centrale destinée aux journalistes communistes.
Armand Conan se maria religieusement à l’église en août 1941 à Gestel (Morbihan) avec une institutrice, Madeleine, fille d’un chef de gare. Le couple ne fit pas baptiser leurs deux. Conan, quant à lui, se définissait au début des années 2000 comme « athée ».
Il devint instituteur remplaçant dans le Morbihan (Ploërdut, 1940-1941, Belz, 1941-1944), puis titulaire à Merlevenez (1945-1952), à Locmiquelic (1952-1958). Il exerça des responsabilités syndicales (adhérent de la FEN-CGT, responsable de la minorité « cégétiste » de la section départementale du Syndicat national des instituteurs, délégué dans les congrès nationaux). Il intervint notamment lors du congrès du SNI le 23 mars 1948 sur la question de l’affiliation. Il considérait, que dans son département, la défense de l’école laïque ne pouvait se concevoir « sans l’appui de la classe ouvrière » et il souhaitait un accord pour que le SNI reste dans la CGT. Lors des journées des jeunes du SNI à Limoges, les 5-6 avril 1950, il intervint après le rapport de Denis Forestier, pour critiquer L’École Normale de France, revue publiée par le SNI en direction des normaliens. Il assura aussi le secrétariat du Cartel départemental d’action laïque regroupant toutes les organisations de gauche, publiant le mensuel L’Action laïque du Morbihan.
Parallèlement, ses activités étaient politiques (secrétaire de cellule, de section, presse, membre du bureau fédéral). Pour les élections législatives de 1946, la fédération proposa sa candidature qui ne fut pas retenue. Candidat aux élections cantonales dans le canton de Port-Louis en 1948 et en 1954, il obtint environ 30 % des voix.
Armand Conan fut nommé dans le Var après plusieurs demandes de mutation qui furent refusées en 1946, en 1947, en 1948, en 1952 et en 1954, comme il le rappela dans un article du bulletin du syndicat du Var à la fin de 1960, mettant en cause implicitement les responsables varois du syndicat. Il enseigna à Carqueiranne (1958-1967), puis termina sa carrière comme conseiller pédagogique dans la circonscription de La Seyne (1967-1976).
Conan prit part, à partir de 1960, à la vie de la section départementale du SNI, participant à plusieurs congrès nationaux, intervenant dans les assemblées générales, notamment pour protester contre l’incompatibilité des fonctions syndicales et politiques décidée par la majorité départementale. Responsable de la minorité, il demanda en vain que des sièges à la commission administrative paritaire départementale puissent revenir aux minoritaires en fonction de leurs résultats. Candidat aux élections pour le conseil syndical en décembre 1961, en janvier 1964, en décembre 1965, en décembre 1967, en 1969 (listes « pour l’unité, la démocratie et l’efficacité du syndicat »), en 1971 (liste Unité et action), il fut élu de 1965 à 1969. Notamment lors des événements du printemps 1968, il fut un des principaux dirigeants des syndicalistes de l’enseignement particulièrement actifs à La Seyne. Par la suite, il fut candidat en position non éligible sur les listes « Unité et Action » pour le conseil syndical, ainsi en 1976 ou en 1985.
Conan était responsable communiste local, membre du comité de la fédération du Var après 1970, militant dans les milieux sportifs locaux. Il conduisit la liste de gauche, animée par les communistes, aux élections municipales de 1959. Elle obtint une moyenne de 900 voix alors que celle du maire sortant en regroupait un millier. Élu conseiller municipal après le deuxième tour de la consultation de 1971 à la tête de la liste de la Gauche unie, il devint maire de Carqueiranne, désigné avec une voix de majorité. Il conduisit une liste identique pour les élections municipales de 1977 qui, cette fois, obtint la majorité absolue (56 % des voix). Il conserva son écharpe de maire, élabora le plan d’occupation des sols maintenant un équilibre entre zones constructibles, agricoles et forestières. Il mena une active politique de logements (hameau de Bellevue en 1978 avec 117 logements sociaux) qui obtint le premier grand prix d’urbanisme national du logement social et qui fut citée en exemple dans L’Information municipale. Les principales réalisations de ces deux mandats municipaux touchèrent le domaine social (logements, foyer pour personnes âgées, crèche), l’environnement (déviation, aménagement du port maintenant géré par la municipalité) et le sport. Sa liste perdit les élections suivantes de 1983 et il demeura conseiller municipal jusqu’en 1995.
Candidat communiste aux élections sénatoriales en 1977, Conan obtint 194 voix puis 171 voix au deuxième tour sur 1 170 inscrits. Lors de l’élection sénatoriale complémentaire en août 1981, il était le suppléant du candidat communiste Henri Cèze* qui se désista à l’issue du premier tour. Il figurait à nouveau parmi les candidats le 30 septembre 1986 et réunit 131 voix sur 1 412 inscrits.
Candidat aux élections cantonales, le 23 septembre 1973 dans le canton de La Crau, Conan obtint 1 435 voix et fut battu au deuxième tour. Il représentait le Parti communiste aux élections dans le canton de La Crau redessiné. Se présentant comme le candidat unique de la gauche au premier tour contre le maire de La Crau puisqu’il n’y avait pas de candidat socialiste, conseiller général sortant, considéré comme un homme de droite, il fut battu, le 7 mars 1976. Mais le 14 mars 1982, la situation se compliquait puisque le conseiller sortant était maintenant soutenu par le Parti socialiste. il se présenta toujours dans sa campagne comme le « seul candidat de gauche pour battre la droite » et dénonça le changement d’étiquette du maire de La Crau. Celui-ci arrivait en troisième position et se retirait. Conan réunissait 2 448 voix et figurait au deuxième tour comme seul candidat de gauche, obtenant 4 079 suffrages.
Membre de la Libre Pensée, de la Ligue des droits de l’Homme et de la Fédération des œuvres laïques, en 1998, Conan participait au secrétariat de l’Amicale départementale des vétérans communistes qui organisa notamment en décembre 1998 un colloque sur l’affaire Henri Martin à La Garde. En 2000, il publia une petite brochure (20 p.), Petite histoire sentimentale mais réaliste de la vie municipale à Carqueiranne de 1945 à l’an 2000. Elle s’inscrivait en réaction contre les réalisations qu’il jugeait démesurées des municipalités de droite. Il présida, à Carnoules, en janvier 2001, une importante assemblée de vétérans commémorant le 80e anniversaire du Parti communiste. Dans son intervention, il critiqua la façon dont la fédération communiste et la direction du Parti communiste conduisaient la « mutation » communiste. Il réalisa, avec un collectif de vétérans du PCF, un ouvrage documenté sur les 80 ans de luttes des communistes varois. En outre, lors d’une réunion sur le Front populaire à La Seyne en juin 2006, il évoqua longuement ses souvenirs sur son itinéraire militant à partir de cette période dans le Morbihan.
Var-Matin du 30 août 2021 consacra un article à l’anniversaire des noces de titane d’Armand Conan (101 ans ) et de Madeleine (99 ans). Il avait perdu la vue mais sa mémoire restait vive.
Par Jacques Girault
SOURCES : Arch. comité national du PCF. — Presse syndicale. — Var Matin 22 octobre 2020, à l’occasion de son centenaire. — Sources orales. — Renseignements fournis par l’intéressé.