GIORGETTI Jean-Baptiste, André [alias « Jean MAIGRET », « CAILLOT », « DE CHARETTE », pseudonymes de clandestinité]

Par André Balent

Né le 20 février 1918 à Venaco (Corse), mort exécuté sommaire le 27 juin 1944 à Castelmaurou (Haute-Garonne) ; militaire de carrière ; résistant en Corse (Front national) puis des FFL (Bureau central de renseignements et d’action) en Angleterre, dans le Lot-et-Garonne, en Haute-Garonne ; a intégré des GF de l’AS à Toulouse (Haute-Garonne).

Jean-Baptiste Giorgetti (1918-1944)
Jean-Baptiste Giorgetti (1918-1944)
Fonds : Groupe de recherches de Gragnague-Castelmaurou des fusillés du bois de la Reulle

Jean-Baptiste Giorgetti était le fils de Pierre, gendarme et de Marie-Thérèse Fabiani parents de deux autres garçons. Après une scolarité à Venaco, commune au sud-est de Corte, Jean-Baptiste Giorgetti intégra les enfants de troupe : à Saint-Hippolyte-du-Fort (Gard), puis à Tulle (Corrèze) et enfin à Autun (Saône-et-Loire) en 1935. Le 20 février 1935, il contracta un engagement au 75e régiment d’Infanterie de forteresse à Sospel (Alpes-Maritimes). Il accéda successivement aux grades de caporal, le 20 juillet 1936 ; de caporal-chef, le 1er juillet 1937 ; de sergent, le 10 octobre 1938.

En 1939, lors de la déclaration de guerre, il fut affecté au 53e bataillon de Chasseurs alpins. D’abord, sur le front, en Alsace, il embarqua pour la Norvège à Brest (Finistère) le 12 avril 1940. Du 19 au 30 avril 1940, il participa aux combats contre les Allemands à Namsos (Norvège). Replié en Écosse avec son régiment, il débarqua au Havre le 29 mai 1940. Il participa aux combats de la Somme puis à ceux du pays de Caux (Seine-Inférieure). Son bataillon fut encerclé par les Allemands à Vieulles-les-Roses (Seine-Inférieure / Seine-Maritime).

Jean-Baptiste Giorgetti fut capturé le 14 mai 1940. D’abord interné au camp de Choisel (Loire-Inférieure / Loire-Atlantique), il fut ensuite transféré au stalag VB de Villingen (Bade) où les Allemands regroupèrent de nombreux prisonniers corses. Il s’évada le 16 août 1941 et gagna la France après avoir traversé la Suisse. Dès son retour en France, il se présenta au dépôt d’Annecy (Haute-Savoie). Il fut dès lors, affecté au 24e bataillon de Chasseurs alpins de l’armée d’armistice, en garnison à Villefranche-sur-Mer (Alpes-Maritimes).

Définitivement démobilisé le 1er mars 1943, du fait de la dissolution de l’armée d ‘armistice, il rentra en Corse dans son village natal. Il intégra rapidement la Résistance et participa aux activités du Front national auquel il donna son adhésion aux côtés d’Henri Maillot (1899-1987) et sous la direction d’Arthur Giovoni (1909-1996)..

L e soulèvement de la Corse, le 9 septembre 1943, devait aboutir à sa libération , achevée le 4 octobre. Jean-Baptiste Giorgetti peu après à Alger afin d’intégrer les FFL. Il fut recruté par le BCRA et fut envoyé à Londres afin de suivre un stage de formation d’instructeur aux sabotages.

Le 10 avril 1944, il fut parachuté de nuit dans le Cantal. Il intégra rapidement un maquis du Lot-et-Garonne et, pendant son séjour dans ce département, il organisa deux sabotages. Il gagna ensuite Toulouse où il vint renforcer des groupes francs (GF) de l’AS (Armée secrète) : le groupe « Casa » de Léon Teboul (un industriel, capitaine, âgé de 44 ans, qui en plus d’animer un GF de l’AS participait au fonctionnement de réseaux comme « Akak » de l’OSS ou « Andalousie » de la France libre) fondé en 1942 et le groupe « Vira » créé en mars 1944 par le cousin d’ d’Achille Viadieu, Raymond Viadieu ( « Vira » = Viadieu Raymond). né en 1911, résistant de « Combat » et de l’AS, adjoint socialiste SFIO de Toulouse après la Libération et proclamé « Juste parmi les nations » en 1985. Le groupe franc « Vira » s’était justement spécialisé dans le sabotage. Avec le GF « Vira » et le GF « Simon » (lui aussi de l’AS) de Gabriel Noirot, il participa au sabotage de la poudrière de Toulouse, objectif qui était considéré comme stratégique par les Alliés puisqu’elle fut l’objet de eux sabotages par la Résistance, le 27 avril 1944, puis, à nouveau, le 26 mai, avec, entre les deux, un bombardement allié (nuit du 1er et 2 mai) qui provoqua la mort de plusieurs victimes civiles des quartiers d’Empalot et de Sainte-Agne. Pourtant, le premier sabotage auquel avait contribué Giorgetti avait été un succès puisque les dix-huit jeunes revêtus de tenues des chantiers de jeunesse avait réussi à pénétrer dans l’établissement dans la nuit 27 au 28 avril et que le sabotage de pompes avait réussi à paralyser 60 % de la production pour une longue période.
Jean-Batiste Giorgetti fut trahi par un policier, résistant retourné passé au service des Allemands, Georges Pujol qui fut aussi à l’origine d’un autre des fusillés du bois de la Reulle, Marcel Mercié. Il fut arrêté le 1er juin 1944 en fin d’après-midi à Toulouse, au bar de la Poste, rue Rémusat avec sept autres personnes, des résistants qui participaient à une réunion. Parmi eux, le couple gérant du bar, André Masson alias « Trémie », du BCRA. Son arrestation fut mouvementée car il tenta sans doute de s’enfuir et dut subir des violences avant sa capture. Il fut immédiatement transporté à l’hôpital Purpan afin d’y subir des soins. Transféré à la prison Saint-Michel, il y fut torturé. Ceux qui l’aperçurent alors expliquèrent que son état physique état « mauvais. La Sipo-SD le désigna, parmi les détenus du quartier allemand de la prison, comme devant être transféré à Castelmaurou, au nord de la ville. Là, il fut remis au peloton de la division SS Das Reich qui, après leur avoir fait creuser leur tombe, les exécuta sommairement.

Pendant longtemps, Jean-Baptiste Giorgetti fit partie du groupe des cinq exécutés du bois de la Reulle dont l’identité demeura inconnue et à qui on affecta les n° 36, 37, 41, 43 et 45. En 1950, il fut déclaré « mort pour la France » a la date fictive du 14 juillet 1944.

Un des indices susceptibles d’être une piste d’une future identification, consigné dans l’acte de décès dressé en mairie de Castelmaurou après l’exhumation des corps, était le fait qu’il portait des bottes britanniques de marque Camden. Beaucoup plus tard le groupe de recherches de Gragnague/Castelmaurou des fusillés du bois de la Reulle animé principalement par Georges Muaratet et Jean-Daniel Gaudais entreprit des recherches afin d’identifier les « inconnus du bois ». Ils réussirent, grâce à des analyses ADNc de mettre un nom sur le n° 43 en 2012 (Charles de Hepcée), puis sur les n° 41 (Marcel Joyeux) en 2013 et n° 36 (Pierre Cartelet) en 2014. L’identification de Jean-Baptiste Giorgetti fut réalisée en 2017. L’interrogatoire de l’agent allemand Georges Pujolindiquait qu’il avait contribué à l’arrestation d’un Corse. Dans l’île même, Raoul Pioli, de l’ANACR, était entré en contact avec le groupe des fusillés de la Reulle. Ils découvrirent que Jean-Marie Giorgetti, né à Marseille en janvier 1945, portait le même nom que celui qu’ils considéraient comme devant être le quatorzième des fusillés du 27 juin. L’enquête permit de savoir que Jean-Baptiste Giorgetti avait fait la connaissance à Londres d’une jeune femme, originaire de Marseille, Maryse de Andreis (1922-1954) engagée de la première heure, à dix-sept ans, dans les FFL. Ils avaient sympathisé lors d’un repas de Noël organisé à Londres pour les personnels des FFL. Puis Jean-Baptiste était parti, parachuté en France après son stage. En 1945, il était considéré comme « disparu ». Maryse de Andreis envoya une lettre à la mère de Jean-Baptiste lui expliquant qu’elle avait un petit-fils. Jean-Marie fut élevé à Venaco par sa grand-mère. Si cette dernière l’appelait « Jean-Marie de Andreis », il portait néanmoins le patronyme du second mari de sa mère. Il ne retrouva officiellement l’usage du nom de « Giorgetti » qu’en 1995 après l’ouverture du testament de oncle. La démarche du groupe de recherches animé par Georges Muratet aidé par le lieutenant-colonel Raoul Pioli permit en 2017 d’apporter la preuve de la filiation par la comparaison des ADN de Jean-Baptiste et de Jean-Marie. On savait par la même occasion quelle était l’identité qu quatorzième des quinze fusillés de la Reulle. L’acte de décès officiel du décès de Jean-Baptiste Giorgetti fut officiellement dressé à Castelmaurou le 16 octobre 2017. Le 21 octobre 2017 une cérémonie religieuse fut célébrée en sa mémoire en l’église Saint-Michel de Venaco. Son corps resta inhumé à Castalmaurou avec ceux de Pierre Cartelet et du dernier fusillé de Castelmaurou demeuré inconnu. Le nom de Jean-Baptiste Giorgetti fut gravé en 2017 sur le monument aux morts de Venaco et sur les monuments commémoratifs de Castelmaurou. Homologué en 1950, sous-lieutenant des FFI, il est titulaire de la Croix de guerre 1939-1945 avec étoile de vermeil.

Voir : Castelmaurou, Bois de la Reulle (27juin 1944)

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article205987, notice GIORGETTI Jean-Baptiste, André [alias « Jean MAIGRET », « CAILLOT », « DE CHARETTE », pseudonymes de clandestinité] par André Balent, version mise en ligne le 26 août 2018, dernière modification le 26 janvier 2022.

Par André Balent

Jean-Baptiste Giorgetti (1918-1944)
Jean-Baptiste Giorgetti (1918-1944)
Fonds : Groupe de recherches de Gragnague-Castelmaurou des fusillés du bois de la Reulle
Jean-Baptiste Giorgetti en uniforme

SOURCES : Angelica Castellagi (ONACRVCG, Corse-du-Sud,) biographie de Jean-Baptiste Giorgetti, site onac-vcg.fr consulté le 25 août 2018 . — Michel Goubet, « Les GF toulousaijns de l’AS en 1943-1944 », « Groupements FFI recensés en Haute-Garonne à la Libération », « Les sabotages de la poudrerie de Toulouse », « Les bombardements de Toulouse » in La résistance en Haute-Garonne, CDROM, Paris, AERI (Association pour des études sur la résistance intérieure).— Mario Grazi, Corse-Matin, 22 octobre 2017, Parcours de J.-B. Giorgetti et ré-inhumation à Venaco]. — Noël Kruslin, Corse-Matin, 25 octobre 2017, histoire de la filiation de Jean-Marie, fils de Jean-Baptiste Giorgetti. — Charles Monti, article in Corse Net Info, 18 octobre 2017. — Raoul Pioli, biographie de Jean-Baptiste Giorgetti, Site ANACR2A, consulté le 25 août 2018. — Site du Groupe de recherches de Gragnague/Castelmaurou des fusillés du bois de la Reulle (les-fusilles-du-bois-de-la-reulle.fr), « L’extraordinaire parcours de Jean-Baptiste Giorgetti (1918-1944), article du 17 octobre 2017, consulté le 12 novembre 2017. — La Dépêche, Haute-Garonne, 16 octobre 2017. — Courriel de Jean-Daniel Gaudais, 17 octobre 2017.

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