MARTINEZ Florencio, dit parfois Florent

Par Carlos Fernandez

Né le 24 janvier 1906 à Portugalete, face à Bilbao, Biscaye, Pays Basque (Espagne), exécuté à Saint-Herblain (Loire-Inférieure, Loire-Atlantique) le 18 juillet 1944 ; doubleur lamineur ; syndicaliste et communiste.

Ses parents Cipriano Martinez et Maria Calvo, franchirent la frontière en 1919 et s’installèrent au 5B de la Cité Berligout à La Chabossière en Couëron (Loire-Inférieure). Florencio Martinez, âgé de quinze ans les rejoignit en 1921. Devenu ouvrier métallurgiste, il travaillait comme doubleur lamineur, cisailleur, dans l’usine JJ Carnaud à Basse-Indre.
Syndicaliste CGT, son entourage le surnommait « le p’tit bolchevik », la police l’accusait d’être membre du Parti communiste ce qui est possible mais pas établi.
Les troupes d’occupation allemandes arrivèrent à Couëron le 20 juin 1940 et installèrent une standorfkommantur à Saint-Herblain qui rayonnait sur la Basse-Loire. Dirigée par Erich Caumanns (communément appelé « Heinrich » ou « Erich »),
ce jeune sous-officier de la SS, âgé de 27 ans, arrivé en mars 1941 était un fanatique de Hitler et partisan acharné du régime nazi. Pendant trois ans, il effraya la population par sa dureté et ses menaces constantes de fusillades.
Avec le débarquement des troupes alliées en Normandie le 6 juin 1944 puis l’approche des troupes américaines, il s’enferma dans sa paranoïa. Comme l’affirma, plus tard, son interprète : « Il voyait des terroristes et des groupes de résistants partout ».

Le 9 juillet 1944, la famille polonaise Niesctierewicz résidant à Couëron fut arrêtée et enfermée dans les sous-sols de la Standorfkommandur. Elle fut sauvagement torturée par Heinrich et ses tortionnaires. Jean Niesterewicz, le père fut exécuté sans procès le lendemain 10 juillet lors d’une « tentative de fuite ».

A son tour Florencio Martinez fut arrêté le 16 juillet à son domicile. Il avait été surpris et dénoncé pour avoir tenu, au « café du Rocher », des propos anti-allemands devant des soldats de l’armée d’occupation. Lui aussi fut enfermé dans l’étroite salle de torture du sous-sol et subit de terribles châtiments infligés par Heinrich et ses acolytes. Dans son livre Histoire de Couëron et de la Loire Armoricaine, l’historien local Raymond Briant affirme, page 261 « en effet c’était Antoine Martinet que les allemands recherchaient ». Et non Florencio Martinez !
Mais il ne cite pas sa source. C’est d’autant plus regrettable que dans toutes les archives consultées nous n’avons trouvé aucune trace concernant Antoine Martinet.

À sa mère venue s’informer sur l’absence de son fils, Heinrich répondit qu’il est bien vivant, qu’elle n’a pas à s’inquiéter et surtout pas de scandale …
Trois jours après son arrestation, Florencio finit par quitter ce lieu mais il fut abattu d’une balle en pleine tête à quelques pas du siège de la Standorfkommandur.
Pour Raymond Briant : « [F. Martinez] demande l’autorisation d’aller aux W.C. et tenta de s’évader. Alors qu’il descendait les marches de la mairie [Kommandantur] on lui tira dessus d’une fenêtre … comme il agonisait il a été fait appel à un médecin, le Docteur Corlay, qui ordonna son transfert d’urgence à l’hôpital. En fait l’ambulance le promena autour de Saint-Herblain ». Jusqu’à sa mort ? Là encore nous n’avons aucune source pour étayer cette assertion.
Le Docteur Morlay dans un témoignage ambigu, voire complaisant envers Heinrich nous apporte, cependant, les précisions suivantes : « Martinez voulut s’enfuir, un des soldats qui le surveillait tira ; la balle l’atteignit en plein visage. Erich fit appeler le Dr Corlay, lequel ordonna de transporter le blessé d’urgence à Nantes ; trois jours après Erich faisait enterrer son corps à Saint Herblain, prétendant qu’il l’avait conduit à l’hôpital, qui lui avait renvoyé un cadavre au bout de trois jours, affirmation manifestement fausse, soit qu’il l’ait laissé mourir sans soin, soit qu’il l’ait achevé ».
L’acte de décès rédigé le jour même par Erich Caumanns (Heinrich lui-même) et le maire de Saint-Herblain Henri Viot, indique zéro heure cinq le 18 juillet 1944
Le corps du supplicié fut immédiatement inhumé anonymement au cimetière de Saint- Herblain et fut exhumé et identifié à la Libération.

Les circonstances identiques des décès de Jean Niesterewicz et de Florencio Martinez ressemblent fortement à des traquenards montés de toutes pièces pour dissimuler des exécutions sommaires.

D’autres crimes furent commis par Heinrich. Le 29 juillet 1944, il exécuta d’une rafale de mitraillette dans le dos, au cantonnement allemand, six jeunes du STO, dénoncés pour une histoire de sac de pommes de terre « volées » et que le sous-officier nazi, obsédé, soupçonna de résistants : André Alban,Jean Desbrosse,Constantin Dolik, Erwin Kuron , Georges Kuron et Raymond Prévost.
Dans la nuit du 9 au 10 août 1944, les troupes allemandes quittèrent définitivement le secteur pour se cantonner au sud de La Loire puis vers l’estuaire pour former « la poche de Saint-Nazaire ».

Le 8 mai 1980, une stèle fut érigée devant la mairie de Saint-Herblain (ancien siège de la Standorfkommandur) en présence du maire Jean-Marc Ayrault et des familles des martyrs. Huit noms y sont inscrits dont celui de Florencio Martinez.

Non loin de là, une avenue porte son nom.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article206327, notice MARTINEZ Florencio, dit parfois Florent par Carlos Fernandez, version mise en ligne le 2 mars 2019, dernière modification le 1er octobre 2022.

Par Carlos Fernandez

SOURCES : SHD, Vincennes, GR 16 P 399620 (Florent Martinez). — Jean-Pierre Sauvage, Xavier Trochu, Mémorial des victimes de la persécution allemande en Loire-Inférieure 1940-1945, Nantes, 2001.— Mémorial Genweb. — Arch. Dép. Loire-Atlantique, 27 J 51 (note de Carlos Fernandez) — Raymond Briant, Histoire de Couëron et de la Loire Armoricaine.

rebonds ?
Les rebonds proposent trois biographies choisies aléatoirement en fonction de similarités thématiques (dictionnaires), chronologiques (périodes), géographiques (département) et socioprofessionnelles.
Version imprimable