LI Shiqun 李士群

Par Alain Roux

Né en 1905 à Suichang (Zhejiang), mort le 7 septembre 1943 ; il fut de 1940 à 1943 à la tête du redoutable service de sécurité du régime de Wang Jingwei.

Avec Ding Mocun*, il fut de 1940 à 1943 à la tête du redoutable service de sécurité du régime de Wang Jingwei
Né en 1905 à Suichang au Zhejiang, il adhéra à la Ligue de la jeunesse communiste en 1926 alors qu’il était étudiant à Shanghai. Il fut envoyé par le PCC à Moscou à l’université des Travailleurs d’Extrême-Orient devenue par la suite l’université Sun Yat-sen. Militant clandestin communiste à Shanghai sous la couverture d’un emploi dans une agence de presse, il adhéra à la Bande Verte, ce qui lui sauva sans doute la vie quand il fut arrêté par la police en 1932 . Retourné par les services de Dai Li, il entra dans ce qui allait devenir le juntong et collabora à la revue Shehui xinwen (« Nouvelles de la Société ») qui était une publication de la clique CC de Chen Lifu. Il y fit la connaissance de Ding Mocun*. De petite taille, mais d’allure sportive, il aimait la vie facile et se liait facilement avec les gens. Mais il fut impliqué en 1933 dans une sombre affaire de complot ou de corruption. Arrêté par le juntong, il fut incarcéré pendant dix-huit mois et plusieurs fois torturé. Dès sa libération, il se réfugia à Shanghai. C’est là qu’en 1938 il reprit contact avec Ding Mocun. Tous deux offrirent leurs services en février 1939 à Doihara, un des meilleurs recruteurs des services secrets japonais, par l’entremise de Kagesa et de son « agence de la prune ». Ils en reçurent de l’argent, des armes et un local au 76 Jessfield Street. Forts de leur connaissance des réseaux du juntong, ils aidèrent de façon décisive la gendarmerie japonaise dans sa lutte difficile contre les assassins envoyés par Chongqing pour éliminer les notables shanghaiens qui s’étaient ralliés au « mouvement de paix » de Wang Jingwei. Zhou Fohai*, le premier ministre du gouvernement de Nankin, en quête de soutien, s’appuya sur ces deux malfrats devenus des rois du kidnapping crapuleux, de l’extorsion de fonds et de l’assassinat commandité. Beaucoup plus réservé, Wang Jingwei fut néanmoins séduit par Li Shiqun, qu’il rencontra en mai 1939, alors qu’il évitait soigneusement Ding Mocun. En décembre 1940, il en fit son ministre de la police, à la fureur de Ding Mocun qui reçut en compensation le ministère des Affaires Sociales. 1941 fut l’année de l’apogée de Li Shiqun. Il essaya de s’affranchir de sa dépendance envers Zhou Fohai en prenant la direction de la campagne de pacification rurale (qingxiang) au Jiangsu lancée par Haruke Yositari, l’influent conseiller politique japonais de Wang Jingwei. Ce fut pour lui l’occasion de mettre en place un quadrillage de la province par un réseau de fonctionnaires qu’il contrôlait et de s’enrichir en délivrant les autorisations exigées pour les transactions commerciales. Sa nomination comme gouverneur du Jiangsu fin 1941 facilita ses opérations. Mais c’était aussi entrer en concurrence avec les autorités japonaises et les négociants japonais. De plus, à la tête de la police politique, il commençait à ménager les agents du juntong arrêtés par ses services pour se mettre secrètement en contact avec les réseaux de Dai Li. Cela donna lieu à des libérations inattendues de personnalités de Chongqing dont, notamment, Wu Kaixian*, arrêté à la fin 1942. Ses velléités d’indépendance n’étaient pas du goût des autorités japonaises et les responsables nippons qui les avaient encouragées, comme Haruke et Kagesa avaient été mutés loin de Shanghai et du Jiangsu durant l’été 1942. Cette attitude de Li Shiqun constituait aussi une menace pour l’autorité de Zhou Fohai… d’autant plus que ce dernier s’était lui aussi mis en rapport avec les services de Dai Li grâce à un émetteur-récepteur radio installé dans sa résidence. On commençait en effet à douter de l’avenir parmi les proches de Wang Jingwei après les premières défaites stratégiques de l’Axe sur le front russe (Stalingrad, février 1943), l’échec de l’Afrika Corps en Afrique du nord (El-Alamein, décembre 1942 ) et le reflux de l’offensive japonaise dans le Pacifique amorcé par la lourde défaite infligée par la flotte américaine à la bataille de Midway en juin 1942. En février 1943, Dai Li demanda à Zhou Fohai de se débarrasser de Li Shiqun, en qui il n’avait pas confiance. Zhou Fohai commença par fusionner en juin 1943 le mouvement qingxiang avec le Yuan exécutif qui était sous son autorité. Du côté japonais, le lieutenant-colonel Okamura Tekizo, chef de la police politique de la kempeitai, fut chargé de la besogne : il invita à sa table le 6 septembre 1943 Li Shiqun. Méfiant, ce dernier qui s’était mithridatisé contre la plupart des poisons connus, mangea peu mais ne put se prémunir du poison lent secrété par le poisson Manju qui le tua au bout de trente-six heures le 7 septembre 1943

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article207034, notice LI Shiqun 李士群 par Alain Roux, version mise en ligne le 1er octobre 2018, dernière modification le 5 novembre 2022.

Par Alain Roux

SOURCES : Les mêmes que pour la fiche Ding Mocun. Voir aussi Parks M.Boyle : Facing Japan : Chinese Politcs and Japanese Imperialism 1931-1937. Harvard University Press ; 1972 p 285.

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