COSSERAT Éliane [née LEFEVRE Éliane, Hélène, Élise]

Par Jacques Girault

Née le 8 juin 1938 à Compiègne (Oise) ; professeure ; militante syndicaliste du SNPEN puis du SNES ; militante communiste de la Somme ; conseillère générale (1973-1985) ; conseillère régionale de Picardie (1979-1982).

<center>Éliane Cosserat en 1980</center>
Éliane Cosserat en 1980

Le père d’Éliane Lefevre, cheminot d’opinions socialistes et catholiques, délégué syndical, et sa mère, catholique, dont les familles furent lourdement affectées par les guerres, la firent baptiser et l’envoyèrent au catéchisme. Sa scolarité primaire, commencée à Margival (Aisne) où son père était chef de gare, se poursuivit en 1944 à Venizel (Aisne) où sa mère était réfugiée, et se termina à Orry-la-Ville (Oise) où son père fut nommé chef de gare en 1949.

Interne en sixième à l’école nationale professionnelle Jules Uhry de jeunes filles à Creil (Oise), elle entra à l’École normale d’institutrices de Beauvais (Oise) en 1953 et adhéra au Syndicat national des instituteurs. Elle fit signer la pétition contre le réarmement de l’Allemagne avec l’Union de la Jeunesse Républicaine de France à laquelle elle adhéra en 1954. En 1955, elle fut déléguée par l’UJRF de l’Oise au Festival mondial de la Jeunesse pour la Paix de Varsovie. De 1955 à 1958, elle milita pour la paix en Algérie à l’École normale de Montpellier (Hérault), où elle obtint le baccalauréat « mathématiques élémentaires » en 1956 et prépara l’École normale supérieure de Fontenay-aux-Roses. Reçue au concours (sciences) en 1958, elle fut membre de l’Union nationale des étudiants de France et du bureau de la section de l’école du Syndicat national de l’enseignement secondaire (1958-1962). Membre de l’Union des étudiants communistes depuis octobre 1958, secrétaire du cercle de l’ENS, membre du bureau du secteur ENS, elle fut la secrétaire, à l’ENS, du comité pour la paix en Algérie, créé avec des élèves catholiques, de 1958 à 1960. Elle participa à l’organisation, à l’ENS, de conférences-débats (contraception, risques de guerre en Israël, laïcité) et des premières semaines de la Pensée marxiste à Paris. En avril 1959, elle suivit une école centrale du PCF de dix jours (réservée à l’UECF) à Viroflay.

Éliane Lefèvre obtint la licence, un diplôme d’études supérieures en 1961 et l’agrégation en 1962 (sciences biologiques). Elle fut nommée professeur au lycée de Tournon-sur-Rhône (Ardèche). Adhérente du Parti communiste français à Tournon en 1962, membre du bureau de la section communiste, elle participa à l’action pour le nucléaire civil à Pierrelatte. Elle prit part à la campagne d’alphabétisation dans l’été 1963 en Algérie (Hussein Dey). En 1963, elle fut nommée directrice d’études au centre régional de formation des professeurs de collèges annexé à l’École normale d’instituteurs d’Amiens et y assura la formation initiale et continue des PEGC de Sciences naturelles de l’académie d’Amiens jusqu’à la suppression du recrutement en 1982. Elle publia quelques articles au CRDP d’Amiens. De 1982 à 1987 (date de la suppression des postes de directeurs d’études), adjointe au Chef de mission à la Formation des enseignants au Rectorat d’Amiens, responsable de la formation continue des professeurs de l’Académie, elle intervint dans la préparation du CAPES et de l’agrégation de biologie-géologie à l’université d’Amiens.

Éliane Lefèvre suivit les cours de l’école centrale du PCF en août 1965 et y rencontra son futur mari. Athée depuis son adolescence, elle épousa civilement François Cosserat, professeur communiste en avril 1966 à Amiens. Ils divorcèrent en juillet 1985. Ils avaient trois filles. Elle reprit son nom de naissance à son départ d’Amiens, le 16 août 1987.

Militante du Syndicat national des professeurs d’écoles normales, Éliane Cosserat fut secrétaire de sa section syndicale, secrétaire académique, membre du bureau national jusqu’en 1969 et élue à la commission paritaire académique jusqu’en 1975.

Installée à Amiens depuis 1963, Éliane Lefèvre, puis Cosserat, organisa, avec un professeur, ancien de l’UEC de Bordeaux, une semaine de conférences marxistes et des conférences mensuelles, participa au secrétariat de la section sud-est du PCF d’Amiens, milita contre la guerre du Vietnam, anima la vie de cellules d’entreprises et prit une part active à la création d’une cellule des écoles normales. Membre du comité de la fédération communiste depuis 1965, du bureau fédéral (1970-1987), responsable du travail politique sur l’enseignement et auprès des enseignants, puis des intellectuels, elle contribua à la rédaction du projet de réforme de l’enseignement du PCF. En août 1969, elle créa les « Amis de France Nouvelle » puis « de Révolution » qui organisèrent des conférences pour les enseignants, les cadres, les intellectuels. En 1979-1980, elle participa à l’élaboration avec les communistes engagés professionnellement dans les activités culturelles d’un programme de développement culturel de la Picardie. Elle créa une section départementale du nouveau Mouvement national de lutte pour l’environnement.

En décembre 1969, la conférence fédérale l’élut secrétaire du comité de ville du PCF d’Amiens, chapeautant quatre sections, dans le but de gagner la mairie d’Amiens en mars 1971. À cet effet, en 1970, elle créa le premier journal gratuit du PCF, Amiens-Perspectives, tiré à 40 000 exemplaires, qu’elle rédigeait en grande partie avec son mari. Elle participa aux négociations avec les responsables socialistes pour la composition de la liste conduite par le communiste René Lamps* qui l’emporta aux élections municipales du printemps 1971.

Habitant près d’une ZUP, Éliane Cosserat, respectant les contraintes des secteurs scolaires, créa dans l’école maternelle puis dans l’école élémentaire un comité de la Fédération des conseils de parents d’élèves. Libérée de son mandat électif en 1985, elle présida le comité FCPE du lycée Delambre jusqu’en 1987.

Éliane Cosserat, déjà présentée sur la liste des élections municipales d’Amiens en 1965, fut candidate au conseil général dans le canton Amiens Nord Ouest en 1973. Obtenant 2 635 voix au premier tour, elle fut élue le dimanche suivant avec 3 522 voix. Elle se représenta en 1976 (3 945, 5 178 voix, réélue), en 1982 (2 358, 5 174 voix, réélue). Elle fut une conseillère très active sur le terrain, organisant des actions pour des ouvertures de classes, les rénovations d’HLM, contre des saisies et expulsions, pour la construction de passerelles, etc. Au sein du conseil général, elle fit partie successivement des commissions « enseignement, culture, formation », des finances, de l’économie, des bâtiments. Elle proposa de rendre plus juste l’attribution des bourses départementales, d’établir des critères objectifs et affichés de répartition des subventions aux entreprises industrielles, aux associations culturelles, de participer aux frais de fonctionnement des équipements lourds (piscines, Maison de la culture, conservatoires etc.). Notamment, à la suite de son intervention et de celle du groupe communiste, le bâtiment historique du Grand Séminaire, sauvé de la démolition voulue par les conseillers généraux de droite d’Amiens pour permettre une opération immobilière, devint le siège des Archives départementales. Elle fit adopter en 1982, l’attribution d’une aide mensuelle aux personnes sans revenu.

Amiens, et sa proche banlieue, comportait six cantons avec quatre élus communistes et deux de droite. Le canton Amiens Nord-Ouest, le plus peuplé du département, fut découpé en 1985 pour permettre l’élection d’un socialiste. Elle démissionna du conseil général pour permettre l’élection aisée de Gérald Maisse et accepta de se présenter, dans le canton Amiens Nord où le Front national connaissait une forte poussée électorale. L’électorat communiste s’abstint massivement, jugeant la démission de son élue, appelée par tous « Éliane », comme une opération politicienne, et trompé par la candidature d’une inconnue du FN, prénommée elle aussi Éliane. Éliane Cosserat arrivait seulement en troisième position avec 871 voix.

De 1979 à 1982, Éliane Cosserat fut désignée par le conseil général de la Somme, composé d’un nombre égal d’élus de droite et de gauche comme un de ses six représentants au conseil régional de Picardie. En 1980, elle fut élue au bureau du conseil et rapporteur général du budget. Elle collecta et chiffra les besoins de la région pour demander à l’État un plan de rattrapage. Elle veilla à un développement respectueux des espaces naturels sur la Côte picarde, au financement de la rocade d’Amiens et à la construction du pont Jules Verne. Elle fit voter des subventions pour le festival de cinéma d’Amiens, pour la troupe de théâtre professionnelle, pour la rénovation des orgues (Saint-Michel etc.), des théâtres de Beauvais, de Laon, du cinéma Rex (Arts et Essai) à Amiens, et pour l’aménagement de bases de loisirs aquatiques par département. Sur le plan de l’organisation du PCF, fonctionnait un comité régional de Picardie qui adopta, à son initiative, en avril 1980, une résolution « Pour le maintien et le développement culturel en Picardie ». Elle ne fut pas renommée en 1982 par le Conseil général alors qu’elle était vice-présidente du Conseil régional. N’ayant plus de mandat électif après sa démission du Conseil général et sa non-réélection en 1985, la presse s’étonna qu’elle ne soit pas candidate au Conseil régional sur la liste communiste. En dépit de plusieurs démarches des communistes amiénois, elle ne figura pas sur la liste des candidats en position éligible.

Le 25 septembre 1977, aux élections sénatoriales, Éliane Cosserat figurait en deuxième position sur la liste « pour la défense des intérêts des communes et de la population » présentée par le PCF, qui atteignit le second tour.

Éliane Cosserat, selon son témoignage, avait « toujours respecté les statuts du PCF, reversé la totalité de ses indemnités d’élue ». Elle n’avait « jamais contesté, à l’extérieur du Parti, les décisions prises par la majorité ». À l’intérieur du Parti, elle s’exprimait « sans détours provoquant souvent des débats approfondis ». Les actions collectives et les analyses des résultats qu’elle proposait, selon elle, « la rendaient incontournable mais irritaient certains dirigeants. » Dans les années 1980, elle assista en spectatrice à quelques réunions de différentes dissidences et d’ATTAC, mais « aucune ne correspondait à ses orientations et ne proposait d’actions persévérantes avec les personnes les plus lésées par le capitalisme. »

Après la suppression de son poste de directrice d’études en 1987, Éliane Lefèvre quitta Amiens et reprit son nom de naissance. Elle fut nommée professeur au lycée Fénelon à Paris (1987-1988) puis au lycée de la Légion d’Honneur à Saint-Denis (1988-1994) où elle fut secrétaire de la section SNES. À Saint-Denis où elle emménagea en 1987, puis à Paris où elle habita depuis 1997, elle resta membre du PCF mais refusa toute responsabilité. Elle participa aussi aux activités du SNES-Retraités, de la FSU, de la FGR.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article20704, notice COSSERAT Éliane [née LEFEVRE Éliane, Hélène, Élise] par Jacques Girault, version mise en ligne le 25 octobre 2008, dernière modification le 17 avril 2022.

Par Jacques Girault

<center>Éliane Cosserat en 1980</center>
Éliane Cosserat en 1980
<center>Éliane Cosserat en 1983</center>
Éliane Cosserat en 1983
<center>Éliane Cosserat en 2006</center>
Éliane Cosserat en 2006

SOURCES : Arch. comité national du PCF. — Renseignements fournis par l’intéressée.

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