PIERRE Roger [PIERRE Marie, Charles, Roger] (version J. Sauvageon)

Par Jean Sauvageon

Né le 16 juin 1911, à Belmont-les-Darney (Vosges), mort le 25 juin 1998 à Valence (Drôme) ; professeur, historien ; militant communiste de la Drôme.

La Drôme et l’Ardèche entre deux guerres 1920-1939, Éditions Notre temps, 1973.

Roger Pierre était issu d’une famille d’origine modeste, de journaliers du côté paternel, de forgerons du côté maternel. Sa mère assumait les taches du foyer. Son père, Émile, qu’il vénérait beaucoup, était instituteur de campagne, vieux dreyfusard et militant laïque, diffusant le savoir dans son village par des conférences.

De 1924 à 1927, il fut élève à l’école primaire supérieure de Toul, en tant que boursier, puis élève-maître à l’École Normale d’instituteurs de Mirecourt, puis de Nancy. Après ses études secondaires, il intégra l’École normale supérieure de Saint-Cloud, major de la promotion lettres 1931-1933. Pendant cette période parisienne, il ne manqua aucune occasion de parfaire sa formation. Il suivait des cours à la Sorbonne notamment ceux d’Albert Mathiez. Il fut reçu premier au professorat des écoles normales.

Dès 1930, il milita dans diverses organisations progressistes et, en 1934, après les journées de février, par haine du fascisme et pour œuvrer pour « des lendemains qui chantent », il adhéra au Parti communiste où il prit rapidement des responsabilités.

Il débuta sa carrière d’enseignant à l’École normale de Varzy dans la Nièvre, puis fut nommé à Lyon en 1936. Il envisagea alors de poursuivre des études d’histoire de l’art et obtint dans ce but une année de congé sans solde en 1937-1938 pour se rendre, sans moyens financiers, en Italie et en Grèce qu’il parcourut à pied, en campant. Au retour, il abandonna ses projets d’études pour se consacrer à l’action militante contre le fascisme et la guerre.

Mobilisé en 1939 sur le front de la Sarre, il fut fait prisonnier après l’armistice de 1940. Là, encore, son caractère militant le poussa à ne pas accepter cette situation. Il organisa le Comité de Résistance du Stalag III A, mit sur pied une organisation du parti communiste, rédigea, écrivit lui-même des journaux en direction de ses camarades. Il tenta plusieurs fois de s’évader mais, repris, il recommença son action de résistance.

Le 1er octobre 1946, il reprit son poste de professeur d’histoire et géographie à l’École normale de Valence. C’était le départ d’une autre partie importante de sa vie qui lui permit de s’épanouir dans plusieurs domaines : – le pédagogue, le formateur d’instituteurs ; – le militant politique qui va s’affirmer ; – l’historien.

Militant du Parti communiste français, il en fut un des responsables écoutés de 1947 à 1964, membre du comité fédéral et du bureau fédéral de la Drôme. Il fut conseiller municipal de Valence de 1947 à 1959, intervenant redouté par ses adversaires.
Il fut dans la même période responsable départemental du Mouvement de la Paix. Il anima plus particulièrement les luttes contre la bombe atomique avec « L’appel de Stockholm », contre le réarmement allemand, contre les guerres d’Indochine et d’Algérie. En 1965, il fut le principal artisan de la création du Cercle d’Études Marxistes à Valence.

En octobre 1946, il participa à la réouverture de l’École normale et participa durant 25 années, jusqu’en 1971 à la formation de centaines d’instituteurs et d’institutrices. Ses anciens élèves en gardèrent une marque indélébile. Ses cours étaient toujours préparés avec minutie.

Ses nombreuses activités ne lui firent pas délaisser sa passion pour les voyages d’où il rapportait toujours une abondante documentation pour illustrer ses cours. Il parcourut l’Europe méditerranéenne, centrale et balkanique, la Turquie, l’URSS, l’Asie Centrale, Ceylan, l’Inde, les États-Unis, le Mexique, le Guatemala, le Pérou, la Bolivie, l’Algérie, le Niger, l’Ile de la Réunion.

Dès son arrivée dans la Drôme, il avait commencé à accumuler des documents. Ses recherches se firent aux Archives départementales. Mais il fit de nombreux séjours à Paris pour explorer les Archives nationales. Cette accumulation servit à écrire de nombreux articles, plus d’une cinquantaine dans les revues départementales ou nationales. Ses périodes d’études privilégiées furent les XIXe et XXe siècles et, dans ces périodes, l’étude du mouvement ouvrier dans la Drôme. Son souci était de faire connaître l’histoire du peuple, de ces petites gens et de leurs luttes pour améliorer leur vie, ces gens qui n’ont, pour la plupart, pas laissé de traces écrites personnellement et qu’il faut savoir retrouver cependant. C’est le vrai travail de chercheur, d’historien, ne se contentant pas seulement des grands épisodes politiques ou militaires, de l’évocation des grandes figures de notables. C’est sa faculté d’analyser les faits, d’établir les liens de cause à effets. C’est l’application à l’histoire des méthodes scientifiques d’investigation. Il a rédigé près de 200 articles du Dictionnaire du Mouvement Ouvrier, le Maitron.
Les ouvrages qu’il a publiés après sa retraite professionnelle en 1971 sont nombreux :
• 1972 : Aux origines du mouvement ouvrier dans la Drôme : Les ouvriers chapeliers de Bourg-de-Péage.
• 1973 : Aux origines du mouvement ouvrier dans la Drôme : Des compagnonnages à l’insurrection de 1851.
• 1973 : Les origines du syndicalisme dans la Drôme.
• 1977 : La Drôme et l’Ardèche entre les deux guerres.
• 1981 : Ah ! Quand viendra la belle ? Résistants et insurgés de la Drôme, 1848-1851.

En 1982, il prit l’initiative de réunir des enseignants curieux d’histoire pour créer un groupe de recherches sur l’histoire du département, en particulier, sur la période révolutionnaire. L’objectif premier était d’écrire un livre sur l’histoire de cette période primordiale la Drôme. Le résultat de ce travail d’équipe fut la publication de trois ouvrages, soit près de 1 000 pages pour 10 ans d’histoire de la Drôme. Ce sont :
• 1986 : 240 000 Drômois. La fin de l’Ancien Régime. Les débuts de la Révolution.
• 1989 :240 000 Drômois aux quatre vents de la Révolution.
• 1996 : 240 000 Drômois de Robespierre à Bonaparte.
Après son décès en juin 1998, l’équipe a publié un quatrième ouvrage nourri par les documents de Roger Pierre, Les Drômois sous Napoléon. 1800-1815.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article207780, notice PIERRE Roger [PIERRE Marie, Charles, Roger] (version J. Sauvageon) par Jean Sauvageon, version mise en ligne le 25 octobre 2018, dernière modification le 9 avril 2021.

Par Jean Sauvageon

La Drôme et l’Ardèche entre deux guerres 1920-1939, Éditions Notre temps, 1973.

SOURCES : Notes de Jean Sauvageon.

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