LALOGE François

Né à Vandrenesse (Côte-d’Or) le 19 novembre 1824 ; ouvrier boulanger, puis courtier de commerce ; franc-maçon — voir Thirifocq E. ; coopérateur et communard, mort en déportation à la Nouvelle-Calédonie le 10 décembre 1878.

Fils d’un carrier, il vint en 1843 travailler à Paris comme ouvrier boulanger. En 1851, il était gérant de l’Association des Ouvriers boulangers à La Villette, dont il avait été un des fondateurs en 1850, et qui comptait une quarantaine d’adhérents : « Nous pensions, dit-il lors de son interrogatoire en 1872, à nous soustraire à la pression des patrons en mettant en commun nos heures de travail et nos gains et arriver à une sorte de coopération entre nous. » Il fut arrêté pour délit de société secrète : « J’ai été pris à titre de responsable comme gérant de l’association et condamné [le 28 juin 1851] à six mois de prison pour avoir fait sécher des poudres sur nos fours ». Pendant sa détention à Sainte-Pélagie, l’association fut déclarée en faillite (le 25 juillet).
Après son premier mariage en 1856, il exploita pendant deux ans et demi, avec son beau-frère, un petit fonds de librairie, rue Saint-Louis au Marais. Le fonds ayant été vendu, il reprit son premier état de boulanger jusqu’en 1861. Après son second mariage en 1861, il se fit employer chez son ancien beau-frère devenu commissionnaire en marchandises. Celui-ci lui céda en janvier 1865 son fonds, qu’il continuait de gérer en 1870. Il habitait alors, 134, boulevard Richard-Lenoir. Il s’était marié deux fois à Paris, en 1856 puis en 1861 ; il était père de deux enfants, âgés de neuf ans et de deux ans en 1872.

Après le 4 septembre 1870, il fut chargé par le Gouvernement de la défense nationale de réorganiser les services de la municipalité du XIe arr. et s’en acquitta jusqu’à l’élection du maire Mottu. Il resta à la mairie, chargé plus particulièrement du service des ambulances et de la distribution des secours.

Ami de Ranvier, il fut nommé par lui, après le 18 mars 1871, membre de la Commission municipale de six membres (Couturier, Dangers, Guillemin, Laloge, Marty, Taillade) qui s’installa à la mairie du XXe arr. ; il y dirigeait le bureau de l’instruction publique. Il resta à son poste jusqu’au 29 mai, date de son arrestation dans l’ambulance de la mairie.
Il procéda activement à la laïcisation des écoles et orphelinats congréganistes de l’arrondissement, contrôlait et inspectait les nouveaux instituteurs installés par la Commune, fixait les programmes et la liste des livres à utiliser. Il avait signé et fait placarder une affiche dans laquelle les autorités religieuses étaient accusées de « confisquer la liberté de conscience, fruit de la Révolution », et où était prônée l’adoption d’un « enseignement public ne procédant d’autre autorité que de la science humaine ». Accusé de pillage d’établissements religieux (un témoin prétendit l’avoir vu briser un chemin de croix), d’arrestation illégale de religieux, il fut condamné, le 11 octobre 1872, par le 17e conseil de guerre, à dix ans de travaux forcés et à 3 000 f d’amende.

De l’île Nou où il fut détenu, il écrivit à sa femme et à son fils aîné Georges (le cadet était prénommé Spartacus) des lettres qui sont d’émouvantes professions de foi. Il adjurait son fils de ne jamais faillir à l’honneur, de croire seulement à ce qui peut être démontré par la science et le raisonnement. À soixante ans, prisonnier du bagne, il jugeait avec sérénité : « Tous mes actes pendant le Siège et la Commune sont essentiellement politiques, sont les conséquences de mes opinions républicaines [...] Mes actes peuvent être désavoués par ceux qui ne pensent pas comme moi, mais on ne peut m’en faire des crimes. »

On lui avait refusé, le 12 février 1873, une grâce qu’il n’avait jamais demandée. C’est en mars 1879 seulement qu’il bénéficia d’une remise de peine (posthume) de deux ans.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article209307, notice LALOGE François, version mise en ligne le 4 décembre 2018, dernière modification le 27 juin 2022.

SOURCES : Arch. Nat., BB 24/783, n° 12 212 (neuf lettres écrites à sa femme de 1873 à 1876 figurent à son dossier. Elles ont été reproduites, dans Le Mouvement social, n° 37, octobre-décembre 1961). — Arch. Nat., BB 27. — Arch. Nat., H Colonies 382. — Arch. Min. Guerre. 17e conseil, dossier 578. — J.O. Commune, op. cit., 5 avril 1871. — Le Droit, 14 janvier et 24 mai 1850.

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